La science-fiction partage avec l’utopie la plus folle des audaces : elle ose croire en l’être humain, en ses capacités à l’adaptation et à la survie, en renonçant à la violence, en apprenant de ses erreurs, et en changeant ses représentations. À chaque fois, l’auteur s’engage et, tel un athlète, un comédien, un prêtre ou un enseignant, il s’évertue à bien faire. Son histoire se déploie, atteint le faîte, glisse vers son terme, mais le réel demeure ce qu’il est. Pourtant, le temps de la lecture, un souffle surgi de nulle part a suspendu l’incrédulité, le cynisme et la passivité. La science-fiction, tout comme l’utopie, modifie notre regard sur nous-mêmes, nos sociétés, notre avenir. Elle nous pousse à réfléchir. (10)
... nous sommes aujourd'hui dans une société d'individus de plus en plus autocentrés sur leurs ressentis, leurs peurs, chacun et chacune se focalisant sur tout ce qui risque de heurter sa sensibilité. Chercher à s'en prémunir par anticipation est devenu la priorité. Or l'extraterrestre, parce qu'il vient de l'extérieur, est forcément synonyme de risque. Sa présence expose au danger. Donc, plutôt que d'aller à sa rencontre, on le supprime de l'équation narrative, on le remplace par des explications issues du for intérieur, en oubliant que l'altérité doit être acceptée pour faire grandir l'esprit. (page 62)