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Critique de fanfanouche24


J'avoue humblement ne jamais avoir lu un texte de Philippe Besson ; voilà qui est fait, grâce à des amis-Libraires [Librairie Caractères / Issy-les-Moulineaux ], ayant eu la gentillesse de me prêter le Service de presse de son prochain livre, à paraître le 7 janvier 2021…

La teneur et le ton de ce roman s'accordent on ne peut mieux, à la photographie, couleur sépia, ornant la couverture…La nostalgie,le chagrin, le temps qui file comme l'éclair…les enfants qui grandissent trop vite, les rejetons devenus adultes sans que les parents n'y aient pris garde…Une brusque solitude des parents, et de la maman, en l'occurrence. Réorganiser une vie de « parents » en une autre existence, à nouveau centrée sur le couple d'origine… La maison vide, les prémices du vieillissement, etc.

Ce roman se situe en une seule journée : journée ultime du petit dernier d'une fratrie de trois enfants ; des parents vont aider leur cadet à emménager dans son premier logement… le narrateur se trouve être la maman, qui a un mal fou à réaliser l'inexorable de ce départ, et chaque détail, même le plus prosaïque de cette dernière journée, va induire un déferlement de souvenirs…

« Pourtant, il pourrait d'ores et déjà rentrer chez lui, parcourir les trois cents mètres qui le séparent de son nouveau domicile, ce serait une façon de ne pas conférer de solennité à ce qui advient, mais cela témoignerait d'une indifférence méchante à l'égard de la peine immanquable de sa mère. Et méchant, il ne peut pas l'être: celle qui s'éloigne est tout de même son premier amour. D'ailleurs, lui aussi, il est ému, et ça le décontenance, ça le déséquilibre un peu, il ne va pas le nier. Ce n'est pas rien, ce qui se passe, c'est un basculement vertigineux; il entre dans la grande photo du monde. (p. 128)”

Avec des mots simples, Philippe Besson exprime au plus juste la douleur intense d'une mère, voyant partir son dernier enfant, vers sa vie d'adulte à construire, qu'il doit inventer à son tour…son désarroi infini devant tout cet espace brusquement “vide” ; le « deuil « incontournable à faire pour chaque parent et chaque mère , à « l'envol » de ses rejetons :

« (...) c'est la dernière fois qu'il apparaît ainsi, c'est le dernier matin.
Et immanquablement, elle est envoyée à tous les matins qui ont précédé, ceux des balbutiements et ceux de l'affirmation, les matins d'école et les matins de grasse matinée, les matins d'hiver dans la lumière électrique et les matins d'été comme celui-ci, les matins malades et les matins en vacances, les pacifiques et ceux du mauvais pied, combien y en a t-il eus, il serait facile d'établir le compte exact, mais elle redoute que le compte exact ne lui donne le vertige, tous ces matins qu'il pleuve ou qu'il vente, elle était présente et c'est fini, ça s'arrête ici, ça s'arrête maintenant. Elle sourit et il fait semblant de ne pas discerner la tristesse dans son sourire. « (p. 26)

Il est aussi question, inévitablement, des écarts de compréhension, de vocabulaire, de codes différents , entre les générations… il n'est vraiment pas aisé d'être parent !...

« La vérité, c'est qu'elle pense à tout ce qui se joue en dehors d'elle, tout ce dont elle est exclue, tout ce que son fils ne lui confie pas, parce qu'un garçon de cet âge parle avec ses amis, pas avec ses parents, elle songe que son fils cloisonne naturellement son existence et que désormais elle se tient du mauvais côté de la cloison , elle songe que, jusqu'à une période récente, elle savait tout et que désormais elle ne sait plus grand-chose, elle partageait l'essentiel et désormais elle n'a plus droit qu'à l'accessoire (…) (p. 70)

Ce texte, dans une prose très sobre, décrit efficacement et frontalement le désarroi d'une mère à l'envol de son dernier enfant… Tout sonne juste, et nous interpelle. de moi-même, je n'aurais sans doute pas acquis cet ouvrage, mais je suis ravie que mes amis-libraires m'en aient donné l'opportunité, et ce moment de lecture a eu du positif, puisqu'il a provoqué ma curiosité sur les autres écrits de cet écrivain...!

Je ne peux pas encore vraiment émettre un avis sur cet auteur, n'ayant lu que cet unique roman…
En parcourant sa bibliographie, j'ai toutefois noté , dans un autre registre, deux publications qui attisent mon envie d'aller un peu plus loin: un texte écrit à partir d'un tableau d'Edward Hopper, « L'Arrière- saison « et « Les jours fragiles », les derniers jours de Rimbaud, avec sa soeur Isabelle...
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