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Critique de Bdotaku


Xavier Betaucourt scénariste de « Ils ont tué Léo Frank » ou encore de « Simone Veil ou la force d'une femme » s'associe au dessinateur Aleksi Cavaillez (qui s'est attaqué il y a peu à la bio-graphique de Célestin Freinet) pour nous proposer le tome inaugural de la nouvelle collection Dyade aux éditions Steinkis.

Cette série concept a pour vocation de mêler Histoire et histoires de couples célèbres (hétérosexuels, homosexuels, lesbiens) et de montrer comment ces « duos » par leurs actes et leurs choix ont rayonné bien au-delà de leur relation personnelle devant ainsi une « dyade » (réunion de deux principes philosophiques se complétant et s'amplifiant). Pour ce « pilote » de la collection, ils ont choisi le couple mythique Signoret/Montand qu'ils vont suivre durant quelques mois seulement : lors de la tournée du chanteur « derrière le rideau » de fer. Est-ce un hasard s'il embrasse alors une nouvelle acception du terme : celle d'un segment de tracé frontalier séparant deux états ou plutôt ici deux Europe en pleine guerre froide ? En effet, les deux artistes « compagnons de route » du PCF vont se rendre en URSS pour une tournée planifiée 18 mois plus tôt alors que la volonté d'émancipation de la Hongrie vient juste d'être réprimée dans le sang.

Ce jeu sur la polyphonie met bien en valeur toute la subtilité d'un scénario qui navigue avec bonheur de l'Histoire à l'histoire d'amour de deux vedettes puis leur prise de conscience des failles d'un régime. Xavier Betaucourt ne montre nulle complaisance envers le duo. Il présente Montand comme emporté et sanguin parfois et doté d'oeillères tandis que Signoret apparaît froide et peu compatissante envers sa cousine tchèque. Mais dans le même temps on voit le chanteur apostropher Khrouchtchev pour lui faire part de son indignation et l'on découvre dans un flashback la force de la passion qui lie les deux amants. Nulle hagiographie mais l'exposé des faits. L'auteur stigmatise aussi l'attitude de la gauche caviar de l'époque en soulignant l'attitude égoïste d'Aragon par exemple.

Ce scénario habile m'a donc séduite. Malheureusement il n'en est pas tout à fait de même pour le dessin. Alors que la flamboyante couverture arbore la couleur rouge emblématique du communisme, l'intérieur de l'album est, lui, en noir et blanc. Cela m'a paru un choix judicieux car cela rappelle les films d'actualité de l'époque et permet une distanciation qui sied bien à la bd documentaire : au noir de la répression répond le gris du quotidien de Budapest privé de sa liesse et de son « printemps » et le blanc sied bien également à cette époque de l'année puisque la tournée se déroule en hiver. de façon symbolique, ce choix s'accorde également aux propos du scénariste : il n'a pas de manichéisme puisque le gris abonde. Donc je salue une utilisation très intelligente de la gamme chromatique ; En revanche, les formes des visages sont ultra simplifiées ce qui nuit à l'identification des personnages et ne rend nullement les célébrités ressemblantes. Souvent les arrières plans sont à peine esquissés et la mise en scène est plutôt paresseuse.

Je remercie néanmoins véritablement Steinkis et Babelio pour cette découverte car la série apparait très prometteuse et donne à penser. J'ai particulièrement hâte de découvrir l'album consacré à Cocteau et Jean Marais et celui retraçant l'histoire d'amour De Beauvoir et Algren car ils seront dessinés par deux jeunes femmes très talentueuses : Maurane Mazars et Anne-Perrine Couët.
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