Le concile des arbres

[sur le fronton d'un bâtiment] :
Ministère public pour des affaires privées

- A part ça, ça va ?
- A part quoi ?
- Comment ça quoi, à part quoi ?
- Vous me dites, à part ça, ça va, alors, moi, je vous demande ce que veut dire à part ça, comme nous n'avons parlé de rien d'autre auparavant, je ne vois pas bien à quoi vous faites référence, c'est tout...
- Mais de quoi vous me parlez, là ? J'essaye juste d'être aimable et d'engager la conversation, puisque vous faites, comme si je n’étais pas là depuis que nous sommes arrivés, et ...
- Oui, eh bien, ça va...
- Comment ?
- Comment cela, comment ? Vous vouliez savoir si à part ça, ça allait, eh bien oui, ça va... A part ça, ça va...
- Vous me ferez signe quand vous aurez fini votre numéro...
- Veuillez nous pardonner, Sir. C'est juste qu'elle...
- Qu'elle quoi ?
- Bien ! Nous allons donc pouvoir parler de votre prochaine mission.

- Qu’est-ce que vous avez là-dedans ?
- Toute ma vie.
- C'est-à-dire ?
- Eh, bien de quoi faire des prélèvements, mes notes sur notre affaire en cours, du cognac, et un petit en cas que m'a préparé Nanny... Je veux dire ma gouvernante...
- Nanny... comme c'est charmant.
- Oh, je vous en prie... Vous avez bien Li qui s'occupe de tout chez vous ? Eh bien chez moi, c'est Nanny. Et ce depuis toujours. D'où sort-il ce Li d'ailleurs ?
- C'est un ancien compagnon de feu mon mari qui est resté à mon service lorsque je me suis retrouvée toute seule... Il est fidèle, discret et efficace.
- Et Lord Pomerol, comment vous-a-t-il recrutée ?
- Je vous trouve bien curieux, mon ami. Le sujet vous intéresse à ce point ?
- Disons que je tente d'améliorer les relations avec ma collègue de travail...
- Eh bien, disons que j'ai répondu à une petite annonce. Et vous ?
- J'étais payé pour l'éliminer, il m'a offert plus...
- Oh, vous, un tueur ? J'ai un peu de mal à y croire.
- Oui, moi aussi...

- Que faites-vous ?
- Je prends des notes. Et vous, rien, comme d'habitude ?
- Eh bien, si, je... Je crois que je vais levers les mains en l'air...
- Regardez qui voilà... Monsieur le Directeur, nous avons de la visite. Ces sales petits espions du Ministère...
- C'est proprement scandaleux ! Mais que faites-vous là ?
- Nous menons notre enquête, tout simplement.
- Mais je vous avais interdit de...
- Arrêtez votre cirque, Tournepied ! Il se passe ici des choses assez peu catholiques.
- La religion n'a rien à voir là-dedans, pauvre ignorant ; c'est de science qu'il s'agit !
- Et les enfants ? Y avez-vous pensé un seul instant, aux enfants ?
- Mais qui êtes-vous pour prétendre savoir ce qui est bon pour eux ? Des médecins ? Non ! Moi seul suis compétent pour en juger ici. Ces enfants sont sous ma responsabilité. Je me suis engagé à les guérir de leur état, ce que je ferai grâce à la science. Je publierai les résultats de ce cas extraordinaire et toute l'académie m’encensera !

Vous êtes décidément bien naïf, Monsieur Dupré. Quand il s'agit de pouvoir, l'âme humaine est d'une noirceur insondable et prête à tout pour s'en emparer.

Les vieux arbres, comme les vieux en général, ont leurs habitudes et leurs certitudes. Dérangez leur routine et ils meurent.

- Le chien ! C'est le gros chien qui nous a attaqué ici même. Et il est avec Agamemnon...
- Bien sûr. Cette bête s'appelle Oreste. Et dans l'"Illiade" Oreste est le fils d'Agamemnon, comme chacun sait. C'est comme cela que j'ai compris qu'ils étaient venus fouiller la clairière.

- J'espère que nous n'arriverons pas trop tard pour les arrêter.
- Si vous aviez pris un peu moins de temps pour vous changer, toute cette affaire serait réglée depuis un bon moment. Mais monsieur n'était pas tout à fait sec...
- Excusez-moi, mais personne n'a jamais sauvé le monde avec une pneumonie...

- Vous êtes décidément bien naïf, Monsieur Dupré. Quand il s'agit de pouvoir, l'âme humaine est d'une noirceur insondable et prête à tout pour s'en emparer.

- Tous ces enfants avaient en fait mystérieusement disparu de chez eux environ une semaine avant qu'on ne les retrouve par ici dans la clairière...
- C'est vraiment très curieux... D'autant que j'ai vu dans le dossier de l’hôpital , que plusieurs de vos employés ont eux aussi disparu ces derniers mois...
- Eh bien oui... Effectivement... Mais l'enquête diligentée par le Ministre lui-même n'a pas abouti.
- En effet, notre collègue chargé de l'enquête a lui aussi disparu...