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Critique de croquemiette


Nous voici à Ségurian, petit village de montagne de 400 âmes, où le soleil tape dur et où le temps s'est presque arrêté. La Saint-Barthélemy, tous les 24 août, rythme la vie de Ségurian, la transformant en une grande fête, et ponctue chaque chapitre du roman.
L'action s'ouvre sur l'arrivée de Guillaume Levasseur, jeune homme enthousiaste et sûr de lui, qui très vite souhaite ouvrir une bergerie dans ce village, où il a plus ou moins habité dans son enfance.
Sauf que le territoire a un prix et que les traditions sont bien ancrées dans ce bled.
Même s'il a tout fait dans les règles et que sa bergerie est aux normes auprès de la mairie, il se retrouve pris dans une guerre de territoire avec les chasseurs, qui depuis toujours chassent sur ces terres et ne souhaitent pas changer leurs habitudes pour quelques brebis qui paissent.
S'ouvre un corps à corps tendu et une escalade de mesquineries entre les deux groupes sociaux, les chasseurs d'un côté, majoritaires, et le berger et ses quelques amis de l'autre, qui viennent d'arriver et sont perçus comme des touristes, des bobos.
Guillaume se frotte à Joseph Anfosso, sorte de chef du village et représentant des chasseurs mais il va pourtant sympathiser avec son fils Emmanuel, à qui il fait découvrir l'univers de la moto, faisant fi des querelles d'adultes.
On sent bien que ça va salement se terminer. La tension est palpable et monte petit à petit.
J'ai beaucoup aimé ce roman qui oppose plusieurs mondes occupant une même terre. le monde de ceux qui savent à peine lire au monde de ceux qui s'expriment bien, les lettrés de la ville. le monde des vrais campagnards au monde des néo-paysans. Jérôme Bonnetto arrive à nous faire entrer dans l'arène avec subtilité, sans lourdeur, ni manichéisme, utilisant un point de vue extérieur, comme si nous étions derrière la caméra, dans un western.
C'est que c'est un livre « de bonhomme », une guerre d'égo et de territoire entre hommes, nous montrant ce que la virilité peut avoir de plus toxique.
Les personnages sont très bien travaillés. La douceur de Guillaume, son intelligence et son amour des bêtes font plaisir à lire. Mais Joseph Anfosso se questionne beaucoup aussi, même s'il n'en montre rien et se cache derrière sa carapace de dur.
Le conflit et la fierté broient ces deux hommes, qui finalement ne sont pas si éloignés et partagent quelques valeurs communes.
L'écriture est tout simplement sublime et nous laisse approcher la nature du lieu, très hostile et minérale, baignée de lumière crue et battue par les vents secs et la chaleur.
La certitude des pierres est un coup de coeur, j'ai été happée dès les premières pages, jusqu'au dénouement. On n'est pas très loin d'un Franck Bouysse ou de l'épervier de Maheux de Jean Carrière.
Sélection Prix Cezam 2021.
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