Les coeurs pleins

Lila a vingt-cinq ans et est interne en neurochirurgie. Les journées interminables, les gardes de quarante-huit heures, les doutes, les peurs, le manque de sommeil. C𠆞st tout ça, être interne. Heureusement, il y a les collègues, véritables bouées de sauvetage auxquelles on peut se raccrocher, avec qui on peut décompresser, rigoler, pleurer, ou même hurler. Lila, c𠆞st avec Pauline et Simon qu𠆞lle effectuera son internat à Lariboisière. Heureusement, ces trois-là s𠆞ntendent à merveille et se soutiennent mutuellement.

Puis, un jour, par un concours de circonstances, Lila apprend la vérité à propos de la mort de sa mère, Marianne, alors qu𠆞lle n’était qu’une adolescente. C𠆞st un choc, insoutenable. Et contre ça, même ses deux compères ne peuvent rien. Alors, Lila décide de partir à la rencontre de sa famille, pour apprendre à connaître réellement sa mère. Celle qu𠆞lle a été, avant le drame. Avant la mort et le don d’organes.

Dans ce récit aux allures de road-trip, Lila va retracer la vie de sa mère et, peut-être, commencer à faire le deuil de son immense perte, pour enfin se trouver elle-même. Laurianne Bordenave aborde avec intimité et justesse les questions du don d’organes et les conséquences psychologiques qu’il peut entrainer pour les proches.

Je ne vous dirai pas que ce roman n𠆞st pas cousu de fil blanc, ce serait vous mentir. Cependant, il y a dans ce récit une douce et agréable intimité qui s’installe et le plaidoyer autour du don d’organes est, j𠆚i trouvé, bien mené.

Parce que, peut-être, un cœur n𠆞st-il plein que lorsque toutes les pièces s’imbriquent parfaitement les unes dans les autres, lorsqu’il n’y a plus de place pour le mensonge. Peut-être un cœur n𠆞st-il plein que lorsque tous les organes sont bien à leur place, pleins de vitalité et de fougue. Parce que, sans les organes nobles au grand complet et en parfait état de marche, nul ne peut avancer bien loin. Parce que, avec un cœur brisé, nul ne peut espérer être comblé.

Un récit sensible et délicat, sur le sens de la vie et ce que cela nous coûte, parfois.

Une histoire de coeurs. le coeur de Lila, une jeune femme de vingt-cinq ans. Coeur à l'ouvrage, dans son stage en neurochirurgie. Coeur lourd, à la découverte des circonstances de la mort de sa mère. Cette mère en pointillé, que le coeur garde intacte, mais que la raison a voulu effacer, juste un peu, pour souffler.
Alors, elle sonde les coeurs et les souvenirs des autres, ces autres qui gardent forcément en eux une petite trace de sa mère. le deuil se réveille, douloureux. Coeur en miettes. Lila veut savoir. Coeurs vides, quand ils ne battent plus. Coeurs pleins, la vie. Mais parfois la nuance intervient : les machines fonctionnent, elles prennent le relais. Un corps qui vit. Une âme qui s'en va. Une enveloppe de peau, vide. le coeur bat, pourtant. Signe de vie? Coeur à prendre? Délicat pourtant... Comment ouvrir, comment mutiler, comment prendre dans la chair sans abîmer ce qui a été un corps, une personne? Comment dire, oui. Allez-y. Prenez-les. Alors que le corps aimé est encore tiède. La médecine l'exige et les coeurs attendent, impatients, d'une seconde vie, d'une seconde chance. Ecrit avec pudeur, délicatement, comme on chuchote, comme on arrive doucement, avec fragilité, par peur de casser. Mais les mots sont francs, sans détours, l'auteur nous fait véritablement réfléchir, sans hypocrisie, sans jugement. Cette histoire de coeur et de deuil, n'est que la surface finalement, pour oser traiter de ce dont on parle peu, mais le sujet sous-jacent, la réflexion sur ce sujet épineux, qui dort et qui remue, c'est ce que beaucoup, certainement, pense tout bas. On dit peut-être. On dit oui, et on pense non. On pense non, et on dit oui. Merci aux éditions JCLattes et à Netgalley !