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Critique de Renod


Les notes de ce journal rédigées entre 1922 et 1925 ont été confisquées par le Guépéou lors d'une perquisition au domicile de Boulgakov le 7 mai 1926. Elles lui furent restituées en 1929 et il s'empressa alors de les détruire. Les passages qui ont été conservés proviennent des copies réalisées par la police politique. Détail ironique puisqu'il touche l'auteur de la célèbre assertion : « les manuscrits ne brûlent pas ».

« Nous nous débattons tels des poissons contre la glace. » Boulgakov est arrivé à Moscou à la fin de l'année 1921. La capitale est délabrée, sort du « communisme de guerre » et fait ses premiers pas dans la NEP. L'écrivain fait part de ses tracas financiers et domestiques. Il parcourt les rues boueuses avec ses chaussures aux semelles usées pour placer des articles ou des nouvelles dans diverses rédactions. Ses problèmes d'argent sont sans fin et il rage de devoir consacrer son temps à la rédaction de textes sans envergure. Il évoque ses problèmes de logement qui deviendront avec les années une fixation. le thème sera abordé dans plusieurs de ses oeuvres.

« En tant qu'écrivain, je suis incomparablement plus fort que tous ceux que je connais. » Boulgakov doute mais il est conscient de son talent et ne regrette pas de s'être engagé dans une carrière littéraire malgré les difficultés. Il réserve les critiques les plus acerbes pour les écrivaillons, rédacteurs en chef ou théatreux qu'il côtoie. Si l'un d'eux est juif, il se permet des réflexions que nous qualifierons de « déplacées ». S'il est profondément antisoviétique, il exprime beaucoup de respect pour les deux écrivains officiels du régime : Maxime Gorki et Alexeï Tosltoï. Outre les textes alimentaires, cette période est féconde pour Boulgakov puisqu'il rédige dans ces années « les Oeufs fatidiques », « Coeur de chien » et surtout « la Garde blanche ».

« Il s'en passe des choses dans ce monde. » L'écrivain commente l'actualité soviétique et internationale, souvent avec cynisme et parfois avec beaucoup de clairvoyance. En 1923 par exemple, quelques semaines avant la tentative de putsch menée par Hitler à Munich, il devine la possible victoire des fascistes en Allemagne et l'avènement d'un nouvel empereur et il écrit : « dans ce cas, ça ira encore plus mal pour la Russie soviétique. »

« J'ai peur qu'en récompense de tous ces exploits on ne m'expédie dans une de ces « contrées pas si lointaines ». » le journal est parfois difficile à saisir car il faut connaitre la vie de l'écrivain et le contexte politique et international de l'époque. Mais il est éclairant car on devine derrière des préoccupations quotidiennes, la naissance des grands thèmes qui seront traités par l'écrivain. Dans ces textes, Boulgakov surprend par sa grande franchise. Il cherche à réaliser son ambition à tout prix : écrire et rester libre dans une époque de censure et de répression politique.
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