[INCIPIT]
Ne trouvez-vous pas cocasse que dans un pays de gagnants, ma malédiction soit d’avoir un jour gagné ? Pas n’importe quel jour, celui de mes sept ans. Ma mère me disait que j’étais très belle et que je n’étais pas trop bête. L’ordre des compliments est important, la forme aussi. J’étais très belle, une affirmation. Je n’étais pas trop bête, une négation. Elle aussi était belle et plutôt intelligente. C’est la raison pour laquelle je ne comprendrai jamais cette journée d’anniversaire ni toutes celles qui ont suivi pendant cinq ans. Enfin si, je comprends maintenant. Je comprends, mais je ne pardonne pas. Je ne pardonnerai jamais.
Je me déshabillais seule dans ces vestiaires qui sentaient la laque, la frousse, la transpiration, les bonbons et toujours la déception.
Il avait des boutons lui aussi, une grande façade vitrée, une grande bouche métallique. Il me faisait de l'oeil toute la journée, m'a draguée sans efforts. Je me suis laissé séduire sans difficulté, je suis devenue sa maîtresse, son esclave même. Le distributeur automatique de confiserie. Il était toujours là, fidèle, branché, généreux, réapprovisionné tous les jours en câlins sucrés, en douceurs nappés de chocolat, de gras, de sel. Son sourire rectangulaire déversait des bulles en boîte, un amant au bruit régulier, sans surprise, un amant parfait. Il suffisait de mettre une pièce et de taper le numéro de son orgasme.
La différence entre le sport et la beauté, c'est qu'avec le sport on peut toujours progresser à force de travail. La beauté, on ne peut rien y faire, qu'on s'entraîne ou pas on a toujours la même gueule.
On ne connaît pas suffisamment ses parents lorsqu'on a sept ans.
Je n'ai pas besoin d'un psy pour savoir qu'une bonne baise fait du bien et, même si ça s'est mal terminé j'en avais besoin.
Je n'ai pas besoin d'un psy pour savoir qu'une bonne baise fait du bien et, même si ça fait mal terminé j'en avais besoin. Passer autant de temps à torturer son corps sans penser à lui donner du plaisir c'est déséquilibré. Finalement j'ai satisfait la curiosité de Vince et j'ai pris mon pied, dans les affaires ça s'appelle un deal gagnant-gagnant.
C'est un sacré pouvoir que celui de détruire son corps et sa vie, de les transformer en confettis, de danser au milieu, et de sautiller dessus.
Nous, moi, ça change tout.
Oui, c'est ça, le soleil baissait et l'angoisse montait.