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La couverture et le résumé m'ont attirée irrésistiblement ! Je n'ai jamais lu des poèmes de Gwendoline Brooks mais il y avait des chances que ce roman, l'unique de sa plume, soit plutôt poétique ! Et c'est le cas même si les propos sont doux-amers et chargés de sens.

Paru en 1953, à travers Maud Martha, ce roman raconte des instantanés des années 40, d'une femme noire de la banlieue de Chicago.

34 moments en 34 chapitres qui commencent avec son enfance et se poursuivent dans sa vie de femme, puis de mère. Une vie banale mais qui n'est pas ressentie ni vécue par une jeune femme noire de la même manière que ses contemporaines blanches, elle qui est en butte au racisme que l'on peut dire ordinaire !

C'est assez déstabilisant à lire car elle ne fait pas montre de haine mais constate les faits et ses sentiments. Elle est très lucide quant aux choses et au personnes bien qu'elle sache s'emballer aussi parfois.

Une jolie prose et il est bien dommage qu'elle n'ait pas continué à écrire des romans.

Challenge Multi-Défis 2023
Challenge Riquiquis 2023
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Coup de coeur !

Des chapitres comme des instantanés.

Maud Marhta, c'est Gwendolyn Brooks. Cette femme noire dans les années 40, assoiffée de liberté. de légèreté. Comme ces femmes au teint clair. Qu'on ne lorgne pas dédaigneusement, ni au cinéma ni au supermarché.

Martha, elle a la peau noire.
Plus noire que sa soeur.
Elle est plus laide aussi.
Et puis sa famille est plus pauvre que les autres.
Maud, on l'épouse parce qu'elle est gentille, voilà.
C'est pas qu'elle se résigne. Elle sait, c'est tout.

Le quotidien ordinaire d'une femme, en trente-quatre tableaux habilement tissés. Maud Martha, jamais "assez bien", porte ce recueil d'une voix percutante et touchante.
Porte ses chaînes, ses chaînes de femme, ses chaînes de femme noire, et parvient à en faire de la musique.
Les mots de Maud sont indémodables. Ses maux malheureusement toujours d'actualité.

Je l'ai trouvé trop court !
C'est une merveille, un bijou d'ecriture, parfaitement ciselée.
Encore !
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Gwendolyn Brooks (1917-2000) était afro-américaine, poète et enseignante. Elle a étudié à Chicago, une ville qu'elle appréciait, dans un établissement élitiste où beaucoup d'étudiants blancs étaient présents. Elle a toujours souhaité écrire et ce qu'elle préférait, c'était la poésie où, d'après les critiques, elle retranscrivait à merveille la réalité. Elle a été lauréate du prix Pulitzer. Elle n'a publié qu'un seul roman, Maud Martha, en 1953. Il est inspiré de sa vie. Elle a, en effet, eu beaucoup de mal à obtenir la reconnaissance qu'elle méritait. C'est seulement cette année que cette histoire est traduite en français.
Maud Martha raconte la vie d'une jeune femme d'origine africaine qui vit à Chicago, elle est née en 1917 et le récit se termine juste après la fin de la seconde guerre mondiale. Ce n'est pas un texte linéaire. le livre est composé de trente-quatre courts chapitres, comme autant de « photographies » d'un instant T sur le parcours d'une fillette que l'on voit devenir femme, mère et épouse. Chaque « flash » est précis, délicat, écrit dans une langue poétique (ce qui explique le fait de choisir Sabine Huynh comme traductrice. La poésie étant son domaine de prédilection, elle a su parfaitement trouver le ton et les mots pour que cette lecture soit belle et porteuse de sens). On a donc une trentaine d'instantanés de vie de Maud.
Maud, quelle que soit la période, a toujours fait preuve d'optimisme, de résilience, acceptant les événements comme ils se présentaient et essayant de s'adapter. Elle a appris à ne pas déranger, à accepter l'idée que pour elle, certaines choses seraient différentes, plus ardues, à cause de la couleur de sa peau (sa soeur Helen plus claire, reçoit plus d'attention, la pauvre si elle touchait un bouton de porte crasseux….). Dénicher un appartement, aller au cinéma, au théâtre, se faire soigner, tout est plus compliqué. Mais Maud n'en a cure, elle s'accroche, elle avance, la tête haute. Pourtant tout est mis en place pour souligner la différence et parfois, elle sent bien que les adultes (son mari entre autres, quand elle sera mariée) préfèreraient se faire oublier.
Elle ne veut pas de gris, Maud.
« Les sanglots, les frustrations, les petites rancunes, les animosités grandes et laides, les contraintes mesquines sous le couvert de l'amour, l'ennui, qui arrivaient jusqu'à elle en traversant ces murs, portés par les paroles, les cris et les soupirs-tout cela était gris. »
Elle souhaite de la couleur, de la gaieté. Pas de regard soupçonneux quand elle est au milieu des blancs, le racisme n'a pas à diriger ses choix. Elle a besoin de fantaisie, de liberté, d'être elle-même sans contrainte, avec les vêtements et le mode de vie qu'elle choisit. Elle est capable de dire non, de tenir tête avec intelligence, elle est admirable car forte dans ses convictions et pleine de ressources. J'ai aimé son dynamisme et son envie de profiter de chaque instant. Elle a une énergie folle et ne veut pas perdre une seconde.
« Mais si l'amertume était dans la racine, pour quelle raison perdrait-elle son temps à s'en prendre à la feuille ? »
Ce recueil n'est pas long, les chapitres courts sont percutants. Quelques mots, des phrases chocs qui font écho dans notre esprit. Comment vivre quand on se sent quelques fois rejetée, mal considérée au travail ou dans un commerce ? Que dire à ses enfants lorsqu'il leur arrive la même chose ? L'écriture est lyrique, délicieuse, sensible, magnifique. Chaque mot virevolte, portant une forme d'éclat et de couleur, de légèreté, malgré un propos sérieux, effaçant ainsi ce qui pourrait apporter du gris, du pessimisme et faisant pétiller la vie !
NB : il y a encore des Maud Martha, partout dans le monde. Puissent-elles s'inspirer de celle-là pour continuer de tracer la route du respect.

Lien : https://wcassiopee.blogspot...
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La vie, la prose, la poésie, une lente infusion, l'acuité de la littérature. Gwendolyn Brooks poétesse renommée, dévoile son unique roman. Prenez soin de ce chef-d'oeuvre !
« Maud Martha » publié en 1953, judicieusement réédité par les Éditions Globe.
Un portrait d'une justesse impressionnante d'une femme noire (un peu, voire beaucoup, celui de l'autrice) grandissante au fil des pages. Née en 1917, elle est toujours en vie.
C'est une déambulation apprenante. le passage de l'écluse, d'ombre et de lumière et résolument attachant. le pouvoir évocateur du mot-même tiré au cordeau.
On marche dans les pas de Maud Martha, virtuose de sincérité. L'intégrité d'une femme noire dans les années 40, Chicago en toile de fond et ses relents nauséabonds d'un racisme éprouvant.
Comment forger sa propre identité dans la poussière des chemins austères et monstrueux d'inégalités flagrantes. Quid du noir et du blanc. Maud Martha sème des petits cailloux pour nous, elles et eux. le charme d'une écriture de coton, douce, voix chuchotante, solfège de magnanimité.
La classe ouvrière noire, ses combats et les exclusions, as de pique gorgé de pluie dans les ruelles intestines.
Son quotidien, kaléidoscope de trente-quatre tableaux. L'idiosyncrasie comme des courants d'air. Maud Martha décroche les étoiles du ciel et rend son monde beau, envers et contre tout.
« Quelles ineptie. Méchancetés- et inepties-que cela. Mais elle ouvre toutes les fenêtres...Elle représentait l'ensemble de la race « noire » et Charles incarnait la race caucasienne. La bénéficiaire et le bienfaiteur… Ce qu'elle voulait, c'est offrir au monde une bonne Maud Martha ».
Lucide, étonnante, intelligente, elle essaie de se fondre dans ce siècle de rancoeurs et de ségrégations. Les femmes blanches, caste supérieure, mépris sur les lèvres, et pourtant, elle se frotte aux rusticités, affronte les regards durs, soupçonneux. « Je suis censée faire quoi EXACTEMENT avec toute cette vie ? ».
Mariée, une fillette Paulette, les survivances comme des chapelles. « J'attends un bébé pour cet homme et j'aimerais le porter en paix !… Mais si l'amertume était dans la racine, pour quelle raison perdrait-elle son temps à s'en prendre à la feuille ? ».
Traverser l'immensité glacée des adversités, magistrale et digne, altière et intègre, femme noire, le spartiate d'un logement, qu'importe la pauvreté ! Elle lit « Servitude humaine » et lui « La sexualité du couple marié ». « Mais nous sommes les seules personnes de couleur ici ».
Elle est de mimétisme, dos rond, le silence est sa force. Sombre et merveilleuse, terriblement humaine. Maud Martha est quasi jumelle avec Amélie Poulain. L'Ère des petits riens et des nobles gestuelles. L'autrice en filigrane, le marque-page qui retient l'essentiel de ce microcosme , antidote aux désillusions d'un Chicago raciste.
Sublime et combattante elle se désolidarise des obscurités prégnantes et dévoreuses. Elle est exemplaire, divinement poignante dans sa ténacité. Elle contourne les obstacles pour les siens et transforme la pluie en arc-en-ciel. Optimiste dans son antre, elle saute par-dessus les flaques des rejets du monde-présent. Les discriminations sont des peintures qui coulent sur les fenêtres. Elle glisse son doigt, magicienne, et les rais de couleur alors, inondent les sourires de sa fillette.
« Maud Martha » est un edelweiss à flanc de rocher, efficace, un viatique de résistance. Un livre salutaire. le piédestal d'une littérature engagée. Traduit à la perfection de l'anglais (États-Unis) par Sabine Huynh, également poétesse. Les Éditions Globe viennent de mettre au monde un roman remarquable qui sera vite sur le podium des prix littéraires. À noter Gwendolyn Elizabeth Brooks, poète américaine et professeure est la première femme noire à recevoir le prix Pulitzer pour son oeuvre poétique en 1950.
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Maud Martha voit le jour à Chicago au sein d'une famille noire pauvre. Sa soeur Helen est très belle, mais Maud Martha a pour elle son intelligence. Elle mise sur ses qualités pour réussir. « Ce qu'elle voulait, c'était offrir au monde une bonne Maud Martha. Telle était l'offrande, la parcelle d'art, qui ne pouvait venir de nulle autre que d'elle-même. Elle allait perfectionner et peaufiner cela. » L'enfance et l'adolescence se passent. Les rêves se font moins brillants, mais pas l'ambition de Maud Martha. « Elle avait dix-huit ans et le monde attendait. de pouvoir la caresser. » Puis surviennent le mariage et la maternité : la vie se fait modeste, parfois médiocre. de monotonie en espoirs déçus, le roman explore ce qu'il en est d'être une femme noire dans l'Amérique des années 1940.

Très largement inspirés de l'existence de l'autrice, les 34 chapitres de ce roman sont autant de portraits, pris à des moments très précis, d'une femme qui découvre qui elle est et comment le monde la voit. Les désillusions sont douloureuses et la colère est puissante face à l'insidieuse violence raciale qui règne en Amérique. Gwendolyn Brooks est avant tout poétesse : ce texte est son unique roman, et c'est une oeuvre majeure du féminisme noir.
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Maud Martha de Gwendolyn Brooks
Maud Marta est une femme noire qu'on rencontre dès son enfance avec des chapitre très courts qui représentent des fragments de sa vie. On l'accompagne jusqu'à l'âge adulte en passant par son premier béguin, sa vie d'épouse, sa relation ambiguë avec un époux auprès duquel elle ne se sent parfois pas à la hauteur et qu'elle méprise parfois, son accouchement, son travail, sa relation avec sa fille.
La construction et le ton sont originaux. Les chapitres sont très courts mais très évocateurs sur une période, un événement bien ciblé. Les textes sont à la troisième personne mais c'est très introspectif. Ce sont les fragments de vie d'une femme pleine de sensibilité qui nous sont livrés sous une forme poétique et vibrante. C'est sa vie en tant que femme noire, victime de ségrégation, qui doit savoir se débrouiller avec peu mais pas résignée à s'effacer. Malgré sa discrétion et son calme, on devine une femme droite dans ses bottes et ses ambitions. Un texte empreint de douceur grâce à l'héroïne avec un style très délicat mais marqué aussi par l'amertume, l'insatisfaction et la lutte.
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Le roman « Maud Martha » (1953), de l'écrivaine américaine Gwendolyn Brooks, se présente au lecteur comme une série de tableaux de vie relatant l'existence d'une femme noire de Chicago, issue de la classe ouvrière, durant les années 1940.

Dans ce récit écrit à la troisième personne, la plume de l'autrice, profondément marquée par la forme poétique, se déploie dans une écriture fragmentaire, instantanée et elliptique.

Des pissenlits qu'elle contemple avec émotion durant son enfance, à l'appartement minuscule qu'elle occupe à l'âge adulte, en passant par les vicissitudes inhérentes à la vie conjugale patriarcale, le racisme ordinaire, insidieux, fourbe, faussement dissimulé, s'insinue partout, tout le temps. En toutes circonstances, on s'efforce de n'incommoder personne, de se faire discret, d'être invisible. de ne pas exister.

Dans cette société américaine, qu'elles se trouvent dans les journaux, les rues, ou les boutiques de mode, les normes de la beauté blanche sont hégémoniques. Ces représentations omniprésentes contribuent à distiller dans le coeur de Maud la détestation d'elle-même, un sentiment dont elle n'arrivera pas véritablement à se départir.

En filigrane, c'est également l'existence de toutes ces femmes, subissant de fortes injonctions de genre, qui est mise en lumière. Aucune fioriture stylistique chez Gwendolyn Brooks, les faits se suffisent à eux-mêmes pour dépeindre cette réalité. Les femmes qui commettent des « péchés domestiques » subissent l'opprobre : celles qui ne balaient pas, ne repassent pas, ne cuisinent pas, et qui a contrario, se priorisent. Et puis il y a aussi celles qui accouchent avec difficulté chez elles, seules, et qui n'émeuvent personne.

J'ai adoré ce roman, tout aussi limpide qu'incisif ! Une pépite méconnue.
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