Janvier 1981, l'auteur perd sa mère, décédée en maison de retraite, au terme d'années de maladie de Parkinson pendant lesquelles il n'a pas voulu la voir se dégrader. Il n'ira pas davantage voir sa dépouille, ni à la cérémonie funéraire...comme il l'avait annoncé 35 ans plus tôt, lorsqu'il avait 5 ans...
Cet événement est prétexte à se remémorer et témoigner des moments terribles de leur passé commun, une mère et son fils, prisonniers pendant 2 ans à l'approche de la fin de la seconde guerre mondiale dans le camp japonais de Tjideng, en Indonésie néerlandaise.
Dans les yeux d'enfant du petit Jeroen, la conscience du bien et du mal n'est pas encore complètement formée, les apparences l'emportent, les "Japs" peuvent ainsi être drôles, presque beaux dans leurs uniformes militaires et leur magnifique drapeau national, et sa mère apparaître comme une étrangère dont on ne veut plus comme maman lorsqu'elle gît à terre humiliée et rouée de coup par les geôliers...
Mais en ce moment présent grave, les souvenirs remontent de ces années de camp sous un autre jour : cette mère admirable, exemplaire, toujours rieuse et digne dans la souffrance, protectrice pour son enfant, la cruauté et le sadisme inouïs du commandant Kenitji Sone, qui sera fusillé en 1946 pour crimes de guerre, et de ses hommes...
Des images reviennent sans cesse : ces prisonnières, même les plus âgées, obligées de faire les grenouilles en sautant et coassant...la faim lorsqu'il faut compter les grains de riz et l'eau...et ces véhicules de la Croix Rouge arrivant dans les derniers jours de guerre pour livrer une profusion de denrées alimentaires...aussitôt brûlées, sous les yeux des prisonniers affamés, par les japonais vaincus mais jusqu'au-boutistes...
On sent l'auteur écorché, traumatisé par ce vécu, et pourtant il étouffe cette émotion par une forme d'indifférence à sa propre vie, et surtout en sublimant l'image de courage et d'exemplarité de sa mère, qui devient à jamais une icône inaltérable, figée et auréolée dans sa gloire.
Beaucoup d'émotion dans ce récit autobiographique...témoignage magnifique sur la réalité des camps de concentration, et spécialement sur la terrible culpabilité des japonais dans les horreurs fascistes de la seconde guerre mondiale...mais aussi sur l'amour pudique et les relations complexes entre un homme et sa mère...
Une belle découverte d'un auteur chevronné malheureusement peu traduit en France.
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Brouwers livre ici un des trois volets de son autobiographie. Nul besoin de lire les trois, les oeuvres restent liées dans la cohérence du vécu mais indépendantes. C'est un bijoux d'un point de vu littéraire. le texte est ciselé, incisif, naif et se raconte à travers le style d'un écrivain aguerri et celui de ses régressions enfantines. Équilibre captivant pour le lecteur qui face à la densité du vécu à parfois besoin de souffler! La mise à nu de cet auteur torturé permet de mieux le cerner...
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Sans l'insistance des amies de mon groupe lecture, je serais passé à côté de ce bouleversant témoignage.
L'auteur raconte l'horreur d'un camp de concentration tenu par les Japonais lors de la dernière guerre mondiale.
Ce poignant récit propose une réflexion approfondie sur le bien et le mal, tels que perçus par un enfant soumis à l'enfermement et témoin des tortures pratiquées sous ses yeux, puis tels que ressentis à l'âge adulte.
C'est enfin un magnifique hommage à sa mère qui a partagé, avec ses deux enfants, des années d'épreuve, de douleur et de courage.
Coïncidence, j'ai été particulièrement sensible à ce livre lu le jour de la Fête des Mères.
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Ce livre a été une sacré claque pour moi. Il est rude, âpre mais tellement captivant. L'auteur, à l'annonce de la mort de sa mère, décide de se plonger dans les souvenirs. Derrière une apparente indifférence se cache tout le mal être d'un homme qui, petit garçon, a subi les horreurs de la guerre dans un camp de concentration japonais. le récit des moments dans le camp est effroyable de vérité et le récit de la vie actuelle de l'auteur nous montre toute la difficulté de "survivre" à de telles atrocités! Un témoignage poignant, saisissant...
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J'ai terminé le livre de Brouwers et la force de cette tentative de "reconstruction" (horrible mot auquel je n'arrive pas à trouver un équivalent) qui ne se dit pas, m'a tenue sous son emprise. Lu après la représentation du spectacle que a tiré Guy Cassiers. le montage était bien fait, sabrant dans les horreurs du camp, mais en gardant de longs passages qui permettent de penser saisir l'origine du sentiment de culpabilité de l'enfant de cinq ans qui avait ri en voyant les femmes battues, humiliées.. (un collier et une laisse qui nous rappellent des souvenirs récents), l'impossibilité de supporter les êtres aimés dont il a vu la souffrance - resserrant l'histoire d'amour en respectant son importance et son rapport avec l'ensemble - gardant la construction en marqueterie, et l'approfondissement progressif
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Episode méconnu et intéressant sur le plan historique, mais narrateur franchement antipathique...
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Un hommage a une mere double d'une description realiste et donc terrible des camps de la seconde guerre mondiale,le tout en cent cinquante pages: Voici l'exploit realise par l'auteur dans ce court ouvrage tres realiste,dur mais qui a la force du temoignage.
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Ecrivain à la fois pudique et entier, une écriture très agréable et des métaphores délicieuses. Se lit dans la journée. On en sort remué.
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