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Critique de SBys


SBys
26 décembre 2018
Henry, Hank, Chinaski, peu importe le nom qu'on lui donne, on le reconnait entre mille ce vieux Bukowski, même au bout de la route, il ne lâche jamais l'affaire. Même célèbre, il a toujours les yeux vitreux, qui scintillent, à cause de l'alcool et de son air vicieux. Dans le ragoût du septuagénaire, le lecteur revoit tout ce qu'il a déjà vu. Plus tendre disent certains, le ragoût a longtemps mijoté, il est moins saignant, ça s'est sûr. Il y a même une ou deux nouvelle (par exemple, une journée) où Buko se prend d'empathie pour ses personnages, à tel point qu'on a le sentiment de lire Carver. Mais pour la plus grande partie, on retrouve la même rengaine, avec les mêmes vieux thèmes qu'on lui connait : les courses, le vin, les bistrots, la solitude, les femmes. Il y a quelques nouvelles qui m'ont rappelé Souvenirs d'un pas grand-chose, dans une autre, j'ai retrouvé une scène semblable à Hollywood, une rencontre dans une banlieue paumée, et une autre encore, Une nuit en ville, j'me demande même si je ne l'ai pas déjà lue à quelque part, dans l'un de ses contes.

La question que je me pose, après cette lecture, et toutes les autres, c'est pourquoi j'aime tant ce vieux dégueulasse. Pourquoi je le suis depuis sa tendre enfance, lorsqu'il se faisait taper dessus par son père, pour un gazon mal coupé, et encore lorsqu'il devienne célèbre, avec sa BMW, et qu'on le paye pour ses lectures et pour adapter ses nouvelles au cinéma ? Pourquoi l'avoir suivi comme postier, ou dans ses longues journées au champ de course, au ring de boxe, et à la toute fin au stade de baseball ? Dans son attachement pour Céline, Hemingway, Fante, et Sherhood Anderson et que dire de toutes ses histoires de femmes, d'alcool, d'écrivains célèbres, et j'en passe.

Il y a le style, court, décapant, que l'essentiel. L'humour. le je-m'en foutiste. Ses obsessions. C'est certainement un tout, un bon dosage, mais il a quelque chose d'autre. C'est difficile à bien cerner, mais il a surement son manque d'ambition et sa capacité à encaisser, jamais s'esquiver. On le sait, même si la vie ne l'a pas épargné, il n'a jamais eu l'idée de faire payer quelqu'un d'autre à sa place. Une sorte de dignité dans la dèche.

Bukowski, c'est le boxer qui encaisse, ne frappe jamais très fort, mais qui aime bien se moquer de son adversaire, lui lancer quelques insultes, jusqu'à parvenir à semer le doute dans son esprit. Après avoir été quelques fois mis au tapis, il se relève encore, et n'abandonne jamais. Il tient les 10 ou 12 rounds contre des bien plus costauds que lui. Il n'a pas peur.

Si Bukowski était un pur sang alors, avant même d'entrer dans le stalle, il aurait été celui qui chercherait à mordre, qui aurait agité la tête, le sang dans les yeux. Il commencerait la course avec un trot qui ne donnerait pas confiance pour celui qui aurait mis 2€ sur sa tête. Il serait effacé. À l'intérieur, pour s'économiser. C'est seulement à la fin du premier mile que l'on remarquerait son allure. Gracieux, léger. Les autres auraient l'air de faire du surplace, d'être arrêtés. À l'arrivée, le cheval-Bukowski serait toujours derrière (ce n'est pas un cheval gagnant ! ), mais il continuerait à courir, encore plus vite, sur le deuxième tour, lorsque ça ne compte plus, pour nous faire comprendre que toutes ses règles sont arbitraires.
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