Bernard Werber l'avait déjà imaginé dans son « papillon des étoiles », le film « Passenger » (Morten Tyldum, 2016) évoque la même chose : notre planète étant condamnée, du moins notre possibilité de pouvoir y vivre, l'idée est de partir ailleurs voir si l'herbe y est plus verte.
Avant toute chose, je tiens à souligner que cette vue des choses est typiquement américaine. Sans chercher à résoudre les problèmes sur cette planète, le plus simple est d'aller coloniser un monde vierge… ou prétendu tel. C'est après tout leur propre histoire. Des émigrants européens, chassés de chez eux, qui conquièrent un « nouveau monde » sans se soucier de débarquer dans un monde déjà habité et en oubliant, deux cents ans plus tard en érigeant un mur à la frontière mexicaine, qu'eux-mêmes ont été des émigrés.
Passé ce postulat de départ, il faut reconnaître que le livre de
Sue Burke est résolument dans l'air du temps. Car, sur cette nouvelle planète (Pax – paix), les colons entendent bien ne pas refaire les erreurs des terriens. C'est oublier que, si le monde est neuf (mais pas si différent du notre et pour cause : les conditions de vie pour l'humain doivent être présentes et cela fait étrangement ressembler la planète à notre bonne vieille Terre), eux ne le sont pas. Leur Adn est bien 100% humaine et les comportements qui en découlent aussi.
En Nouvelle Zélande, depuis quelques années, certaines rivières possèdent un droit pénal, comme n'importe quel citoyen. Ainsi, elles peuvent porter plainte devant un tribunal pour outrage (pollution, assèchement, détournement, etc). Dans
Semiosis, ce sont les arbres, notamment une espèce de bambou arc-en-ciel, qui deviennent les égaux des humains. On assiste durant toute l'histoire à une symbiose recherchée entre l'animal et le végétal. En ce sens,
Semiosis est un véritable roman écologique d'anticipation.
Seule ombre au tableau : à trop vouloir expliquer, décrire, décortiquer les sentiments (des plantes et des humains),
Sue Burke abandonne l'intrigue. Il n'y a pas plus d'histoire, de « scénario » que dans le premier blockbuster hollywoodien venu. Et cela rend la lecture moins palpitante. Cependant, vous constaterez lors de votre prochaine balade en forêt que votre regard sur les grands arbres aura changé.