Belinda Cannone est admirablement talentueuse dans l'exploration et la description du sensible comme de l'abstrait. Jamais je n'oublierai ma première rencontre avec ses textes, par son essai sur
le Sentiment d'imposture. Qu'est-ce que
s'émerveiller ? Pourquoi est-ce important dans ces temps troubles ? Comment atteindre l'émerveillement ? Qu'est-ce qui le distingue du sublime ? Et du sentiment océanique ? Et de l'éblouissement ? Quels sont ses rapports avec l'instant, avec l'amour, avec l'humain ?
Tout au long de cette lecture, une image (d'émerveillement?) m'est revenue obstinément : celle des anneaux concentriques et centrifuges provoqués par la chute d'un objet dans une nappe d'eau. Ainsi procède le discours descriptif de l'essai, du noyau de l'émerveillement – et des conditions subjectives nécessaires pour y accéder – jusqu'à la périphérie du concept et de ses instances plus spécifiques – ou plus éventuelles. Néanmoins, je maintiens aussi l'aspect ondulatoire de ma métaphore, en ceci que certains éléments de l'émerveillement – et de ses circonstances – sont répétés comme un thème musical récurrent : la concentration, la lenteur, la nature, la « surprésence », le partage, la modestie de l'objet...
Les références littéraires (et musicales) sont relativement peu nombreuses dans cet ouvrage, à ma surprise et non sans regret ; cependant, je me suis arrêté (bien entendu) sur les implications langagières et particulièrement poétiques de l'émerveillement (comme le dénoncent mes cit.). La raison de cette rareté est peut-être la prégnance du côté visuel du travail, qui est né d'une collaboration avec l'Association régionale pour la diffusion de l'image (ARDI), remarquable lieu de collection-archives de photographies même très anciennes : l'auteure a choisi et commenté une photo à la fin de chaque chapitre, laquelle illustre parfaitement ses propos. Il faut dire qu'elles sont, même en soi, splendides.
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