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Critique de sebastientalvas


Utopie radicale est un un essai de 160 pages qui se penche sur l'évolution des imaginaires. Son autrice, Alice Carabédian, est docteure en philosophie politique. Sa thèse s'est penchée sur Ian Banks et son cycle de la Culture. Elle montre que la science-fiction permet de saisir, de comprendre notre monde avant de le changer. La science-fiction permet d'ouvrir des perspectives pour comprendre et modifier notre monde, même dans des imaginaires très éloignés de notre réalité.

L'utopie - non lieu et bon lieu en grec - cache de nombreuses réalités. C'est un terme forgé par Thomas More il y a plus de 500 ans . L'autrice essaye de redonner à ce terme une force en utilisant l'imaginaire. L'utopie peut être forte tout en restant dans la fiction. Par la narration, la science-fiction donne à l'utopie sa force. Or, il est plus difficile de trouver aujourd'hui des textes montrant des types d'utopie.

En effet, elle parle également beaucoup de sa soeur jumelle, la dystopie. Cette dernière est pregnante dans les imaginaires, d'autant plus qu'elle a rejoint notre réalité. La science-fiction est politique et dépeint plus facilement des mondes mauvais, pires que le nôtre. Les univers dystopiques semblent plus attirants. On y rencontre des personnages en révolte auxquels on peut plus facilement d'identifier, comme dans 1984 ou le Meilleur des Mondes. Or, Alice Carabedian veut montrer que les imaginaires présentant des utopies peuvent être tout aussi attractifs, à l'image des mondes imaginés par Ursula le Guin ou Ian Banks. L'utopie peut montrer d'autres mondes éloignés de la dystopie concoctée depuis des décennies par l'ultra-libéralisme thatchérien et reaganien et par leur rejeton immonde qui gouverne actuellement la France.

L'idéologie capitaliste a besoin d'être contrecarré et combattu, et que mieux que la science-fiction pour réfléchir à de nouvelles alternatives. L'essai d'Alice Carabédian nous montre que le combat n'est pas perdu d'avance, malgré le discours ambiant développé même par des oeuvres pourtant intéressantes au premier regard comme Interstellar. On y trouve le récit d'un monde où on a détruit la Terre et où on recherche une planète B pour y faire les même erreurs. A aucun moment n'est dénoncé les causes de cette destruction. On a l'image d'une humanité prédatrice comme les aliens d'Independance day. le rêve des étoiles peut être envisagé d'une autre façon comme Becky Chambers dans Apprendre, si par bonheur. Pour l'autrice, l'utopie permet une rencontre avec l'autre, sans volonté de détruire et de coloniser. Elle prend comme modèle le film Premier contact. On peut également citer L'espace d'un an, également de Becky Chambers qui montre non un monde utopique, mais un vaisseau où différentes races d'aliens se côtoient pour un même objectif pacifique dans une ambiance foutraque.

On est dans une société où la réalité rejoint la fiction. le post-apocalyptique devient crédible. Certains lecteurs cherchent dans la science-fiction des moyens de survivre à notre monde. Or, les grands récits de science-fiction proposent des univers nous permettant d'agir dans notre vie quotidienne. On peut déplorer qu'il y ait un conformisme pour montrer des mondes à la Mad max. Or, on peut inventer d'autres univers. L'autrice permet de faire un pas de côté et de réfléchir sur le devenir de l'humanité et sur l'essence de la science-fiction, c'est-à-dire faire politique. Pour elle, on peut sortir des imaginaires montrant des avenirs où la loi du plus fort est la norme. La science-fiction doit permettre d'imaginer d'autres avenirs. Ainsi, pour l'autrice, Ian Banks permet d'aller loin dans l'imagination car à partir d'un genre stéréotypé, le space- opera, il image un univers engagé politiquement. Et en plus, son cycle est emprunt d'humour. Pour elle, le cycle de la Culture est l'exemple même de l'utopie radicale.

Pour Alice Carabédian, se dire aujourd'hui utopiste est railler. Vouloir changer le monde est devenu radical. Pour elle, il y a un besoin urgent de produire des imaginaires proposant autre chose que des dystopies, des visions apocalyptiques... Ces dernières produisent chez les lecteurs des angoisses.

Un bémol, j'aurais aimé avoir plus de références notamment littéraires et d'analyses justement cinématographiques. Il existe aujourd'hui un courant littéraire qui recherche à proposer des utopies radicales. Il aurait été bon de les citer plus explicitement.


Un autre ouvrage de référence: Dans les imaginaires du futur : entre fins du monde, IA, virus et exploration spatiale, d'Ariel Kyrou, Éditions ActuSF, 2020
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