Hélène Collon, c'est LA traductrice de Philippe K.Dick, qui vient d'achever la nouvelle traduction d'Ubik paru aux Éditions J'ai Lu dans la collection « Nouveaux Millénaires ».
Hélène Collon est avant tout une grande lectrice qui porte haut les couleurs de la science-fiction avec l'imagination comme horizon.Embarquement immédiat pour un cours magistral de SF !
NB :
Hélène Collon a reçu le grand prix de l'imaginaire de la meilleure traduction en 1994 pour
L'Homme des jeux de
Iain Banks.Elle a également été lectrice à de nombreuses reprises pour le Centre national du livre, qui se fie à son regard acéré.
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Alors le jeu est truqué. Qu'es-ce qui ne l'est pas ? Le triomphe de l'intellect. La démonstration du talent. La sensibilité humaine.
Enfin, vous pouvez leur parler des callosités qui se forment sans ampoules, ce genre de choses. Ce n’est pas cela qui compte, bien entendu. Mais une chose aussi sommaire que la réorganisation de vos organes génitaux provoquerait une véritable révolution s’ils venaient à l’apprendre.
« Vraiment ? » fit Gurgeh.
Cette cinglée a eu de la chance de s’en tirer avec une expulsion ; si elle avait été d’ici, ils lui auraient collé des sangsues corrosives dans tous les orifices avant que la porte de la prison ne se referme sur elle. Rien que d’y penser, je ne peux pas m’empêcher de serrer les jambes.
Les lois n’existent que par le plaisir que nous prenons à commettre ce qu’elles interdisent.
On avait alors torturé l’homme d’une manière à la fois sauvage et routinière

« Non, la vie n’est pas juste. Pas intrinsèquement. » (…)
« Mais on peut s’efforcer de la rendre juste, reprit Gurgeh. C’est un but qu’on peut se fixer. On peut choisir de tendre vers lui, ou bien s’en détourner. Nous avons opté pour la première solution. Je regrette que vous nous trouviez si répugnants pour cela.
« Le mot ’’répugnant’’ est faible pour décrire ce que je ressens à l’égard de votre précieuse Culture, Gurgeh. Je ne suis même pas sûr de disposer des termes adéquats pour vous dire ce que j’en pense, de cette… Culture. Vous ne connaissez ni la gloire, ni la fierté, ni la notion de culte. Vous détenez un certain pouvoir, je l’ai constaté. Je sais ce dont vous êtes capables… Mais vous n’en restez pas moins des impuissants. Et vous le serez toujours. Les êtres humbles, pitoyables, apeurés, lâches… ceux-là ne durent pas éternellement, aussi terribles et imposantes que soient les machines à l’intérieur desquelles ils rampent. Un jour viendra où vous vous effondrerez ; et ce n’est pas votre batterie d’engins flamboyants qui vous sauvera. Ce sont les forts qui survivent. Voilà ce que nous enseigne la vie, Gurgeh, voilà ce que nous montre le jeu. La lutte pour la suprématie, le combat qui révèle la valeur. » (…)
Que répondre à cet apical ? (…) Que l’intelligence pouvait surpasser la force aveugle de l’évolution et sa tendance à mettre l’accent sur la mutation, la lutte et la mort ? Que la coopération consciente était plus efficace que la compétition sauvage ? Que l’Azad pouvait être tout autre chose qu’un simple combat, si l’on s’en servait pour structurer, communiquer, définir… ? (…)
« Vous n’avez pas gagné, Gurgeh, reprit Nicosar d’une voix basse mais dure, presque un croassement ? Les individus dans votre genre ne gagneront jamais. (…) Vous jouez, mais vous ne comprenez rien à rien, n’est-ce pas? »
Mieux je réussis et plus ma situation empire, puisque j'ai d'autant plus à perdre.
Pourtant, on a passé des moments formidables !
On s’est saoulés, drogués, on s’est… enfin, l’un de nous deux s’est envoyé en
l’air, et vous, vous n’en êtes pas passé loin… On s’est bagarrés et on a
gagné, nom de nom ! Et là-dessus, on a réussi à s’enfuir… Bordel de
merde, mais qu’est-ce qu’il vous faut de plus ?
Ces humains ! Comment pouvait-on donner le nom de vie à une lenteur aussi glacée ? Une éternité pouvait s’écouler, des empires virtuels naître et mourir dans le seul temps qu’il leur fallait pour ouvrir la bouche afin de proférer quelque nouvelle ânerie !
« Vous allez absorber leurs mets et leurs boissons, et il y a chez eux de fameux chimistes et exobiologistes. Tandis que si vous portez une de ces bagues à chaque main – de préférence à l'index –, vous serez normalement protégé contre les tentatives d'empoisonnement. Si vous ressentez un unique élancement, c'est qu'il s'agit d'une drogue non mortelle, par exemple un hallucinogène ; trois élancements, c'est qu'on tente de se débarrasser de vous.
— Que signifient deux élancements ?
— Je n'en sais rien ! Sans doute une panne. Alors, vous les mettez ?
— Elles ne me vont vraiment pas.
— Et un linceul ? Ça vous irait un linceul ? »