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Critiques filtrées sur 4 étoiles  
Agée de 15 ans, Ana vit seule avec sa mère à Sao Paulo, quand celle-ci meurt brutalement. La vie de cette adolescente introvertie bascule alors à tous points de vue. Son père la récupère et l'emmène sur son lieu de travail un peu particulier : un terrain de fouilles archéologiques situé dans le Xingu, dans l'Etat du Mato Grosso en pleine Amazonie brésilienne. Sa mission consiste à chercher, dans cette région de terre noire*, des traces de présence humaine antérieure à l'arrivée des Blancs.

Hébergée avec son père dans une tribu indienne, Ana en découvre la vie, les rites et coutumes, les rapports humains et ceux avec la nature. Dans ce contexte, la jeune fille blanche apparaît évidemment étrange et maladroite, mais elle s'y sent mieux acceptée que dans son école à la ville.

Le séjour d'Ana dans le Xingu sera bref, mais suffisant pour la marquer à vie. Elle y retournera d'ailleurs une quinzaine d'années plus tard, alors qu'elle est étudiante à Paris. Elle découvrira que les choses ont bien changé : la forêt brûle, il n'y a plus de poissons dans les rivières dont l'eau est détournée pour drainer l'agriculture intensive, le tourisme tend à devenir massif et le territoire et les droits des Indiens de plus en plus étriqués.

« Terre noire » est un roman d'apprentissages multiples pour Ana, qui doit apprendre le deuil, à vivre sans sa mère et avec son père dans un environnement totalement inconnu et différent, à ces moments critiques que sont l'adolescence et l'éveil des sens. Ce séjour en Amazonie s'avère littéralement un rite de passage à l'âge adulte.

Alternant constamment entre passé et présent, première et troisième personnes du singulier, ce texte nous immerge, à travers les yeux d'Ana, dans la vie d'une tribu amazonienne, avec un naturel confondant, sans la moindre trace d'exotisme ou de condescendance post-coloniale. L'auteure sait manifestement de quoi elle parle (avec un amour profond) quand elle décrit cet univers de rites ancestraux, riche en mythes et qui sait depuis toujours comment vivre en accord avec le vivant non humain. Sans pour autant pousser jusqu'au pamphlet, elle laisse aussi transparaître tout son ressentiment quant à la déforestation, les expropriations, la pollution,..., bref tous les dégâts causés par cette « civilisation » particulièrement ravageuse qui est celle des Blancs avides d'argent et de pouvoir.

Un premier roman sensible, qui parle avec beaucoup de justesse du deuil, de la transmission, et des bouleversements, tant ceux du corps et de l'intime, que ceux de la société indienne et de la nature, pour le meilleur et pour le pire.

*terre noire (terra preta en portugais) : type de sol de la forêt amazonienne, créé par l'activité humaine depuis l'époque précolombienne, et très fertile en raison de la présence notamment de charbon de bois, de matière organique, de nutriments, de tessons de poterie (source : Wikipédia).

En partenariat avec les Editions Métailié.
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C'est un livre où il est question de colibris qui parlent et de jeunes femmes qui séduisent les caïmans. Entre autres choses, mais Terre noire raconte d'abord une vision du monde, celle du peuple Xingu, au coeur de l'Amazonie, en se débarrassant vite de tout exotisme pour comprendre et s'immerger dans un univers aux rites ancestraux, en accord avec la nature et les animaux. Nous suivons les pas d'une adolescente, en deuil de sa mère, qui bien que venue de ce que l'on appelle la "civilisation" va apprendre au contact de ses hôtes et découvrir une riche culture dans laquelle les légendes tiennent une place majeure. Terre noire est un roman d'apprentissage pas comme les autres, dont les meilleures pages sont celles consacrées à la vie en Amazonie, l'autrice insérant d'autres chapitres, moins captivants, de l'existence de son héroïne, avant la disparition de sa mère et dans le futur, avec ses études à Paris, insatisfaisantes, qui ne peuvent que lui donner l'envie de revenir aux sources de son épanouissement. C'est évidemment aussi un livre qui dit la difficulté de survie des tribus indigènes face au tourisme, à la déforestation, au racisme et à la pollution mais Terre noire n'est pas un manifeste écologique pur et dur, c'est avant tout un roman où le réalisme poétique s'invite, avec générosité et une certaine grâce. le livre est une réussite parce qu'il parle d'un lieu et d'une population que Rita Carelli connaît parfaitement, depuis son plus jeune âge. Réalisatrice, actrice et autrice de livres pour la jeunesse, elle témoigne dans Terre noire de son amour pour un territoire, des gens et un mode de vie de plus en menacés.

Un grand merci aux éditions Métailié et à NetGalley.
Lien : https://cinephile-m-etait-co..
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Voici un roman envoûtant qui nous emmène dans le sud de l'Amazonie brésilienne, dans la réserve indienne de Xingu.
Divisé en trois parties, il demande un peu de concentration, juste le temps de s'habituer avec la construction du récit où le passé et le présent s'alternent et où on découvre les aventures du personnage principal, toujours en alternance, à la première et à la troisième personne.
'Terre noire' est un roman d'apprentissage qui parle de deuil, d'identité, de coutumes ancestrales, de rites et légendes, de mélange culturel...
Les chapitres sont courts et la lecture avance sans difficulté.
C'est un premier roman riche et réussi que je conseille vivement.

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La rentrée chez les Editions Métailié est décidément bien brésilienne, et résolument féminine ! Cette fois-ci, le texte nous vient d'une autrice, Rita Carelli. Il s'agit de son premier roman en revanche elle exerce déjà ses talents d'écrivaine en tant que plume officielle d'un homme politique indien et dans la littérature jeunesse. C'est par ce dernier biais d'ailleurs qu'elle s'est d'abord consacrée à l'Amazonie et ses groupes ethniques, sujet au coeur de ce roman. Terre noire se réfère en effet à la terre fertile que l'on trouve en Amazonie sur les terres indigènes, des terres très riches, mais également pures, exemptes de toute pollution urbaine.


C'est l'histoire d'Ana, fille de parents séparés, qui vit avec sa mère à São Paulo. Lorsque cette dernière décède brutalement, son père archéologue vient récupérer sa fille pour l'emmener là où il vit et travaille, au milieu d'une tribu indigène dans le Xingu. le parc indigène du Xingu se situe dans le nord-est de l'État du Mato Grosso, dans le sud de l'Amazonie brésilienne. En alternance avec ces chapitres qui se concentrent sur la nouvelle de l'adolescente, on retrouve une Ana plus vieille d'une quinzaine d'années qui vit à Paris dans un minuscule studio, au beau milieu d'une préparation de thèse, avec un petit ami insignifiant. La vie de la jeune Ana de quinze ans, trimballée comme une valise avec un père qu'elle connaît à peine, va changer du tout au tout, avec cette mère morte remplacée par un père qui naît à peine dans son rôle de géniteur et au beau milieu de la forêt, loin du confort, des us et coutumes de la vie urbaine. Ana va devenir Anakinalo, nouvelle venue vite adoptée par cette grande famille tribale, où le chef et son père se considèrent comme frères, où elle s'initie peu à peu à la vie tribale.

Cette vie en Amazonie ne semble avoir été qu'un épisode transitoire de sa vie puisqu'on la retrouve plus tard en France. Mais c'est une Ana empreinte d'une autre maturité, qui s'est totalement fondue dans la culture, qui la respecte et l'étudie, et qui lui a appris à voir la vie autrement que par les yeux de la citadine qu'elle était. Pour cela, il a fallu se dénuer des a priori, de ses repères et apprendre, d'abord à dormir dans un hamac. Cela veut dire, vivre dans le milieu qui est devenu le sien, en cohésion avec sa faune et sa flore : et là, c'est l'occasion de critiques envers l'action gouvernementale dévastatrice et xénophobe qui tend à vouloir tout détruire dans sa détestation des peuples indigènes. de la vénalité de ces mêmes gens qui convoitent avec avidité ces terres fertiles, Terra preta ou Terra preta do índio, qui sont étudiées par les archéologues du monde entier, et par le père d'Ana en premier lieu.

C'est l'apprivoisement du deuil pour cette jeune fille qui vit avec ses premières menstruations, et l'apprentissage d'une nouvelle forme de vie en contact direct avec le sol, la forêt, l'eau et leurs populations animales. Tout le contraire de ce que proposent la vie urbaine, et ses politiques, chacun planqué chez soi ou dans son bureau cherchant à trouver la meilleure façon pour accroître ses biens. Une forme de vie dépouillée, aux valeurs familiales et claniques fortes, profondément attachée à la terre qui l'accueille et la nourrit, à une vie spirituelle où les anciens, les défunts, les esprits sont loués, à une vie spirituelle forte, loin du matérialisme des centres urbains. Et cette terre noire, qui naît de la coexistence symbiotique des indigènes avec la forêt, semble prouver le bon fonctionnement de leur mode de vie, le seul qui ne détruit et ne pollue pas tout, mais au contraire produire un sol d'une richesse inégalée.

Ce roman s'inspire aussi de la vie personnelle de Rita Carelli , qui elle-même a passé une partie de son enfance au sein de populations tribales, sa mère exerçant la profession d'anthropologue, son père celle de cinéaste. C'est avec son expérience personnelle que ces personnages indigènes ont été créés, mais elle sert également surtout de biais de transmission de la cosmologie de ces peuples, de leur vie rituelle, collective. C'est une oeuvre de transmission aussi, celle de sa passion pour ces indigènes qui n'ont pas forcément la présence dans la littérature qu'elle peut avoir, de son expérience, de leur savoir. Une transmission qu'elle transcrit également à travers cette relation du père et de la fille, qui a vraiment pu se concrétiser au sein de leur vie tribale, celle qui a la force de maintenir ces liens indéboulonnables entre membres, entre les membres et individus extérieurs qui s'inscrivent dans leur giron. En témoigne la relation fraternelle du chef et de son père, que rien ne réunit à part leur statut d'humanité.

Si l'on reprend le titre en portugais Terrapreta, il s'agit de l'unification tout à fait personnelle de l'autrice de deux termes Terra preta, une terre où elle a voulu nous emmener, pour peut-être repenser une autre forme d'être au monde, dans cette période où l'on s'aperçoit qu'il faut repenser à sa façon de consommer, repenser une autre façon d'exister envers soi-même, envers l'autre. L'autrice a une phrase qui conclue parfaitement cette lecture : je ne pense humblement pas que ce soit la littérature qui va changer le monde, mais elle plante ses graines.
Lien : https://tempsdelectureblog.w..
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