AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet

4.09/5 (sur 28 notes)

Nationalité : Brésil
Né(e) à : Sao Paulo , 1984
Biographie :

Réalisatrice de cinéma et actrice, elle a fait des études de lettres et de théâtre à Paris.
Elle est auteur de livres pour la jeunesse sur l'Amazonie.

Ajouter des informations
Bibliographie de Rita Carelli   (1)Voir plus

étiquettes
Videos et interviews (1) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de

Terre noire


Citations et extraits (13) Voir plus Ajouter une citation
Dans chaque maison vivent plusieurs cellules familiales qui font partie d’une plus grande famille. Dans le village, il y a près de cinq cents personnes réparties dans quatorze grandes malocas. L’homme, s’il n’a pas d’autre épouse lorsqu’il se marie, vit chez ses beaux-parents les premières années du mariage et travaille pour eux . Ici, m’a expliqué mon père, ce ne sont pas les parents de la mariée qui paient la dot de leur fille, comme on le lit dans les vieux livres, mais le mari qui paie pour recevoir une épouse, en plantant un verger pour ses parents - ce qui a nettement plus de sens.
Commenter  J’apprécie          80
Pour Ana, l’idée de se marier et d’avoir des enfants était une notion vague, un horizon qui ne la concernait pas, alors que pour Kassuri tout ça était déjà très concret. Là-bas, dès que les filles ont leurs règles, elles sont conduites par la société à la vie adulte, qu’elles aient quatorze, treize ou douze ans. Ce sont des femmes fécondes, elles peuvent concevoir ; elles sont biologiquement prêtes, donc la famille les prépare culturellement et psychologiquement. Les jeux d’enfants sont mis de côté, le temps de l’enfance est révolu - d’un coup.
Commenter  J’apprécie          30
Il n'y a que dans le noir, dans le noir absolu, qu'on peut se baigner à la lumière des étoiles.
Commenter  J’apprécie          140
- Pffff! Je ne comprends pas comment le gouvernement brésilien a pu donner tellement de terres à si peu d'Indiens... Qui pour couronner le tout ne savent même pas s'en servir!
Toujours cette colère contre les Indiens. Plus grande peut-être, avec les médias qui, quand ils parlent d'eux, du nord au sud du pays, les traitent d'envahisseurs, de bons à rien. Une campagne de diffamation ostentatoire qui plaide en faveur du front des BBB - pour "Bible, Balle (de plomb), Boeuf" - au Congrès National. Cette vieille incompatibilité entre posséder la terre et lui appartenir, entre vivre pour travailler et travailler pour vivre. Si seulement nous étions capables d'apprendre quelque chose d'eux... Ah, s'ils savaient "utiliser" la terre comme eux! Je devrais peut-être commencer par citer des preuves archéologiques, des siècles d'occupation indienne - et de transformation - intense de l'Amazonie sans la détruire, le taux de fertilité élevé des terres noires qu'ils produisent et leurs très faibles émissions de carbone. Ou citer leurs organisations sociales, qui excluent la pauvreté, ou l'exubérance d'une vie remplie d'art et de sens. Mais je vois à l'air méprisant de mon interlocuteur que son cas est désespéré.
Commenter  J’apprécie          30
Aux confins du territoire, la notion de progrès, ce train déraillé qui file à toute allure vers l’abîme et que l’on poursuit avec une foi aveugle.
Commenter  J’apprécie          30
- Des rhombes?
- Oui, une sorte d'instrument très bruyant. Ils se sont peint le corps au charbon et les ont faits tourner jusqu'au village des femmes. Quand ils sont arrivés, elles n'ont pas supporté le bruit. Tu imagines, un rhombe fabriqué par Soleil? Il paraît que leur vrombissement faisait tomber les cheveux. Elles ont pris peur, abandonné leurs fûtes et ont couru se réfugier dans les maisons. Voilà comment les hommes ont volé les flûtes.
Nous nous sommes assises en silence, à observer le lent fumage du poisson.
- Mais les Hyper-Femmes ont encore des flûtes.. dit Kassuri, malicieuse.
- Les Hyper-Femmes?
Oui, grand-mère, raconte! demande Hayumi.
- Cette petite... elle est au moins aussi curieuse que toi, Ana! rit Padjá. Eh bien, c'était pendant l'initiation des garçons, les hommes avaient décidé d'aller pêcher pour les enfants. Plusieurs jours étaient passés et ils ne revenaient pas. Les femmes attendaient au village. N'en pouvant plus, l'une d'entre elles a demandé à son plus jeune fils d'aller voir ce qui se passait. Il est descendu jusqu'à la plage et a vu que les hommes se transformaient en pécaris, le cochon-bois. Des poils leur poussaient sur le corps et leurs dents étaient devenues énormes. Son père-pécari lui a donné du poisson. Il l'a caché dans sa fûte et l'a apporté à sa mère. En arrivant, il a raconté ce qu'il avait vu.
- Et après, et après? veut savoir Hayumi.
Les femmes ont cuisiné et partagé le poisson à la place des hommes, au centre du village, et ont dit: "Nos maris se transforment en monstres pendant qu'on les attend. Dansons et réjouissons-nous, car nous n en voulons plus."
- Et pendant qu'elles chantaient, elles se sont transformées en Hyper-Femmes, dit Kassuri.
- Oui. Leur clitoris, qu'elles ont fait mordre par des insectes, est devenu énorme, complète Padjá. Elles ont enfilé les coiffes, les boucles d'oreilles, les ceintures, les genouillères et les brassards des hommes. Dans la forêt, quand ils les ont entendues jouer de la flûte, les époux ont décidé de retourner au village. Mais, à leur arrivée, elles les ont attaqués avec des dents de tétra vampire.
Elles ont alors jeté leurs fils encore petits dans les ruisseaux. Ils se sont aussitôt transformés en poissons et elles n'ont gardé que leurs filles. Un jeune garçon s'en est sorti et a été transformé en tatou. Le garçon-tatou a creusé un tunnel sous la terre et les femmes l'ont suivi.
De temps en temps elles sortaient de terre et ensorcelaient d'autres femmes qui les rejoignaient. Elles se sont frottées avec l'écorce du péqui et leur corps s'est retrouvé couvert d'épines. Elles sont allées vivre dans un endroit rien qu’à elles, entouré d’eau de tous côtés.
Commenter  J’apprécie          00
On dit qu'après le rituel du bain du Kuarup les gens cessent de se souvenir des morts. On se souvient juste un peu, de temps en temps, dans les rêves. C'est peut-être ça mon problème: je ne veux pas oublier. Au contraire, je veux me souvenir de tout: la voix de ma mère, son odeur, le bruit de son rire. Je ne veux pas oublier Kamaka, ni chacune de ses histoires, et Anakinalo non plus. Je veux même me souvenir des musiques qu'elle a jouées dans la Maison des Hommes et que je n'ai jamais entendues. Si Kamaka me demandait de me jeter dans le bain de l'oubli tout de suite, peut-être que je m'esquiverais. Est-ce que cela fait partie des infirmités de notre âme, un mal de blanc? Ne pas savoir oublier ce qui doit l'être finit par nous rendre incapables de nous souvenir de ce qui compte. Nous sommes une race d'accumulateurs compulsifs, non seulement d'objets, mais aussi de sentiments, de souvenirs, jusqu'à l'intoxication. On ne jette rien au feu, on ne brûle pas les images ni les biens de ceux qui sont partis, on ne respecte aucun précepte qui nous prive de quelque chose: on veut le beurre et l’argent du beurre.
Commenter  J’apprécie          00
Voici un extrait de la page 100 :
« …‚un vieux cahier d'écolier avec une couverture en papier marbré rose et marron. Ses lèvres tremblent : avant même de l'ouvrir, elle devine déjà les feuillets crème, rayés de fines lignes bleues, l'écriture légèrement inclinée vers la droite et les points sur les i éparpillés un peu partout.
Elle l'attrape comme un naufragé, pose son visage sur le cahier, enfonce son nez dans le papier poreux et inspire. Une odeur de vieux, presque de moisi, mais, derrière l'odeur des choses gardées, elle reconnaît l'odeur humide des choses venues de l'autre côté de l'océan, qui ont vécu dans la forêt, une odeur de paille et de fumée, de terre et de feuilles piétinées. Elle a envie de se lancer à la poursuite des mots passés, mais elle redoute l'impact, elle sait que le colis, malgré la bonne intention, est piégé. Alors elle fait comme si aucun volcan n’explosait en elle, comme si elle n'avait pas le visage en feu, comme si elle était sereine et calme, que son cœur ne battait pas la chamade et que ses mains n'étaient pas moites. »
Commenter  J’apprécie          00
Nous sommes une race d'accumulateurs compulsifs, non seulement d'objets, mais aussi de sentiments, de souvenirs, jusqu'à l'intoxication.
Commenter  J’apprécie          20
Le voyage est long, très long. Ana convoque une dernière fois la sensation de fraîcheur de l’aéroport avec ses escalators magiques, ses chariots, ses voyageurs chargés, la confiserie chic et les flacons de médicaments, un monde tout blanc, clair, luisant, sur le point de disparaître ace à un autre, brun, poussiéreux, d’arbres tordus et de chemins à perte de vue. À mesure que le bus avance, un autre Brésil se dévoile. Un monde de petites villes perdues au cœur du Mato Grosso, d’exploitation de soja, de camionnettes, de crevasses et de chapeaux de cuir, tout à fait incompatible avec le monde scintillant des comptoirs de vente et du café expresso, d’hommes improbables en costume trois pièces flanqués d’attachés cases bien lustrés et de passe-droits. Ici une couche de terre recouvre tout. Le soleil passe sa langue dessus. Et la poussière colle un peu plus.
Commenter  J’apprécie          00

Acheter les livres de cet auteur sur
Fnac
Amazon
Decitre
Cultura
Rakuten

Lecteurs de Rita Carelli (34)Voir plus

Quiz Voir plus

Katherine Giebel ou Barbara Abel

Je sais pas ?

Katherine Giebel
Barbara Abel

10 questions
11 lecteurs ont répondu
Créer un quiz sur cet auteur
¤¤

{* *} .._..