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Critique de Cigale17


À la mort de sa mère, en 1959, Charlie Rizzo part vivre avec son père à Chicago. Matt Rizzo est aveugle et, pour répondre à la curiosité de son fils, il lui explique comment il a perdu la vue. En 1925, il chasse avec deux copains dans un coin près du fleuve où, disait-on, il s'était passé d'horribles événements : « le crime du siècle ». Mais c'est l'accident de chasse, et un coup de feu aveugle Matt. Voilà la version officielle. Cependant, des circonstances particulières amèneront Matt à avouer la vérité à son fils et à lui raconter pourquoi il a passé plusieurs années en prison, partageant la cellule de Nathan Leopold, un des deux auteurs du crime du siècle. L'homme deviendra pour Matt une sorte de mentor.
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Au début, malgré une certaine lenteur du récit, le désarroi du jeune garçon qui découvre le monde d'un aveugle se révèle particulièrement émouvant : l'appartement sans décoration aucune, le père qui n'allume jamais, qui se tient devant un mur parce que ça le rassure car il sait ce qui est devant lui, la compagnie bienvenue de Capitaine, etc. Au fil du récit, les relations père-fils tiennent une place importance dans ce superbe roman graphique, non seulement entre Matt et Charlie, mais aussi entre Matt et son propre père, comme entre Nathan et le sien. J'ai eu parfois l'impression que Nathan Leopold servait à Matt de substitut paternel. le caractère de cet intellectuel qui a commis un meurtre par bravade reste à approfondir pour moi : je sais que je relirai cette oeuvre. C'est grâce à Nathan que Matt découvre la littérature, la philosophie, l'Enfer de Dante, et qu'il se met à écrire lui-même.
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Autant, voire plus, que le scénario de David L. Carlson, c'est le graphisme de Landis Blair que j'ai trouvé remarquable. Les dessins à la plume et à l'encre, toujours en noir et blanc, presque toujours hachurés (sauf dans les passages intitulés « Les écrits de Matt Rizzo »), la mise en page, les plans privilégiés rappellent parfois le travail d'Emil Ferris dans Moi, ce que j'aime, c'est les monstres. D'autant plus qu'il s'agit de la même époque (le début des années 60) et du même endroit (Chicago) et, dans les deux cas, d'histoires particulièrement sombres et intenses. Les variations sur les lunettes de Matt ouvrent ou ferment un monde, c'est selon. Certaines pages sont impossibles à oublier : retenu par deux ombres, Matt tenant ses yeux arrachés dans ses mains, les orbites en sang, devant les flammes de l'enfer et les lunettes « ouvrant » sur la prison m'a bouleversée. J'avoue ma perplexité devant le rapprochement des deux panoptiques : la prison de Matt et la bibliothèque que fréquente Charlie… Une expérience de lecture marquante, assurément.
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