L'obligation de subir nous donne le droit de savoir.
Nous nous trouvons à l'orée d'un monde inquiétant. [...] Dans cet univers, la forêt enchantée des contes de fées laisse place au bois sombre où il suffit de mâcher une feuille, de sucer une goutte de sève pour être foudroyé. C'est un monde où la puce meurt d'avoir mordu le chien, où l'insecte est asphyxié par l’arôme de la plante, où l'abeille rapporte à sa ruche un nectar empoisonné, et fabrique du miel vénéneux.
La raréfaction de la nourriture a durement aussi frappé les hirondelles qui naviguent dans le ciel en y absorbant les insectes de l'air, comme le hareng croise dans les mers en y prenant le plancton de l'eau. Les hirondelles ont été très touchées; tout le monde se plaint de leur petit nombre; nous en avions beaucoup plus il y a quatre ou cinq ans, a écrit un naturaliste du Wisconsin. Le ciel en était plein; à peine, maintenant en voit-on quelques unes... Cela peut provenir des pulvérisations qui ont soit chassé, soit empoisonné les insectes. page 119.
Notre époque est celle de la spécialisation ; chacun ne voit que son petit domaine, et ignore ou méprise l’ensemble plus large où cependant il vit. Notre époque est aussi celle de l’industrie ; personne ne conteste à son prochain le droit de gagner un dollar, quelles que soient les conséquences.
En approuvant un acte capable de causer de telles souffrances à des créatures vivantes, ne sommes-nous pas tous diminués dans notre humanité ?
Ces plantes ne sont de « mauvaises herbes » que pour ceux qui font argent des herbicides chimiques.
Le temps est l'ingrédient essentiel ; mais, dans le monde morderne, il n'y a pas de temps.
l'obligation de subir nous donne le droit de savoir
Pour la première fois dans l’histoire de l’humanité, tout être humain est désormais soumis au contact de produits chimiques dangereux, de la conception jusqu’à la mort.
Quelle est la place des pesticides dans l’ensemble de la crise environnementale ? Nous les avons vus contaminer le sol, les eaux et les aliments, priver de poissons les rivières, d’oiseaux les jardins et les campagnes désormais silencieuses. L’homme, ne lui en déplaise, appartient lui aussi à la nature. Comment pourrait-il échapper à une pollution si complète du monde entier ?