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Critique de mh17


« Ceci est pour vous quand vous viendrez. Il faut être prêt ». Oh que oui ! Ne comptez pas rentrer dans ce livre (2005) en tongs allongé sur un transat. Buvez trois cafés noirs do Brasil, armez-vous d'un crayon effilé et attendez-vous à pénétrer dans une forêt narrative très très dense. J'ai tenté ici de défricher très grossièrement les premiers chapitres.

1.Le livre débute par une longue lettre en italiques pleines de mystères (voir citation). L'émetteur un simple « sertanejo » (?) se présente comme l'ami du défunt l'anthropologue américain Buell Quain. Celui-ci s'est semble-t-il suicidé « sans explication apparente le 2 aôut 1939, à vingt-sept ans, dans un geste intempestif d'une violence effrayante » devant les Indiens Krahôs, une tribu amazonienne. Il a laissé des lettres « impressionnantes mais qui n'expliquent rien ». le sertanejo sait des choses qu'il n'a pas voulu livrer alors et a laissé ce testament. Il se sait surveillé et met en garde le destinataire contre les témoignages des autres. Il le prévient qu'il ne lui fournira pas la vérité noir sur blanc. « Vous devez vous contenter de l'impondérable et de la précarité de ce que je vous raconte, tout comme j'ai dit m'en remettre aux récits des Indiens et au flou des traductions du professeur Pessoa ». Il a composé ce récit six ans après la mort de Quain et attend son destinataire.

2.Un narrateur moderne raconte que le 12 mai 2001 il est tombé sur un article de journal concernant les lettres d'un anthropologue, mort lui aussi parmi les Indiens du Brésil et qui mentionne le cas de « Buell Quain qui s'est suicidé au milieu des Indiens Krahö en août 1939. ». Il contacte l'anthropologue auteur de l'article et se lance dans des recherches au Brésil et aux Etats-Unis. Avant de se suicider Quain a écrit sept lettres. Quatre d'entre elles sont destinées à sa conseillère, Ruth Benedict, de l'Université de Columbia, à New York ; une à Mme Heloísa Alberto Torres, directrice du Musée national, à Rio de Janeiro ; une à Manoel Perna, un ingénieur de Carolina avec qui il s'était lié d'amitié (le sertanejo) ; et une au capitaine Ângelo Sampaio, chef de la police de la ville.

Ce narrateur moderne un journaliste, ressemble beaucoup à l'auteur et raconte son enquête. Il se présente à ses interlocuteurs comme un romancier. Son écriture est celle d'un journaliste qui semble objectif et qui nous informe en même temps de la difficulté à mener son enquête. En alternance le narrateur de 1939 ( Manoel Perna) raconte les neuf nuits qu'il a vécues avec Quain.

Questions : Pour quel motif Quain s'est-il suicidé ? Désespoir ? Solitude ? Syphilis ?
-Quels étaient ses rapports avec ses collègues, sa famille, les femmes et avec les Indiens ?
-A qui s'adresse le narrateur de 1939 ?
-Pourquoi prend-il tant de précautions ?
-Pourquoi le narrateur moderne s'intéresse t-il tellement à Quain ? (Personne ne lui a demandé répète-t-il sans arrêt en tête des chapitres).

On sait que les témoignages ne sont pas fiables y compris ceux des narrateurs. le premier a besoin de passer par un traducteur, le Pr Pessoa . le second est un journaliste qui se lance dans le roman. Il ressemble singulièrement à l'auteur, lui-même obsédé par cette enquête. Bientôt il se retrouve à son tour au coeur des ténèbres chez les Indiens Krahô, une tribu amazonienne en voie d'extinction, repoussée par d'autres tribus, elles-mêmes repoussées par les Blancs. La rencontre est marquante et crée un malaise puis une remise en question de ses certitudes. C'est la partie la plus intéressante du livre, pour moi.

Reportage  ? Fiction ? Autobiographie ? Les faits ethnographiques et biographiques interviennent dans la fiction et vice versa. Les deux époques se chevauchent : coïncidences étranges d' événements, méprises des témoins encore en vie. Peu à peu des pièces du puzzle se mettent en place et quelques uns des mystères s'éclaircissent enfin. Mais la frustration du narrateur enquêteur qui contamine notre lecture l'emporte.

Le lecteur a été prévenu depuis la première phrase, il lui sera difficile de faire la différence entre vérité et mensonge. En effet aucun des personnages ne communique directement avec les autres. « Le secret est le seul bien qu'on emporte dans la tombe » et l'autre demeure à jamais une énigme.

Vous l'aurez compris ce roman sort de l'ordinaire. Il est très ambitieux, ludique et intéressant quoiqu' un peu trop complexe à mon goût.
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