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Citations sur Les Fossoyeurs (62)

Patrick Métais me raconte qu'il pouvait se passer des années sans que les inspecteurs de l'État reviennent sur place. Durant les huit ans qu'il a passés chez Orpéa, il n'a eu à gérer qu'une dizaine de contrôles tout au plus pour la cinquantaine de cliniques qu'il supervisait. « Pour qu'un nouveau contrôle soit planifié sur nos établissements, il fallait que les ARH aient reçu des plaintes des familles de pensionnaires. Sinon, nous étions tranquilles comme Baptiste », affirme-t-il. Ce qui peut paraître plus choquant encore, c'est que les contrôles qui faisaient suite à ces plaintes n'étaient jamais réalisés par surprise. Le directeur de l'établissement en question était, en général, prévenu par les autorités de contrôle (l'ARS et le conseil départemental) un mois et demi ou deux mois à l'avance, et le groupe avait donc tout le temps de « préparer » le contrôle à venir. Difficile dans ces conditions d'espérer découvrir de potentielles fraudes...
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La question du contrôle des Ehpad et des cliniques est absolument centrale. Que ce soit l'Inspection du travail, les agents des autorités de tutelle ou ceux de l'Assurance maladie, ils ne sont tout simplement pas au niveau pour faire face à la force de frappe et à l'ingéniosité de ces grands groupes privés qui sont, eux, totalement conscients de leur « supériorité ». (…) J'ai eu l'occasion d'en discuter avec un ancien directeur général adjoint du groupe Korian, leader du secteur en France. (…) Lorsque j'évoquerai ces ratés avec lui, il me répondra ceci : « Les contrôles, c'est une question de fond. C'est le sujet ! Est-ce que les tutelles, est-ce que les agences régionales de santé ont les capacités et les movens de contrôler des groupes comme Korian ou Orpéa ? Est-ce que l'État est capable, une fois de temps en temps, de faire une descente avec une équipe-choc qui sait lire entre les lignes, fouiller la comptabilité d'un groupe? Est-ce qu'ils ont la puissance d'expertise pour le faire? Je ne parle pas d'un flicage malsain, mais juste de vérifier la bonne utilisation de l'argent public ? Aujourd'hui, clairement non ! Il faudrait qu'ils embauchent des anciens du secteur, qui sont les seuls capables de savoir où il faut aller fouiner. Il faudrait des autorités de contrôle indépendantes et beaucoup plus de moyens.
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Au bout du compte, l'existence de ces rétrocessions parfaitement irrégulières est confirmée par les autorités peu de temps après la publication des Fossoyeurs. On apprend également, via un article du Journal du Dimanche (JDD) signé Anne-Laure Barret, que Claude Évin lui-même, alors patron de l'ARS Ile-de-France, a alerté dès 2014 la secrétaire d'État (PS) en charge des personnes âgées, Laurence Rossignol. « Si les analyses s'avèrent fondées, le groupe Korian obtient des avoirs de la part de ses fournisseurs de dispositifs médicaux, ces avoirs venant en déduction de leurs dépenses mais sans être comptabilisés dans les comptes administratifs des établissements », écrit-il ainsi dans une note. Selon l'ancien ministre de la Santé (1988-1990), ces pratiques pourraient « faire système » et représenter près de 4,4 millions d'euros de perdus chaque année par l'Assurance maladie.
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Le groupe Orpéa n'est jamais à court d'idées pour maximiser ses revenus et satisfaire son actionnariat. Un Ehpad est là pour "cracher" autant d'argent que possible, comme nous le résumait Patrick Métais, l'ancien directeur médical du groupe. Je vais découvrir, au fil de mon enquête, qu'en plus de ses revenus issus de l'hébergement (payé par les résidents) et de la marge réalisée sur la dotation publique, le groupe a encore réussi à trouver, dans les années 2010, de nouvelles sources de profits : taxer les intervenants extérieurs. Il en existe de trois sortes : les coiffeurs, les kinésithérapeutes et les laboratoires. p.191
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Durant toutes ces années, me raconte-t-il, le groupe est parvenu à encaisser encore plus d'argent public via quatre biais différents : 1. En dépassant le nombre de lits dans des conditions obscures ; 2. En réduisant le nombre de postes de soignants et médecins, pourtant réglementaires ; 3. En maximisant le coût de chaque patient pour l'Assurance maladie et les mutuelles ; 4. En instaurant des remises de fin d'année (RFA) sur l'ensemble des produits médicaux payés par l'argent public. p.145
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"Je dirais que la maltraitance n'est qu'une conséquence de tout un système qui est une organisation extrêmement étroite qui permet de gagner le maximum de fric sur chaque structure par tous les moyens possibles, pense-t-il. Je dirais qu'Orpéa a mis en place un système tout à fait singulier dans le secteur des Ehpad. J'irais plus loin : je dirais que le docteur Marian a mis en place ce système extrêmement pervers et que, une fois mis en place, il ne pouvait plus revenir en arrière." p.144 et 145
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Et l'élément clef, l'ADN d'Orpéa, il est vraiment là : réussir à organiser la prise en charge de personnes âgées dépendantes dans le contexte budgétaire le plus restreint possible. Lorsque vous avez compris ça, vous avez compris Orpéa." p.113
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Patrick Métais, l'ancien directeur médical de Clinéa, la branche "cliniques" d'Orpéa, ira même jusqu'à me dire, dans son langage imagé, que les "personnes âgées le faisaient royalement chier". Selon lui, "les vieux ne sont qu'un moyen de se faire du fric. Mais, fondamentalement, la prise en charge de la personne âgée, la dépendance, la maladie, il n'en a rien à battre ! Mais alors, rien à foutre !". p.113
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Les familles se révoltent et le personnel craque. Le directeur, Adnane Azzaoui, démissionne moins d'un an après sa prise de poste. Les infirmiers se succèdent à une vitesse alarmante. Laurent Garcia, le cadre infirmier qui m'accompagne depuis le début de cette enquête, a, lui, choisi de rester et d'épauler les familles dans leur combat. "Le directeur m'avait pourtant convoqué dans son bureau, avant son départ, pour me conseiller de quitter l'établissement, m'assurera-t-il. C'était un moment très fort où il m'a pris dans ses bras, m'a expliqué qu'on ne pourrait rient faire, que le siège décidait de tout, que c'était un groupe malsain, qu'il fallait que je m'éloigne de tout ça. J'aurais dû l'écouter. Mais j'ai quand même voulu essayer." p.83
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C'est arrivé plusieurs fois qu'on fasse entrer des résidents sans visite de pré admission, pourtant obligatoire. On nous larguait le dossier médical à la fin, parfois le jour-même de leur entrée. Et on n'avait rien préparé. Il y a une personne qui débarque et vous n'êtes même pas au courant. La cadre infirmier, elle gueulait. On se retrouvait alors à devoir trouver un fauteuil roulant en urgence. On rattrapait le truc. Mais, oui, clairement, c'était dangereux. Elle nous court-circuitait et ne suivait pas les procédures." p.49
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