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Critique de tamara29


Edifiant. Choquant. Révoltant !! Même les mots semblent ne pas être assez forts pour exprimer le ressenti durant la lecture de cet essai « Les fossoyeurs » de Victor Castanet ayant pour sujet les pratiques scandaleuses du 1er groupe des Ehpad privés ORPEA.
Même après plus de 70 critiques, alors que tout a été largement résumé et commenté précédemment, il est pourtant nécessaire de continuer à en parler, et cela passe par les billets. Pour ma part durant ma lecture, je l'évoquais à bon nombre de mes connaissances, en le racontant de mon mieux et conseillant vivement cette lecture. Et ma voix était chevrotante d'émotion et de rage face aux pratiques immorales de ce groupe.

Le journaliste Victor Castanet a enquêté pendant 3 ans, réussissant à interviewer 250 témoins, souvent des anciens salariés du groupe (à tous les niveaux hiérarchiques), récupérant des documents (comptables, etc.), des enregistrements pour appuyer son investigation.
Enquête de longue haleine pour réussir à contacter ne serait-ce que des premiers salariés, réaliser des entretiens clés ou encore obtenir des documents essentiels à la compréhension des pratiques ; entretiens et documents qui ouvraient souvent une autre porte sur d'autres malversations du groupe. On mesure toute la difficulté de cette enquête, le courage des actuels et anciens salariés pour parler, témoigner, (notamment ceux qui acceptent que leur nom soit cité), lorsqu'on comprend le pouvoir de ce groupe, l'influence qu'il a, les manoeuvres employées pour faire peur et manipuler à tous les niveaux – des salariés, aux fournisseurs en passant par les organismes de contrôle…
En commençant ma lecture, j'avais déjà entendu parler des enquêtes réalisées par Mediapart, Envoyé Spécial et des scandales autour des Ehpad privés. On apprenait qu'ils avaient plus à coeur de faire du chiffre que de prendre soin de nos ainés (utilisant diverses méthodes : salariés en sous-effectifs, manque de matériels, de protections, repas réduits (les ‘'fameuses'' biscottes au nombre limité).
Mais, c'était bien loin de ce qu'on pouvait imaginer, bien plus grave et honteux. A chaque chapitre, Castanet nous révèle des pratiques qui me paraissaient tellement choquantes qu'il m'arrivait parfois de me croire dans une série télévisée des plus cyniques en plein coeur des mafieux, des JR qui pouvaient surgir dans n'importe quel couloir d'un établissement, laissant derrière eux des salariés terrorisés et usés, des personnes âgées maltraitées, des familles démunies, en colère, effondrées.

Les dirigeants du groupe Orpéa ne reculaient devant -absolument- rien pour faire des économies de quelques centimes. Faire du chiffre et ce, sans aucun scrupule, c'était le mot d'ordre. Une fois qu'on sait ça, on ne devrait plus s'étonner, et pourtant… En 35 ans, le groupe a réussi de manière machiavélique à affiner leurs malversations et trafics pour gagner toujours plus. A la tête d'Orpéa, le trio sans foi ni loi : le docteur Jean-Claude Marian (fondateur du groupe), Yves le Masne (DG du groupe) et Jean-Claude Brdenk (DGE).
Cela passait par le trafic des chiffres comptables, par des rétrocessions (RFA) sur le dos des aides de l'Etat (bref des résidents et de l'argent public), des manipulations des contrats (CDD), des fausses factures, des sous-effectifs, un nombre de lits supérieurs aux normes, un manque de soins allant jusqu'à la maltraitance des résidents, des licenciements à tour de bras des salariés les plus récalcitrants et ce, par l'intermédiaire notamment de « directeurs nettoyeurs » en passant par des lobbying politiques pour acquérir de nouvelles autorisations jusqu'à des contrôles de l'Etat via l'ARS peu efficaces (soit n'ayant pas assez de contrôleurs et de connaissances pour mener à bien ces contrôles, soit parce que les Ehpad sont prévenus suffisamment à l'avance pour avoir le temps de cacher toutes les fraudes, soit tout simplement par de « bonnes » relations que les dirigeants d'Orpéa ont su nouer avec certains institutionnels, au point que certaines demandes, plaintes restaient sans réponse !).

C'était plus que du malaise et de la révolte, c'était de l'écoeurement.
Un essai capital qui permet de comprendre en détails toute l'organisation du groupe Orpéa (mais le 2ème, Korian, prenait également le pas avec les mêmes pratiques)… On aimerait se dire que les choses vont changer, que les contrôles seront plus sévères et efficaces, que de tels dysfonctionnements et malversations seront désormais impossibles. On aimerait pouvoir le penser...
Il reste heureusement des journalistes tenaces, comme Victor Castanet, des lanceurs d'alerte, des salariés courageux (de l'aide-soignante au directeur d'Ehpad) pour témoigner ; des salariés qui, malgré le manque de moyens et de faibles rémunérations, ont à coeur de prendre soin des résidents, de nos ainés, de nous.

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