Il est étrange que la montagne devienne pour certains le seul salut, il est étrange que nous ne puissions vivre normalement que lorsque nous gagnons sac au dos l'entrée des vallées ; pourquoi ne pouvons-nous vivre que lorsque nous fuyons notre métier, notre famille, notre patrie? Car nous fuyons sans nous retourner ; la montagne, autrefois terre de refuge pour les peuples vaincus, est aujourd'hui l'asile de ceux qui ne retrouvent la paix que lorsque son ombre tombe enfin sur le jour féroce des villes. Nous nous fuyons nous-mêmes aussi, mais comme notre moi n'est qu'un moi social, nous fuyons notre civilisation.
L'idéologie du progrès est tellement admise qu'elle n'a pas besoin de livres ou de troupes de choc pour triompher.
D'une façon comme d'une autre, nous voyons que la nécessité révolutionnaire est antérieure à nos personnes ; catholiques, protestants, athées croyant à des forces spirituelles nécessaires, nous devons poser au premier plan cette révolution qui peut seule justifier les autres. Elle n'est pas une création de notre intelligence, elle est une manifestation brutale qui s'est imposée à nous. Nous sommes des révolutionnaires malgré nous.
La véritable critique doit considérer que les événements importants sont précisément ceux que l'on accepte comme normaux.