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Citations sur Comédien (8)

Le théâtre a emprunté nombre de ses moyens techniques, une partie de son vocabulaire et quelques superstitions à la marine à voile. Ce n’est pas par hasard. Nous constituons l’équipage d’un bateau et, n’y voyez aucune vanité, je suis votre capitaine. Nous dirons que nous devons accueillir près d’un millier de passager chaque soir et qu’il est essentiel que nous les menions à bon port. Et nous réussirons, à la seule condition d’avoir assez d’humilité pour travailler. Et pour travailler ensemble. Sous ma direction, si vous le voulez bien. Nos intérêts convergent : chacun de vous, de nous, veut sortir indemne, sinon grandi, de cette aventure, et nous savons tous que seul, c’est impossible. Parce que l’expression est absurde qui parle de « tirer son épingle du jeu ». On ne tire pas son épingle, jamais. On peut toujours être mauvais dans un bon spectacle, mais bon dans un mauvais, je veux dire vraiment bon, c’est impossible. Lorsqu’on juge à propos d’une mauvaise soirée, qu’untel a « tiré son épingle du jeu », on ne veut pas dire qu’il était bon, mais que, étant donné le contexte, il aurait pu être pire… Ce n’est pas là ce que nous voulons… Je suis certain que ce n’est pas là ce que vous voulez. Cette première lecture nous renseigne sur l’ampleur de la tâche qui nous attend. Mais je crois que l’enjeu en vaut la peine, car, si tout le monde accepte de prendre le risque, nous pouvons aboutir à un moment de théâtre. C’est-à-dire à une manifestation réellement artistique. A la beauté.
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Plus le rôle est court, plus la honte est grande si la hache s’abat brusquement au milieu d’une phrase, d’un mot parfois. Car c’est bien de honte qu’il s’agit. Celle d’être surpris, soi, en plein lumière, à la place du personnage qu’on avait l’audace de vouloir interpréter. A l’instant, le charme se déchire, l’être imaginaire s’évapore et il ne reste plus sous les feux qu’un pantin désarticulé dont tous les fils sectionnés traînent au sol. La durée de la disgrâce n’est mesurable que pour les autres. Parfois c’est à peine un faux pas, une virgule ajoutée. Ailleurs la stupeur des spectateurs se mue en réprobation. Il arrive même que des rires réussissent à bousculer la consternation. Mais pour le naufragé, le temps importe peu. Dans tous les cas, un grand drap opaque s’est affalé sur son monde. Qu’importe la longueur de la chute puisqu’elle est toujours mortelle. C’est la mort, c’est vraiment la mort. Pas la sienne, bien sûr, celle du personnage. Mais elle surgit lorsqu’on est tout entier le personnage, justement. Alors, on meurt, oui. En public. Mais sans gloire, sans chic. Le trou de mémoire, c’est une mort humiliante. Une sale mort obscène. Un lynchage.
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Mais pour l’essentiel, c’est fini. Au fond, c’est ainsi tous les soirs. Et depuis toujours. Au salut, c’est fini. C’est quand on joue que la véritable vie palpite. Alors, que le rôle soit plus ou moins long, cela ne change pas grand-chose. Même pas la fatigue, car ce n’est pas de jouer, d’être en scène, qui épuise, dans les spectacles qui ne demandent pas de performances physiques ; non, ce qui use l’énergie, c’est d’entrer en scène, de sortir de l’ombre, de s’extraire de soi pour exister autrement. De naître.
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Un rideau qui tombe est pour lui un événement poignant. L’alarme tellurique qui se déclenche alors en lui, il ne peut la comparer qu’à celle qui affole les animaux lors des éclipses totales du Soleil. Cela ne dure qu’une seconde, bien sûr, mais c’est de cet ordre-là, de cette intensité-là.
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- Et pourtant, les tournées en Afrique, c’est agréable. Pas à cause de la qualité des spectacles, ça non. Tout le monde s’en fiche de l’Afrique. La preuve : c’est moi qui joue Alceste dont je pourrais être le père, sinon pire. Et je ne suis pas la catastrophe la plus profonde de la distribution. Non, si c’est agréable, c’est qu’il y a un public, un public qui écoute, qui vibre, qui rit, qui pleure, qui s’inquiète. Un public qui ne passe pas le temps de la représentation à chercher quelque commentaire brillant à servir aux amis. Un public qui regarde le spectacle pour lui-même. Par plaisir, passe-moi l’expression, car voilà bien une notion qui a totalement disparu de nos contrées septentrionales. Tu te rends compte, du plaisir ! Alors, non, je ne me plains pas. Mais je t’envie, ça oui, parce qu’on n’a pas tous les jours l’occasion de changer de route, de se lancer, de débuter. Vas-y, vieux, et surtout, promets-moi de me raconter quel effet ça fait de remonter dans le temps.
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- C’est de théâtre que je vous parle. Il est question de diffuser de grands textes, d’en faire goûter la musique intérieure, d’incarner les émotions qu’ils recèlent. Ces textes sont d’ailleurs en bonne place dans votre bibliothèque. C’est là que je les ai dévorés dès que j’ai su lire. Au début, je ne les comprenais pas. J’avais beau les lire et les relire, je ne les comprenais pas. Et puis, un jour, je ne me suis plus contenté de les lire avec les yeux, je les ai lus à voix haute, je les ai dits, je les ai interprétés, et là je les ai entendus. Sentis. Je les ai reçus. C’était beau. Je vous assure que c’est émouvant, un texte qui, tout à coup, s’ouvre. J’avais l’impression qu’une lumière sortait de ma bouche. C’est cela que je voudrais. Que d’autres que moi puissent voir sortir cette lumière de ma bouche.
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Le silence s’invita à la table pour prendre lui aussi son petit déjeuner.
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- Mais jouer au théâtre, est-ce que je peux, docteur ?
- Bien sûr. À condition toutefois d'éviter tout effort physique.

Comment aurait-il pu lui faire comprendre que jouer au théâtre, c'est justement un effort physique ? Qu'entrer en scène et dire simplement "Bonjour", c'est un effort physique équivalent à l'escalade de cinq étages avec au bout des bras des sacs de supermarché pleins jusqu'aux anses ?

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