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Critique de florigny


Clive Thurston le romancier – a-t-il besoin de préciser quand il se présente – est un parasite hollywoodien dont la tête, les chevilles et le reste ont enflé après avoir connu le succès grâce à un manuscrit volé à un mourant. Depuis il se prend pour un génie et rêve d'écrire un roman dont les héros seraient de nouveaux Scarlett O'Hara et Rhett Butler, rien de moins. En attendant il hante les bars, boit des whiskies et des martini, drague des poupées qui fument des cigarettes encastrées dans des fume-cigarettes de 25 cm de long, tenus par des doigts aux ongles peints à peine plus courts.


Quand Eva, un soir d'orage se réfugie dans son chalet, la vie du bourreau des coeurs est bouleversée. Prostituée, il achète Eva 110 dollars à un client qui venait de la payer 100 – où ça ne va pas se nicher le capitalisme -, et est instantanément animé du désir de la faire souffrir, de lui rabaisser son caquet, on se demande bien pourquoi. Voilà le pitch de cet affligeant roman commis par James Hadley Chase en 1946 et traduit en 1947 par la Série noire qui ne s'est pas toujours montrée avant-gardiste. Si l'on peut accorder un peu d'indulgence historique à des romans écrits à une époque où les féministes n'avaient pas encore éclairé le monde, je ne trouve aucune excuse au britannique qui a élevé la misogynie, le machisme, la phallocratie au rang d'un art. Dans ce minable bouquin indigne d'un relay de gare, les hommes coincent fermement les femmes dans leurs bras, les laissent se débattre jusqu'à ce qu'elles s'abandonnent à leur sex-appeal irrésistible ; même une fille de ce genre [une prostituée] peut avoir sa fierté ; toutes les femmes avec lesquelles le bourreau des coeurs s'était amusé jusque-là avaient été trop faciles, il lui fallait un obstacle autrement dur et Eva ferait l'affaire ; l'idée qu'elle ne serait pas commode à avoir l'excitait, et ce serait un combat où tous les coups seraient permis... [Sic... et beurk...]. de plus Eva, n'était plus toute jeune, pas vieille bien sûr, mais en lui supposant trente-trois ans, c'est l'âge où dans ce métier-là, une femme doit commencer à s'inquiéter. Enfin le gros naze est sûr de lui puisque malgré la glaciale indifférence de la prostituée, elle est à vendre et tant qu'il aura de l'argent, il sera son « maître ». Son « maître », les mots ont un sens !! Au lit, l'homme est un dieu vivant, il suffit de consulter le dialogue post-coïtal, lorsque, pour 100 dollars, la belle s'exclame : Oooohhhhh CClliiiiivee, ooohhh tooiii aaalooorsss ! Elle n'ajoute pas : "Combien vous étiez ?", ce serait vulgaire. Il a besoin d'une femme inférieure moralement et socialement, une fille de joie, une courtisane qui exploite les hommes, pour sauver sa confiance en lui et soigner son viril complexe d'infériorité. Je ne cite que quelques exemples, le roman étant dans chacune de ses lignes un catalogue ordurier pour les femmes.

Pincez-moi, est-ce que je rêve ? Ce serait risible si c'était moins grave.


L'épilogue qui se veut humain, la pauvre fille qui a beaucoup souffert dans son enfance et qui veut venger sa misère, est aussi pitoyable que le reste. Non tous les romans des années 40 ne sont pas des grands romans noirs. Certains sont des daubes ! de tous temps des hommes ont respecté les femmes ; de tous temps, d'autres les ont rabaissées et salies. James Hadley Chase a choisi son camp.
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