AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de ATOS


ATOS
23 décembre 2016
Dora est jeune. Mais Dora sait, ressent, se rebelle, repousse, déverrouille, verrouille, rejette.
Qui jette la clé, qui la garde, qui la donne, qui l'arrache, qui la porte ? Dora est en souffrance. Elle n'est pas folle. Mais souffrance . Souffrance de voir et de ne pouvoir dire, formuler. Dora parle. le père s'inquiète, Freud écoute. Mais qui entend  Dora? La mère s'efface. L'autorité l'écoute, veut l'amener, la mener , la conduire. Mais Dora parle , elle sait. Elle voit. Elle comprend le mensonge. Elle sait qu'ils ne voudront entendre que ce qui leur conviendra. «  Elle m'encourageait à vive. Ignorant l'énormité de ma douleur. «  Leur propre désir, leur propre loi, La mascarade se joue et met sa chair et son coeur en croix.
En rêve…., rêve-t-on une réalité ? «  Faire monter les rêves, les souffler, les faire cuire, les rouler, les prendre dans ma bouche ».
Épousailles, soupirail, secrets de famille, déchirure, défigure, et les silences se glissent entre les carences et le geste. Petite fiancée de mon secret, je te ferais complice…malgré toi.
Désir, amour, théâtre et poésie. Parce que c'est au théâtre que le risque se prend. Là où il est grand, il a l'espace, la liberté, et le temps.
«  Celui dont les lèvres se taisent bavarde avec le bout des doigts ». «  Piqué, percé, cousu, décousu, c'est un travail de femmes »…Qui garde la clé ?
Le vertige s'éprend. Dans cet espace où la nuit ferme les yeux et que les hommes se parlent, dans cette nuit, qui n'est pas vraiment la nuit mais l'annonce d'une lumière. Une mise en lumière. Un je d'ombres se dessine à claire voix. « Elle connaît l'horreur du regret beaucoup plus puissant que le désir ». Mais le fantôme d'un meurtre rôde, la déchirure du ventre, la chambre..., le verbe entre en camera, inversion du temps. Dora ne subira pas. Elle sort de son ventre, elle sort de la chambre, elle sort de mémoire ; elle sort du passé. Lumière. «  Il n'est pas de plus grande douleur que de se souvenir de l'amour, et cela Freud le savait ». Qui est en proie, qui est chasseur ?..
«  Tout ce qui lui arrivait, ne lui arrivait que déjà passé. Elle vivait dans la mémoire. En proie au passé. Sans aucun espoir d'atteindre jamais quelque chose qui serait le présent. »
Le père s'inquiète, il craint le débordement. Il faut soigner Dora. Mais Dora n'est pas malade, elle est humaine, tragique.
La voix du théâtre, celle de la pièce. On entend cette voix.
Qui a entendu une fois la voix d'Hélène Cixous ne l'oublie pas. Plaisir à lire ce texte, plaisir à l'entendre. Jeu de « parle » et de « viens », jeu de « va » et « tout nous revient », jeu de vie et de mort, poupée russe des corps , plaisir, délire, désir, dégoût, l'amour brûle un jour. Dora cherche, Dora demande, Dora est femme. Elle part. L'image se meurt celle du père, de l'homme, de Freud, ou de dieu sait qui. Dora reste en vie.
Portrait de Dora, texte d'Hélène Cixous, mis en scène par Simone Benmussa, création le 26.02.1976, séquences filmées par Marguerite Duras, avec la participation dansée de Carolyn Carlson. de grandes voix au service d'un grand texte.
Astrid Shriqui Garain







Commenter  J’apprécie          52



Ont apprécié cette critique (4)voir plus




{* *}