AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de jeranjou


Une bonne pioche à tous les cook…

Quel comble ! C'est à se demander si, pour être écrivain, il ne suffit pas d'être né sous le signe de la bouffe anglo-saxonne.

Comme Obélix chez les Gaulois, Cook chez les bretons (1) serait tombé tout petit dans la marmite de potion magique qui lui confère un pouvoir d'écriture extraordinaire ! Ainsi, après chaque lecture d'un Cook (2), la dernière page se termine irrémédiablement par un WOUAHHHHH…

Cette fois-ci, dans la famille Cook, je demande celui qui est né au Texas dans une famille pauvre de la classe ouvrière et a été élevé dans la communauté des prêcheurs fondamentalistes. Comment ! Un écrivain dans une sorte de secte !

Oui, oui, c'est bien lui ! Cook Christopher ! Prévoyant initialement de devenir un prédicateur pentecôtiste, il s'en est sorti durant ses années de lycée et a embrassé par la suite la carrière de journalisme, de scénariste et d'écrivain.

« Voleurs », qui est son premier roman édité en 2004, raconte l'histoire de deux hommes sortant tout juste de prison qui traversent le Texas en direction du sud-est plutôt fiers en voiture décapotable.

Parmi les deux compères, Eddie, fan de blues et intrinsèquement beaucoup moins violent que son pote Ray Bob, s'arrête à une station-service pour acheter des cigarettes. Quatre dollars tout juste dans les poches, il se voit refuser l'achat d'un paquet pour un centime seulement. Comme c'est ballot !

Néanmoins, après une vive discussion avec le gérant d'origine indienne demeurant inflexible, Eddie sort son flingue, descend le jeune homme et prend les cigarettes en laissant les quatre dollars sur le comptoir. Question de morale, oblige… On ne vole un mort, c'est bien connu !

Après cet épisode tragique, Ray Bob décide de renouveler l'opération à chaque fois qu'ils manquent d'oseille, de bière, de cigarettes ou d'essence… En pratique, il suffit de tuer le gérant d'une station-service de préférence la nuit et se servir ensuite tranquillement dans la boutique. Simple comme un bonjour vous me direz…

Découvrant les différentes contrées du Texas de Houston à la péninsule de Bolivar en passant par les marais à l'est comme dans le roman de Lansdale «Les Marécages», ce roman s'apparente à un road movie dont l'issue est plus qu'incertaine et sanglante. Pour captiver le lecteur du début à la fin, l'auteur change de narrateur selon les chapitres et permet également de rentrer plus encore dans la personnalité de chacun des personnages du roman.

Long de plus de cinq cent pages, Christopher Cook prend son temps pour narrer la course folle des deux flingueurs, très vite accompagnés de très près ou à distance par d'autres personnages véritables atypiques :
- Rule, un Ranger à leur poursuite lorsqu'il ne couche pas avec la femme de son meilleur collègue,
- Lomax, le parent d'une victime décédée dans une station-service voulant se venger avec l'aide de Dieu et surtout des armes qui pourraient tuer un éléphant,
- Della une femme célibataire avec deux enfants vivant dans la misère et confrontée à une situation inextricable depuis sa rencontre avec l'Homme Idéal.

Vous laissant, mesdames, fantasmer sur l'Homme Idéal, je reviens au titre de notre roman .

Pourquoi l'évocation de simples « Voleurs » alors qui correspond d'ailleurs au titre original en anglais? Peut-être s'agit-il de voleurs de tout ce qui appartient à autrui allant jusqu'à la vie des hommes. A méditer…

Quoi qu'il en soit, dès la lecture des premières pages du récit, la virée sanguinaire dans le roman « de Sang-Froid » de Truman Capote mettant en scène Perry Smith et Richard Hickock m'est revenue instantanément à l'esprit.

Une dualité étonnante : Eddie et Perry attirés par la culture musicale pour l'un, l'écriture pour l'autre, Ray Bob et Richard quasiment condamnés dès leur naissance à une vie socialement défavorisée et délinquante au Texas.

Hormis les points communs de ces personnages et leur violence froide, le récit et la construction des deux romans divergent complètement par la suite.

Pour conclure, la seule critique négative que je ferai à cette oeuvre (réalisée par un vrai chef) se situe dans la construction même du récit. Pour ma part, j'aurai réduit sensiblement les deux premiers tiers du roman en omettant certains passages et augmenté largement la dernière partie qui s'avère palpitante.

Figurant dans la collection Rivages qui m'est chère doublement, je ne peux que vous suggérer vivement de découvrir cet auteur et ce roman au style marquant (voir la citation du traducteur) et à la noirceur quasiment palpable.

Bonne dégustation…


(1) Les Bretons du récit ne concernent pas les habitants de la Bretagne actuelle, région occidentale de la France, mais les anciens habitants (période à cheval sur le début de l'ère chrétienne) de l'actuelle Grande-Bretagne, ou plus précisément de l'actuelle Angleterre, qui sont aujourd'hui nommés « Bretons insulaires ».

(2) L'anglais Robin et le sanglant «J'étais Dora Suarez »,
l'australien Kenneth et le surprenant « À coups redoublés »,
ou encore l'américain Thomas H. et ses démoniaques « feuilles mortes ».
Commenter  J’apprécie          511



Ont apprécié cette critique (48)voir plus




{* *}