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Citations sur Poésie hondurienne du XXe siècle (9)

Absence

Quelqu'un s'en est allé
en laissant là tous les cahiers
ouverts à la page 21,
sur la table
servis
le café et les haricots,
chaud
le lit défait,
le chien
attendant sa pitance,
un rendez-vous d'amour
étendu à sécher à la fenêtre
et dans les vides de l'armoire
l'odeur des rêves.

Maria Eugénia Ramos, Tant il est vrai qu'aucun soleil n'est le dernier, 1989.
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Bananeraie

Bananeraie... Bananeraie... Sueur faite fruit
de cette luxuriante terre de ma terre.
Sang vert affluant sur la route noire
et sans nom qui enterre la douleur !

Hirsute plantation à couleur d'émeraude
qui ancre le Yankee têtu à notre sol.
En campements sordides la réalité
sauvagement nous écartèle et terrifie.

Pain de malheur pétri sans sel et sans levain.
Mères décimées sur le dur chemin.
Pâles larmes de l'enfance malingre !

O martyre ingrat, rosaire anonyme,
répandant après un sombre calvaire
un hurlement de gorge sèche... !

Hernan Alcerro Castro (Sang, 1950)
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Les pins

Dans mon pays les pins
sont verdoyantes tours d'espoir.
Des chemins verticaux,
des sentiers conduisant au métal des étoiles.

Dans mon pays les pins
connaissent les secrets de l'orchidée
et le pied des ruisseaux ;
mais ils n'ignorent pas non plus
l'épouvante
nocturne d'un pendu
ni des hommes qui meurent
dans la boue.

Dans mon pays les pins
connaissent les dangers
infinis de la nuit,
les solstices naufragés
- giroflée aveugle, jacinthe -
du sang répandu
qui tombe goutte à goutte
sur leurs racines.

Mais les pins sont aussi
des arbres chanteurs
dont la chanson est douce,
gracieuse comme le cœur
de la grive dorée ;
et un jour, un jour clair,
un jour d'alléluias,
amis, mes compagnons
d'une montagne à l'autre
on dira qu'on nous vit
tenant entre nos mains
une étoile de feu.

Pompeyo del Valle, La route fulgurante, 1956
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Devant la mer

Le fleuve ne sait pas
s'il devient très rapide ou taciturne.
Mais il transporte en sa clarté
ciel et montagne,
au point
que lorsqu'il arrive à la mer,
la mer, non, ne l'étonne pas.

Le fleuve ignore son savoir
et l'homme ignore ainsi son ignorance
devant la mer.
Parce que le fleuve
lorsqu'il atteint la plage
sait que tout retour lui est impossible,
que la vie tout entière est restée en arrière,
mais que la mer compense tout.
La mer, non, ne l'étonne pas !

Antonio José Rivas Aguiluz, Moitié de mon silence, 1964.
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Comme un serpent végétal

Comme un doux serpent végétal
je me love à ta taille. Je m'élève,
j'étanche ma soif dans tes coupes,
je m'abreuve
et voici que frémit la paisible lucidité
du lac que recouvrent tes hanches.

En toi
- dans les salons intimes de ton sang -
paraissent éclater des univers
des houles rouges et aveugles.
Et c'est l'instant où les sirènes assourdissent la mémoire,
c'est le plaisir,
l'incendie et la flamme du bonheur,
cet instant, oui.

Rafael Rivera, La mer est l'unique frontière, 1986.
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Maison urbaine

Maison urbaine,
Sans un arbre qui appelle.

Maison urbaine,
Sans un feuillage grimpant.

Maison urbaine,
Avec des fleurs suppliciées.

Que serais-tu sans jardinières ?

Maison urbaine,
Avec des oiseaux en cage.

Maison urbaine,
Sans poissons dans la rivière.

Maison urbaine,
Sans coqs claironnant à l'aube.

Que serais-tu sans hirondelles ?

Maison urbaine,
Sans trouée de paysage.

Maison urbaine,
Sans lumière à l'horizon.

Maison urbaine,
Sans fins nuages en flaques roses.

Que serais-tu sans les yeux des enfants ?

Jorge Federico Travieso, L'attente infinie, 1959.
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Prison centrale

Les fusils des gardiens
sont tranquilles auprès de leurs maîtres.

Les prisonniers dans leur cellule
voient le rayon de soleil se glisser
par les lézardes et tomber sur le sol :
fruit tiède et long.

Le fusil des gardiens
sont insensibles au vent du jour.

Des femmes aux visages sévères
à la porte de la prison attendent
le soldat de faction pour vérifier
leur parenté avec les prisonniers.

Les fusils des gardiens
sont faits de métal endormi.

A la prison centrale
condamnés et geôliers
se confondent.

Oscar Acosta, Mon pays, 1971.
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D'aujourd'hui à demain

Combien de temps aurons-nous perdu à parler
de ce qu'il faudra faire
lorsque demain arrivera ?
En attendant, on peut toujours boire un café ;
et faire l'amour cette nuit n'a rien d'étrange ;
et puis il n'est pas mal d'écrire un poème attisant la flamme.
Pourtant le monde est meilleur si nous le faisons
à temps, comme si aujourd'hui était demain
et si demain venait trop tard, sans pour autant refuser à la vie
un café, l'amour et un poème.

Rigoberto Paredes, Matière première, 1985
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Où il est dit comment et pourquoi Noé remporta le premier prix.

le jury chargé des attributions
déclara
le troisième prix revient à jonas
pour le savoureux récit
des trois jours passés
dans le ventre de la baleine

le deuxième prix a été attribué à moïse
pour le thème insolite de la mer rouge fendue en deux
rien qu'en levant une baguette

le premier prix a été décerné à l'unanimité à noé
pour la débordante fécondité
avec laquelle il parle du logement et de la survie
de toutes les espèces de la terre
dans une arche de bois
de cent trente mètres de long
et où
en plus de trois mille tonnes d'animaux
on stocka de quoi se nourrir
durant douze mois de tempête
tout cela
sous la direction d'un homme
âgé de six siècles

Juan Ramon Saravia, Passages bibliques aller et retour, 1985.
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