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Critique de Pasoa


Pasoa
24 septembre 2017
Selon le rite de la tribu amérindienne des Hopis, le nouveau-né doit rester vingt jours durant dans le noir (un temps qui lui permet de rester encore un peu comme dans le ventre maternel) et c'est seulement à l'issue de cette période qu'il est présenté au soleil levant et que l'on vient lui donner un nom.

Dès l'apparition du soleil, elle poussa des cris qui ressemblaient plus à des éclats de rire qu'à des pleurs d'enfant. On décida alors de l'appeler Tayatitaawa, Celle-qui-salue-le-soleil-en-riant.

C'est sur cette scène que débute “Née contente à Oraibi”, le roman de Bérengère Cournut. Dès les premières lignes, le lecteur reçoit comme une invitation au voyage et se met à marcher dans les pas de la jeune Tayatitaawa, fait la connaissance de ses parents (le père joue ici un rôle important), de son frère Mànkwatsi mais aussi du village d'Oraibi situé sur les terres arides des plateaux de l'Arizona.

Et puis au travers du personnage de Tayatitaawa, le roman s'ouvre sur l'univers de la culture des Hopis. Culture foisonnante d'une tribu vivant retirée, dépourvue de presque tout mais dont toute la richesse repose sur le rapport étroit avec la terre, la nature (avec ses vertus et ses dangers), les éléments, les dieux et les esprits, les liens entre les clans, les groupes (le clan du Papillon, du blaireau, de l'ours gris,…), les cérémonies rituelles qui rythment la vie de la communauté, etc. Cependant, à l'intérieur même de cette culture des Hopis, peuple pacifique, l'individu ne se soustrait pas à lui-même : il vit des joies et des peines, des tourments et le sentiment de paix. Ainsi, la tribu n'est rien sans l'individu et réciproquement.

Bérengère Cournut, dans un style emprunté au conte et nuancé d'ethnographie, de légendes et de cosmogonie, a écrit un roman d'une beauté toute intemporelle. le personnage de Tayatitaawa, enfant puis adolescente, sa candeur, son esprit volontaire et curieux nous la rende naturellement très proche. Son histoire se fait messagère de la culture de sa tribu.

C'est un roman qui mine de rien interroge sur nos sociétés contemporaine et occidentale, dites « avancées ». Dans un monde où presque plus rien ne fait sens, où le rapport à notre milieu naturel et aux autres est galvaudé, rapiécé, remis en cause, et où l'individualisme exacerbé fait errer les êtres, un livre comme celui de Bérengère Cournut est le bienvenu. C'est un roman d'une belle lucidité, très poétique, qui instruit passionnément. C'est aussi un livre qui rassérène, qui tout simplement fait du bien.

J'en recommande chaleureusement la lecture.

À signaler la très belle initiative des éditions du Tripode, avec une couverture de livre et une série de photos (clichés pris par des ethnologues partis à la rencontre de la tribu des Hopis au début du siècle dernier) tout à fait remarquables.
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