Civilisation ! Comme ce mot lui sembla vain ! La civilisation, à quelques kilomètres à vol d'oiseau, et elle qui se dirigeait vers le lieu où un tueur sanguinaire, un être dit humain, avait sacrifié une petite fille et l'avait torturée dans de si horribles conditions. Était-ce cela, la civilisation ? Était-ce la civilisation qui engendrait de tels monstres ?
Dans ce coin de campagne isolé, on n'imaginait pas un instant le Malheur. Qui peut s'abattre à tout moment. C'est bien connu, le Malheur n'a pas droit de cité au Paradis !
Elle traversa plusieurs villages à une vitesse indue et après le bitume, s’enfonça dans la zone boisée, debout sur ses cale-pieds. Elle se retrouva rapidement là où les véhicules à quatre roues avaient souffert à progresser aidée des crampons démesurés des pneus de cross, et de son expérience des deux roues -aucun engin motorisé n’avait de secret pour elle -, elle sautait de bosse en ornière, franchissait les obstacles qui se dressaient sur sa route avec une facilité déconcertante
Elle enfourcha le bolide et démarra prudemment en louvoyant légèrement. Mais si on dit que la bicyclette ne s’oublie pas, il doit en être de même pour la moto, car après une rapide prise en main, elle prit de l’assurance et ouvrit les gaz à fond.
Soudain, son ombre se détendit à l’infini devant elle, propulsée par les phares d’une voiture. Une voiture silencieuse qui devait la suivre phares éteints jusqu’alors et qu’elle n’avait pas devinée…
La vanne à fantasme s’ouvrit toute grande. Sa gorge se serra tant, qu’elle avait de plus en plus de peine à déglutir. Une sueur subite et aigre l’envahit et elle sentit ses jambes l’abandonner.