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Citations sur En face (14)

Le 3 octobre, à cinq heures, un homme, dont le nom ne vous dira rien (lui-même ne vous en dirait guère plus), sort de son appartement, referme doucement la porte derrière lui, descend les escaliers, sort de l’immeuble, marque un temps d’arrêt, un dernier temps d’arrêt, à moins que ce ne soit le premier, traverse la rue, et voilà, c’est la dernière fois que Jean Nochez (appelons-le Jean Nochez) franchit le seuil de chez lui, ça y est, c’est décidé, ça a mûri et maintenant c’est décidé, encore que, décidé, le mot est fort, il sort, pour la dernière fois du moins avant longtemps, il ne sait pas encore combien de temps exactement, moi non plus, ni vous, on va bien voir.
En tout cas c’est Solange qui va en faire, une tête.
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« Combien étions-nous ? Qui était là ? Qui, parmi nous, pourrait dans quelques quarts de siècle, chenu, chantourné par la voussure des ans mais la voix ferme encore et chargée d’émotion, raconter à ses petits-neveux rassemblés au coin du feu ce qu’il vit ce jour-là chez Ripoche, leur dire : je suis venu, j’ai bu, j’ai vu ? Qui et combien furent les témoins du, précisons-le cependant, très peu dramatique surgissement de Jean Nochez sur la scène de nos libations liquoreuses ? Et moi-même, n’en ai-je conservé le si net souvenir qu’à force de l’imbiber du suc fallacieux de la légende ? Car avouons-le, nous qui demeurons amarrés à jamais au comptoir, interdits de toute autre forme de périple, sommes hommes à confabuler souvent ; le mensonge et l’alcool sont nos seuls voyages, l’invention notre seule évasion. (Eh quoi ? J’entends qu’on s’indigne ? qu’on crie à la déception ? au roman ? à la marchandise ? Pourtant frères humains qui après tout lisez, n’ayez les coeurs contre nous endurcis : de nos tromperies, vous êtes au fond, sinon la cause et l’immobile moteur, du moins les complices.) » (p. 52-53)
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« Sa vie désormais est un songe : une ombre qui passe, un pauvre acteur qui s’agite à peine et qui pour parader dans ces pages n’a pas même assez de consistance ; déjà on ne l’y entend plus. C’est un récit plein de silence et de rumeur, et moi l’idiot qui le raconte, et vous qui en cherchez le sens. » (p. 87)
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Non, ça, renoncer, il a l'habitude ; c'est, chez lui, comme on dit, une seconde nature (quoique, encore faudrait-l déterminer en quoi consiste la première) ; c'est l’œuvre de toute une vie.
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Alors ça ne va plus trop, entre Jean et Solange.
Ca ne va plus trop alors qu'il ne s'est rien passé, au juste. Il n'y aura pas eu d'éclat, de trahison, ni cris ni pleurs. Pas de ce théâtre-là, entre eux ; ce serait plutôt au contraire que la scène est déserte, le décor branlant, les costumes mangés aux mites, et que les acteurs ont oublié leurs répliques. Ca ne va plus trop parce qu'il ne se passe plus rien, justement.
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Tout de même, à force, il a fallu un jour que j'en aie le coeur net. Trêve de songes, de supputations et d'atermoiements, une impérieuse nécessité m'enjoignait soudain, sans autrement se justifier, d'endosser l'habit du trappeur et de partir, à l'aventure, traquer la bête, la débusquer de son terrier, là où elle s'était enfouie, bien profond sous les neiges du néant, et voir un peu ce qu'elle y tramait.
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Car on peut aller très loin sans aller nulle part.
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C'est l'Islande. Un jour, ajoute-t-il dans un susurrement inusité à l'intention de sa femme comme s'il lui faisait miroiter une polissonnerie, un jour nous irons en Islande. Et Solange, dont on gage qu'elle ne s'est jamais aventurée au-delà des positions, étroites d'esprit et du reste, sur lesquelles campe d'ordinaire le missionnaire, et qu'un rien de scandinaverie suffit par conséquent à plonger dans un embarras émoustillé, Solange rougit.
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Ce n'est pas, que je sache, parce qu'on est à peine vivant qu'on est mort.
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La vie de Solange Nochez, à partir de cet instant, prend des allures d'une telenovela mexicaine mal doublée devant laquelle s'assoupit chaque après midi, au risque de ne jamais se réveiller, le maigre bataillon des désoeuvrés de la tranche horaire postprandiale, femmes de ménage soupirant de concert avec leur fer à repasser, piafs en cage et carassins en bocal, dépressifs ou retraités de la fonction publique et autres pensionnaires momifiés des Bleuets Jolis que l'on parque, les lèvres ourlés d'un reste frémissant de flan au caramel, dans une "salle de vie" ( par opposition aux chambres, sans doute, qu'on imagine plutôt dévolues à l'inverse ) où y a pas d'joie ni de meubles, hormis le gros poste accroché en hauteur au bout d'un bras télescopique, et qu'un sadique a pourtant trouvé idoine et plaisant de baptiser " Salon Charles Trenet ", c'est dire si bonjour bonjour les hirondelles et bonjour l'ambiance.
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