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Citations sur Un temps pour mourir (20)

L'espérance des chartreux est si grande, ils placent une telle confiance en Dieu, qu'ils reçoivent souvent leur médecin avec un détachement enjoué. Ainsi, un jour, un vieux moine à l'article de la mort rencontra le médecin du monastère. Le praticien lui dit : « Comment allez-vous ? » La réponse ne fut guère précise : « Beaucoup mieux que je ne le mérite. » Et le médecin de rétorquer : «Avec ça, un médecin ne peut rien savoir ! »

Les chartreux se souviennent de nombre d'anecdotes aussi étonnantes. Dom Guigues avait des douleurs préoccupantes. Le médecin était venu en urgence. Après quelques instants, il lui dit : « C est grave, vous pourriez en mourir ! » Et le religieux de répondre tout à trac : « Si ce n'est que ça.. . »

Dom Robert consultait aussi un médecin. Ce dernier le questionnait : « Comment allez-vous ? » Sa réponse était assez équivoque : « Moi, je vais très bien. C est ma santé qui va plutôt mal. »

Dom Ferdinand Vidai, prédécesseur de dom André Poisson, recevant un infirmier, répondait à sa manière : « Révérend Père, comment va votre santé ? » Dom Ferdinand expliqua que tout allait parfaitement bien. Puis il fît la liste de quinze infirmités qui le frappaient et qui auraient conduit un autre homme aux urgences.

Pour un chartreux, la maladie est aussi simple que la mort. Un ermite désire-t-il la mort ? Dom Innocent répond simplement : « Dieu décide. La société moderne présente la mort d'une manière peu avenante. Il faut se détacher de cette vision. Il faut accepter la nuit de la terre et attendre impatiemment le ciel. »
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Dom Patrick pense souvent aux paroles du cardinal Pierre Veuillot sur son lit de mort, après qu'il a livré un long combat contre une leucémie douloureuse : "Nous savons faire de belles phrases sur la souffrance. Moi-même j'en ai parlé avec chaleur. Dites aux prêtres de n'en rien dire : nous ignorons ce qu'elle est, et j'en ai pleuré." Devant un homme qui souffre, les beaux discours ne servent à rien. Ils peuvent uniquement satisfaire les bien portants.
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Le soir, coucher le père Andry demande plus de vingt minutes. La tentation existe de faire les soins rapidement. Quand nous répétons des tâches si difficiles pendant tant d'années, comment éviter une forme de routine déshumanisée? En cherchant à gagner du temps, on transforme le malade en un pauvre objet. Je dois être attentif à ne pas bâcler mon travail pour fuir vers d'autres occupations plus gratifiantes. Si vous veillez au coucher d'un malade deux cents fois par an, il est difficile de garder l'attention des premiers jours. Nous ne cherchons pas à nous voiler la face. Les moines de l'infirmerie doivent être vigilants à ne pas transformer un frère en une chose dont ils s'occupent machinalement, et le plus vite possible. Le risque d'une réification du malade existe. Je dois prier pour garder en éveil la force de mon désir de servir. Le père Andry, c'est le Christ. Quand nous paraîtrons devant Dieu, nous serons comptables de notre charité envers les plus faibles. Je dois savoir perdre mon temps pour les malades. Dans la vie, la gratuité est fondamentale.
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Sainte Thérèse d’Avila comparait la vie à une nuit dans une mauvaise auberge. Dom Innocent imagine quant à lui l’existence comme une nuit dans un train. : « L’important n’est pas le voyage mais le lieu de l’arrivée. Je passe la moitié de ma vie à penser à la vie éternelle. Elle est la toile de fond constante qui tapisse toute mon existence. Je n’ai pas peur de la Grande Faucheuse. Elle me rend curieux. L’éternité passe par la mort. Il faut aimer cette porte qui nous fera connaitre le Père. Nous sommes nés pour le ciel. La vie terrestre et la vie éternelle sont intimement liées. Pourquoi craindre le point de jonction entre ces réalités ? Les chrétiens ne croient plus vraiment à la résurrection des corps. Le paradis est assimilé à un vide où les âmes sont flottantes. Mais les hommes sont à l’image de Dieu. Il ne sera pas nécessaire de quitter notre humanité pour être unis à Dieu. L’éternité sera beaucoup plus humaine que nous ne pouvons l’imaginer. Nous devrions cultiver un imaginaire de la vie éternelle.
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Dom Innocent me dit avec son humour habituel que la vie serait un désastre si nous ne savions pas que la mort viendrait nous chercher un jour. Comment les hommes resteraient-ils indéfiniment dans cette vallée de larmes ? " Nous sommes nés pour rencontrer Dieu. Les vieux chartreux lui demandent de ne pas tarder. La mort c’est la fin de l’école. Après le Paradis arrive. Un moine a donné sa vie à Dieu, et il ne l’a jamais rencontré. Il est normal qu’il soit impatient de le voir. "
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Un matin, son médecin appela l’abbaye pour dire que ses jours étaient comptés. Le Père abbé de l’époque et un chanoine partirent sans tarder. Sur le chemin, l’abbé s’arrêta dans une coopérative pour acheter une bouteille de champagne. A leur arrivée à l’hôpital, le mourant était mal en point, mais lucide. En se tournant vers l’abbé, avec son ton de voix un peu perché, il lui dit : « Oh mon père, vous êtes venu, c’est trop d’honneur ! » Et l’abbé de répondre : « Mais non ce n’est pas trop d’honneur. Vous allez mourir. Je viens vous donner l’extrême onction. » Après un temps de silence, le père Vincent répondit : « Ah oui, ça s’impose. » Rassuré par sa réaction, le Père abbé sortit la bouteille de sa sacoche : « Mais après on va fêter ça ! » Le père Vincent lâcha dans un soupir : « Ah , vous y avez pensé… » Les trois chanoines sablèrent le champagne. Le Père Vincent s’éteignit en paix deux jours plus tard à l’abbaye.
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Pourtant, dans un monastère, nous ne pleurons pas pour un décès. Il ne faut pas y voir une sécheresse de nos sentiments. Nous savons où nos frères partent. Les enterrements sont toujours joyeux. Notre existence doit être un noviciat d’éternité. Toute la vie liturgique du moine le prépare aux dernières heures. Quand les moines partent, je leur demande de ne pas nous oublier lorsqu'ils seront au ciel. Parfois, je me dis que nos frères sont tellement heureux près de Dieu qu’ils nous négligent un peu. Nous sommes en communion profonde avec nos morts. Nous pensons à eux tous les jours.
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Les chanoines étaient comme des enfants sur la plage qui protègent un château de sable. La mer monte et la belle construction est condamnée. Alors les petits s’activent avec la naïveté des jeunes pirates et l’énergie de ceux qui savent qu’ils perdront la bataille. L’inéluctable arrive, l’eau monte jusqu'au cœur du château, et les murs de sable s’écroulent d’un coup, sans faire de bruit. Frère Vincent étaient un château friable, un château sur l’échafaud. Les religieux qui l’ont côtoyé ont été transformés par la souffrance de frère Vincent. Des frères fragiles et nerveux sont devenus des rocs.
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Pendant son agonie, frère Pierre lui a souvent posé cette question : « Frère Vincent, est-ce vraiment si difficile à porter ? Est-ce que vous souffrez beaucoup ? » Il répondait « oui » d’un clignement d’œil. Son angoisse, sa détresse, sa terreur faisaient mal à ses frères. Les maux physiques sont difficiles, mais les souffrances morales sont incommensurables. L’évidence de n’être plus rien, de perdre les capacités les plus élémentaires, est plus profonde encore que les grandes blessures physiques. A trente cinq ans, frère Vincent n’avait plus de rêve.
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Vous m'avez demandé si j'attendais la mort. Je n'ai pas dit oui tout de suite, pour une raison au fond évidente : ce n'est pas la porte que j'attends, mais ce qui est de l'autre coté de la porte. Je n'attends pas la mort, mais la Vie. Cela devrait être une banalité, mais curieusement, ce n'est pas si courant.
(p.220)
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