Avant d'attaquer la lecture de
Drood de
Dan Simmons, un énorme roman dont l'inspiration se source abondamment des vies de
Charles Dickens et de son ami
Wilkie Collins et de l'exploration des personnages issus de leurs romans, je me suis lancée dans cette lecture préparatoire, pensant qu'elle m'aiderait à mieux comprendre et apprécier
Drood.
Sans doute un peu jaloux du succès de son ami
Wilkie Collins en matière de romans policiers,
Charles Dickens décide sur le tard d'écrire son premier roman policier. Il ne l'achèvera pas, décédant subitement dans des conditions un peu mystérieuses.
L'intrigue de base est plutôt simple : deux jeunes gens orphelins, la ravissante Rosa Bud et Edwin
Drood sont promis l'un à l'autre depuis leur enfance, mais n'éprouvent que des sentiments fraternels. Jasper, l'oncle d'Edwin, opiomane invétéré, est secrètement amoureux de Rosa. Quand Neville et sa jumelle Helena, deux autres jeunes gens orphelins – oui, Dickens a un faible pour les orphelins – viennent s'installer dans leur ville et se rapprochent de Rosa et d'Edwin, tous les ingrédients sont réunis pour amener complications et dangers aux protagonistes de l'histoire.
Une intrigue plutôt simple au départ, des personnages en nombre étonnamment limité pour un roman de Dickens, mais le roman s'avère riche de thématiques et agréable à lire. La dimension policière est plutôt réduite, car même si plusieurs théories furent avancées après la mort de l'écrivain pour résoudre l'énigme, on devine aisément qui est responsable de la disparition d'Edwin
Drood. En tout cas, la solution proposée par
Paul Kinnet, qui a traduit le roman et l'a terminé, m'a semblée très logique et convaincante.
J'ai surtout apprécié la dimension gothique du roman, avec le portrait spectral de Cloisterham, ville fictive réplique de Rochester, quasiment construite sur l'humus issu de la décomposition des morts enfouis dans le cimetière, une ville aux nombreuses ruines – monastère, cloître -, où les corbeaux évoluent sinistrement autour d'une vieille cathédrale inquiétante... Dickens y ajoute une dimension fantastique avec Jasper, chantre de la cathédrale, hanté par le mal et les visions oniriques provoquées par l'opium auquel il s'adonne sans retenue dans des quartiers sordides. On devine que Dickens a construit le personnage d'après les souvenirs de ses promenades dans les bas-fonds de Londres.
Roman plein d'humour, on y retrouve aussi le goût de Dickens pour les personnages improbables, qu'il caricature à outrance : Mr Sapsea, dont la vacuité d'esprit n'a d'égale que sa suffisance, Deputy, l'enfant diablotin qui passe son temps à lancer des pierres sur Durdles, le marbrier du cimetière...
Une touche de féérie aussi avec le jardin suspendu et l'habitation enchanteresse de Mr. Tartar...
J'ai hâte de voir ce que
Dan Simmons a fait de ce roman...
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