L'intérêt de Kiefer pour la poésie de Celan est de loin le plus durable et le plus complexe. Du premier cycle en 1981 consacré au poème "Todesfuge" [Fugue de mort], avec ses paysages brûlés qui matérialisent des paradigmes textuels tels que la cendre, la terre, la paille ou les cheveux, aux hommages de plus en plus explicites à partir des années 2005–2006, à travers des séries ou des expositions intitulées "Pour Paul Celan" : presque toutes les métamorphoses de l'artiste passent par un détour en "Célanie". L'évocation de cette poésie d'une impérieuse beauté est devenue indissociable d'un engagement existentiel pour la mémoire de la Shoah. Par moments, la formulation répétitive de certaines images poétiques par Kiefer s'apparente à la formation de la mémoire par le rituel. C'est particulièrement le cas pour les deux paradigmes "Margarete" et "Sulamith" issus du poème "Todesfuge", exploités à plusieurs reprises entre 1981 et 1190.
(p. 36)