Écrire de feu l'eau claire
la pente du sourcil
la traque du jaguar
Écrire d'un bond ta peau
le sable des lisières
l'aube des sentinelles
Écrire sans fin de rage
de peur et de brisures
écrire de bric et de broc
de soc et de pollen
Pourvu qu'en son passage
le vent te laisse nue
à la pointe des mots.
J'ai besoin d'un attrape-rêves
pour atteindre les chemins arborés
de ton enfance
pour te prendre
herbe folle
dans la coulée des fleuves
quand des oiseaux de nuit
secouent le ciel
au-dessus de nos toits
besoin d'un attrape-rêves
pour déposer ton nom
sur les eaux de la confluence
fixer ta nudité
dans l'instant
de mes bras
quand ton visage m'apparait
comme une flèche
en son miroir
Neige
ce matin
de la main
neige caresse l’horizon
Notre mère, bogue terrestre, viens reprendre l'enfant
jeté sans retenue sur le parvis du monde
concède-lui le temps de la douceur humaine
le temps de l'eau, du pain et des fruits pour chacun
Mère terrestre,
toi qui connais la lente érosion des jours par la nuit
ne nous bouscule pas
Laisse-nous rêver des séismes de la tendresse
et fais monter le chant de mansuétude
au plus haut de l'échelle trémière
Pour que naisse l'espoir de ton ventre meurtri.
Accroché au mât de misaine de l'enfance
je t'écris comme on tendait l'assiette
pour la soupe du soir
quand les mésanges charbonnières
offraient leur ventre jaune et bleu
aux miettes de nos vitres
Je ne sais [...]
si je serai l'oiseau ou le nid de mon âme
Neige
Neige porte en elle la voie lactée
ses flocons sont des yeux d’enfants
Au matin de ta tendresse
Au petit jour un papillon
se pose sur tes lèvres
L’infime battement de ses ailes
libère les ailes de la nuit.
la nuit devient félin
dans les moustaches
de la pluie
Même vide le ventre de la femme
garde à jamais l'empreinte de l'enfant