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Critique de Unity


Avec son petit format, son nombre raisonnable de pages (200) et son sujet, Alternative Rock semble très vite un cadeau idéal pour un nostalgique de la grande époque 60/70 un peu en froid avec la science-fiction. On regrettera cependant une cible principale vieillissante pour toucher un public large. Beaucoup de jeunes lecteurs assez peu portés sur l'histoire détaillée d'Elvis ou des Beatles pourraient être déçus par les références pointues d'auteurs contemporains (ou presque) aux groupes, à la scène et aux phénomènes de mode de ces années-là. Rien sur les 80's ou 90's, pas même un avant goût du punk. Non, nous restons aux fondations du rock et, si cela a l'avantage de faire réviser les classiques, j'ai cependant regretté de ne pas rencontrer des figures auxquelles m'identifier.

Sur les cinq nouvelles, la formule n'a pas toujours pris non plus, bien que seule la première me paraisse un réel mauvais choix. En effet, le douzième album de Stephen Baxter est une entrée très abrupte dans le recueil. A coups de références très spécialisées, le narrateur essaye d'imaginer ce qu'aurait pu être le douzième album des Beatles. J'ai davantage eu le sentiment d'écouter une discussion entre fans sur-référencée et très ennuyeuse quand on ne se sent pas concerné que celui de lire une histoire dont on attend un dénouement intéressant…
En tournée, écrit à trois mains par Gardner Dozois, Jack Dann et Michael Swanwick, apporte déjà plus de légèreté bien que nous restions dans un fantasme d'admirateurs à très faible portée. On appréciera l'effort de mise en scène des personnages d'Elvis, Buddy Holly et Janis Joplin qui vont se retrouver à la croisée de leur carrière. Plutôt touchant.
Elvis le rouge de Jon Williams propose une histoire alternative où Elvis aurait refusé de s'engager dans l'armée, devenant un artiste communiste. Si le concept est amusant, je n'ai pas été réellement convaincue par l'uchronie. L'idée d'un frère jumeau décédé à la naissance (le vrai Elvis) avec lequel communique son frère m'a laissée sceptique tout le long. Je ne suis vraiment pas preneuse de ce genre de ficelles scénaristiques qui frôlent très souvent la mièvrerie. Ensuite, les conclusions tirées par l'auteur sur les conséquences de la décision d'Elvis m'ont semblées plus clichées que réalistes, et, surtout, arrivent en une sorte de résumé final qui bâcle un peu la réflexion de fond à laquelle on aurait pu s'attendre.

Heureusement, après ces trois nouvelles américaines, arrivent les anglais ! Je ne voudrais pas froisser les adeptes des auteurs outre-Atlantique, mais force est de constater que, lorsqu'il s'agit de parler rock'n'roll, les britanniques sont diablement plus dans le ton – ce qui correspond aussi à l'époque d'écriture des nouvelles, il faut le dire. Alors que les premiers gardent une écriture assez sage, des idées inspirées par le fantasme, l'admiration, les derniers y mettent la forme et le fond. Michael Moorcock n'a pas volé sa réputation puisqu'il signe avec Un chanteur mort ce qui est pour moi la meilleure nouvelle de l'anthologie. Pas le meilleur texte de sa carrière, loin s'en faut, mais en tout cas le plus fidèle à mes attentes de lectrice quand on me tend un livre sur le rock et la SF. Déjà, nous avons droit à Jimi Hendrix plutôt qu'aux Beatles et Elvis. Ensuite, il s'agit d'un road trip à l'anglaise (on a d'ailleurs droit à un taclage d'Easy Rider) avec un ex-roadie de Jimi complètement camé et le « fantôme » de ce dernier. C'est cru, ça parle de sexe, d'alcool, de drogue avec une précision qui ne relève clairement pas de l'invention. C'est cool, distrayant, et ça fait du bien.
Ian MacLeod reste dans un esprit assez proche avec Snodgrass où il nous présente un John Lennon qui, après avoir lâché son groupe au début de sa gloire, a mené une vie d'errances, de galère et de boisson. L'idée de la chute d'un musicien pendant que le reste du groupe s'élève et connaît un succès commercial est bien menée, assez universelle pour nous faire oublier le groupe dont il s'agit. le seul problème de cette nouvelle est malheureusement sa longueur assez peu justifiée. Elle nous rend enthousiaste au début, et nous lasse sur la deuxième partie.

En conclusion, Alternative Rock est effectivement un cadeau sympathique pour les non-initiés à la SF et fans de la première heure des noms légendaires du rock. La cible est à la fois trop large et trop pointue pour toucher un public de 20/40 ans réellement fan de rock, car celui-là attendrait une plus grande diversité dans les références, et peut-être cette liberté de ton que j'ai apprécié chez nos voisins britanniques, et qui manque cruellement aux américains.
C'est une jolie proposition, je suis heureuse d'avoir pu redécouvrir Moorcock, et eu l'occasion de me pencher plus en détail sur la bibliographie de MacLeod par ce biais, mais pour une convaincue comme moi, l'ensemble reste encore trop policé.
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