Si tu peux te battre contre ton futur, je peux me débarrasser de mon passé. (p. 372)
Je sors du train magnétique la gorge serrée. L'Agence du Souvenir Futur, l'endroit où je vais hériter de mon aperçu de l'avenir. L'ASoF possède des pôles régionaux dans toutes les grandes villes d'Amérie du Nord, mais Eden City étant la capitale de notre nation, la construction qui se dresse devant moi est la plus belle et la plus imposante de toutes.
Notre baiser a le goût des perles de rosée, des larmes de nouveau-né, des nuits de brume. Il a la texture des aigrettes de pissenlit, de la sève des arbres et des dards de guêpes.
- J'essaie de voir les feuilles.
- Pourquoi ?
Je passe la langue sur mes lèvres : c'est une question difficile.
- Tu vois, quand elles tombent, elles peuvent atterrir partout. Elles sont libres, et pas enfermées comme nous. J'essaie de voir où elles vont.
- Et toi, tu es qui ?
L’œil cligne.
- Tristine.
- Christine ?
- Non, Tristine. Parce que je suis toujours triste, ou que je rends les autres tristes autour de moi, à toi de voir.
- Connaître ton futur ne te dicte pas ta façon d’agir. Tu dois te faire confiance, c’est ta seule marge de manœuvre.
Non, je ne laisserai personne décider de mon futur à ma place! Je ne resterai pas spectatrice de mon propre drame, comme une passagère prisonnière d’un train qui fonce sur une voie qu’elle n’a pas choisie.
- Ah... l’amour. Merveilleux, n’est ce pas? Ça vous rend idiot et vous pousse à prendre des décisions inversées, comme saboter votre propre futur.
En bâtissant un monde sur des visions du futur, nous avons renoncé à nos rêves.
L'espoir, même irrationnel, est une force. Quand la bataille semble perdue d'avance, c'est ce qui nous permet de ne pas baisser les bras.