AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de oran


Des souvenirs lumineux, douloureux, émouvants qui osent enfin se dévoiler, une pseudo biographie consacrée à son père, le tout compose un roman où vérité solaire et fiction ténébreuse, et inversement, se croisent harmonieusement, je reprends ce qu'en dit l'auteur :
- « Quel sera le taux de menteries dans les affirmations, insinuations, divagations ici contenues…
- Tout est ici, et sera vrai… C'est à dire presque vrai, très vraisemblablement, nuancé, historiquement avéré, hypothétique, à peine rectifié à la marge… Au départ, j'envisageais un tiers d'exactitudes, un tiers d'exactitudes malmenées par le temps, un tiers de mensonges rigoureusement véridiques [...] mais, à chacun de ces tiers, se sont ajoutées des sous-divisions réservées à l'imagination, à l'énergie narrative, à la nostalgie, à l'accentuation dramatique, à la mémoire vaniteuse ou volontairement dépréciative, à la volonté de prendre une revanche sur une réalité insuffisante. »
le père, Edmond, grand propriétaire terrien, décide, en 1960, derniers temps de l'Algérie française, de construire un cinéma d'avant-garde dans sa petite ville de l'Oranie, Mascara, (ville natale d'Abd el Kader, et plus tard... d'Alain Afflelou!) à quelques cent kilomètres de la préfecture Oran. Ce sera le Vox (Plusieurs cinémas arboraient cette enseigne en Algérie, et désormais en France, quelques salles indépendantes s'honorent de ce vocable latin). Pour l'inauguration c'est Moby Dick de John Huston, un film de 1956, d'après le roman éponyme d'Herman Melville qui sera projeté. Ce choix n'est pas anodin, l'acteur principal qui incarne le capitaine Achab est interprété par Gregory Peck, Edmond en est un sosie presque parfait.
Le drame qui marque l'inauguration de cette salle de spectacle n'est qu'un évènement de plus dans cette guerre pour l'Indépendance de l'Algérie, un parmi tant d'autres qui poussera la famille Enthoven (patronyme d'origine hollandaise) à l'exil.
Je n'étais pas sans penser que ce film distingué par Jean-Paul Enthoven l' était aussi par le fait de vouloir rendre hommage à Albert Camus, dont le fantôme sympathique vient hanter quelques passages du livre.
Quand j'ai présenté ma conférence sur les multiples sources d'inspiration de la Peste de Camus, j'ai précisé que Camus avait aussi lu Moby Dick, que dans ses Carnets, il avait noté toute une série de pages (120,121,203,310,415,522…). La lutte entre le capitaine Achab et le cachalot blanc, symbolise celle du Bien contre le Mal, l'absurde et la révolte, et après tout, aussi, quelque part, l'histoire de l'Algérie.


Émue par cette lecture, j'ai profondément aimé la nostalgie qui se dégage de ces lignes, l'humour acéré qui cache tant de choses, la part de courage de l'écrivain pour affronter, d'une façon romancée ses souvenirs, pour « assumer cette part de moi que j'ai vainement tenté d'expulser, me réconciliant avec tout le tintamarre d'une enfance […] je me dirai ne te plains pas cher moi, cher sympathique JP défunt de Mascara, chéris cette tranche pittoresque d'ancienne vie, cet autrefois qui en vaut bien d'autres, car c'était bon à vivre tout ça, et peu commun..".
Commenter  J’apprécie          280



Ont apprécié cette critique (27)voir plus




{* *}