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Critique de kielosa


La nuit dernière, j'ai lu l'ouvrage d'Asli Erdogan d'un trait , comme s'il s'agissait d'un thriller.
Vu les nombreuses critiques favorables sur Babelio et surtout la superbe chronique de ClaireG, il n'y a pas grand-chose que je puisse ajouter de sensé. Sauf peut-être que je ne connaissais pas Asli Erdogan et que c'est grâce à une autre babélienne, ATOS, que je l'ai, enfin, découvert. Décidément, combien de bons auteurs et d'excellents livres n'aurions-nous, bibliophiles, pas manqué sans notre site préféré ?

Bien que je doive avouer que cela me chipote de n'avoir rien su de cette talentueuse turque jusqu'à il y a quelques jours.
Une des raisons réside sûrement dans les priorités de la presse de mon pays, qui relate fréquemment les frasques de son homonyme, le président-dictateur et les troubles, à cause de cet éminent chef d'État, dans la communauté turque de la province de Limbourg en Belgique, mais semble ignorer les écrivains méritoires de ce pays.

Ainsi, une jeune étudiante belge d'origine turque, Bilen Çeyram, a été incarcérée, en septembre dernier, lors d'une visite à sa famille à cause de prétendues "sympathies gauchistes". Une réaction véhémente de toute la presse belge, de gauche comme de droite, wallonne comme flamande, a incité les pouvoirs publics à entreprendre une action concertée et intelligente, qui lui a assuré une libération relativement rapide. Mais cela n'a pas empêché à la pauvre, pendant sa garde à vue, d'avoir été maltraitée et battue par des policiers de ce sinistre Recep Tayyip Erdogan. Comme pour beaucoup de mes compatriotes une visite à la glorieuse ville d'Istanbul est exclue tant que règne Recep Il Magnifico. Mes commentaires dans un magazine des Flandres risqueraient de me coûter des années de tôle ou même d'y pourrir, car je n'ai pas mâché mes mots pour attaquer sa politique 'éclairée'.

Depuis le coup d'État avorté l'année dernière, dont on ignore s'il n'était pas lui-même l'instigateur, ce fait a été largement exploité pour élargir son emprise sur son pays et son peuple, même les millions de turques résidant à l'étranger. Son obsession et sa haine de son ancien camarade, Fethullah Gülen, selon lui la cervelle derrière le coup, lui auront, en tout cas, permis une mainmise de la presse, et la liquidation virtuelle de toute opposition réelle ou seulement supposée. Il est impossible de donner un chiffre précis du nombre de prisonniers politiques, mais la population carcérale se compte par dizaines de milliers. En juin 2016, le grand leader à fait libérer 38.000 prisonniers, la plupart de droit commun, pour justement faire de la place aux comploteurs intellectuels.

Selon Reporters Sans Frontières, à la fin de l'année dernière 160 journalistes et 28 auteurs se trouvaient derrière les barreaux, parmi lesquels donc Asli Erdogan. C'est également le cas pour Murat Uyurkulak, connu pour son ouvrage "Tol" , Hasan Cemal, auteur de "1915 : le génocide arménien ", et de Pinar Selek, qui a écrit "La maison du Bosphore" et "Parce qu'ils sont armeniens", deux ouvrages appreciés sur Babelio.

Sans oublier que ce nouveau prophète cause de sérieux problèmes à l'Union Européenne. Encore récemment, au cours d'un entretien avec Angela Merkel (en marge du G20 à Hambourg) il a menacé de se retirer de l'Accord de Paris sur le climat, sous-entendu : s'il ne voyait pas beaucoup de sous. Il est vrai que l'important secteur du tourisme a baissé, l'an dernier, de 24,6 % en nombre de visiteurs et de presque 30 % en revenus. Turkish Airlines, considérée une des meilleures compagnies aériennes d'Europe, après des années de vache grasse, est évidemment en inquiétante perte de vitesse.
Mais davantage préoccupant est sa déclaration de vouloir restaurer la peine de mort. Il y a vraiment de quoi avoir une nostalgie à l'époque que la Turquie était dirigée par une femme, Tansu Çiller, de 1993 à 1996.

J'ai hâte de lire quelques autres ouvrages d'Asli Erdogan, comme "Le bâtiment de pierre" , "Les oiseaux de bois" et même "Je t'interpelle dans la nuit". Je termine en citant une phrase d'elle, relevé du magazine 'Diacritik' : " Je suis là, à cette heure sombre où j'aurais souhaité être ailleurs, dans un autre temps".
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