Une course contre la montre pour tenter de venir secourir un homme échoué dans le désert. Lancaster, aviateur casse-cou, voulant tenter de battre le record de la traversée du désert, s'envole alors que les conditions ne sont pas optimum.
Le récit est narré en grande partie, d'une part par René à travers les lettres qu'il écrit à sa femme et d'autre part par le cahier de bord de Lancaster, où il note chaque jour sa situation, comment il tente de lutter contre cette mort qui s'approche au fil du temps, mais aussi, son amour pour Chubbie et sa mère.
C'est un véritable cri de désespérance, quand la fin s'avance à grand pas, comptant les jours ; il faut résister avec la réserve d'eau à limiter malgré cette terrible soif qui l'assaille par des chaleurs frôlant les + 60°, sans vivres et blessé, le seul espoir de voir des secours arrivé le tient suffisamment fort pour combattre au-delà du possible. Il tente d'attirer les secours en allumant des torches la nuit tombée qu'il fabrique avec la voile des ailes de son avion (n'oublions pas l'année de ce périple 1933), il pense qu'un point d'eau est proche car un oiseau et des insectes sont passés, mais il a promis à Chubbie de ne jamais s'éloigner de son engin en cas d'accident.
Toi qui as comblé la mer de flots, les dunes de sable, le ciel d'étoiles, viens me secourir - Chant nomade
Les recherches sont lancées, mais en vain, personne ne prend le risque de s'éloigner de la piste et rien ne justifie au périple d'autre vie, de tenter l'affrontement du terrible désert Tanezrouft, même les Touaregs ne s'y aventurent jamais. Une longue étendue sans fin, plate et sans vie, ni point d'eau comme un océan de sable, pierres et chaleur que l'horizon sans fin pour tout point de repère. Une folie qui tente cette aventure de traverser cette partie du désert en s'éloignant de la piste.
René est basé au fortin de Reggane, dernier lieu de décollage de Lancaster. René décrit l'évènement de cet aviateur à sa femme, puis toute son inquiétude, ses doutes, jusqu'à l'arrivée de Chubbie l'aimée de Lancaster elle-même pilote. A travers son récit, nous avons une version des faits, des secours qui ont été entrepris, et puis aussi cette vision du désert. René dit qu'il s'y ennuie mais il ne peut imaginer reprendre une vie de tout à chacun, après avoir connu cette vie, perdu dans cette immensité, il mesure sa chance d'avoir pu connaitre l'Afrique, et compte profiter de cette opportunité de vivre autrement qu'en France et se contenter d'un train-train monotone. Il demande à sa femme de venir le rejoindre après sa mission et parcourir les contrées africaine. le refus de sa femme le déçoit et ne comprend pas qu'on puisse se contenter de vivoter et ne pas profiter de cette vie si riche et pleine de découvertes et d'expériences. Il lui écrit “je ne comprends pas comment tu peux refuser l'Afrique pour quelques pintades” . Tout bascule dans sa tête, et la présence de Chubbie qui tente tout pour venir secourir son amour à ses risques et périples le bouleverse, il finit par partir avec elle.
Les articles de journaux nous donnent des informations succinctes, les lettres diverses en réponse à Chubbie qui se démène pour trouver un avion, nous dépeignent le portrait de Lancaster et nous met au fait d'un procès dont il a été le suspect numéro un.
Que ça soit sa famille, ses ennemis, Chubbie ou René, nous avons tout un ensemble de son de cloches, et sur Lancaster, seul perdu , blessé dans le désert : Lancaster qui crie sa rage de vivre et combien la vie devient importante quand on est sur le point de la perdre. Il demande à Chubbie de renoncer à l'aviation , de ne pas mettre sa vie en danger pour le ridicule d'un exploit de record. C'est toujours dans des moments ultimes, graves qu'on mesure l'importance des choses vraiment essentielles et toutes celles qui deviennent complètement dérisoires voire “du n'importe quoi”…
Jour après jour, nous vivons ce drame par le cahier de bord de Lancaster, on ressent toute son inquiétude, son angoisse, sa détermination à lutter puis sa résignation. On frémit, on le soutient, en vain :
« Je ne veux pas mourir, je veux désespérément vivre. J'ai l'amour d'une bonne maman, et papa, et une fiancée… »
Il égrène ses pensées profondes, son amour pour ses proches pour la vie et tient absolument retranscrire et transmettre ses dernies instants à Chubbie et sa mère pour qu'elles sachent qu'il a lutté jusqu'au bout de ses forces pour elles mais surtout, surtout ne rien regretter. La fin m'a émue énormément par les derniers mots de Lancaster :”Maman chérie, ceci m'a été d'un grand réconfort jusqu'à la fin. “ ces mots étaient notés au dos d'un poème écrit par sa mère que voici :
Il restera quelque part, dans un ciel de souffrances, le souvenir de ces années, une étoile presque invisible que je regarderai, car je saurai qu'elle abrite, dans la beauté de son silence, la vie que j'ai aimée… MME LANCASTER avril 1933
Lancaster sera retrouvé bien des années après cet accident en 1962, son carnet de bord retrouvé, son exploit fut-il vain, futile ou ridicule, à mettre sa vie en danger, en briser d'autres… le dérisoire de 'l'Homme à vouloir se mesurer à l'impossible rêve.
Un superbe livre qui nous invite à méditer sur le sens de notre vie, ne pas la laisser s'échapper dans un train-train monotone mais ne pas non plus la même en périple pour la gloriole qui sera vite dépassée, oubliée… Savoir trouver un juste équilibre entre sagesse et déraison. Un chant d'amour qui s'élève, une rage de combattre, un récit prenant et très touchant… Magnifique !
Le livre contient des photos, des articles de journaux amplifiant le côté dramatique du sujet, on se sent projeté en 1933 suivant le fil de l'actualité en décalé
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http://lesmotsdepascale.cana..