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Critique de berni_29


La légende dit que William Faulkner aurait écrit ce roman, Tandis que j'agonise, en six semaines, en 1929.
Nous sommes dans le Mississipi, dans les années vingt. Dans cette atmosphère étouffante, je découvre une famille de paysans humbles, qui récolte le coton.
Il s'agit d'un récit polyphonique qui met en scène une famille de paysans bouleversée par ce qui arrive à leur mère, Addie Bundren, celle-ci s'apprête à mourir. Autour d'elle il y a Anse, le père et les cinq enfants.
L'auteur bouleverse ici les codes de la narration classique, convoque les personnages à travers une succession de monologues intérieurs.
Chaque personnage cache en lui un secret douloureux ou dérisoire.
Les voix des enfants sont différentes, certains sont submergés par la colère, d'autres par la tristesse et la douleur, certains par une poésie onirique. Ah ! Comme j'ai aimé la voix touchante de Vardaman...
Lorsque le roman débute, la mère n'est pas encore morte. Elle est mourante, elle est entourée de sa famille, elle est consciente, elle agonise, tandis qu'elle sait qu'elle va mourir, elle a cependant décidé d'orchestrer la fin de sa vie en demandant à son fils ainé Cash de lui fabriquer son cercueil, quasiment sous ses yeux, là-bas dans le hangar où est entreposé le coton après la récolte.
En prêtant l'oreille, dans les mots que nous délivre Faulkner, on pourrait presque entendre Cash scier, clouer, raboter... tandis qu'Addie Bundren respire difficilement, agonise...
Ce roman est une magnifique symphonie des adieux, ce sont des paysans bouleversés par la mort de leur mère.
Le silence est la base de ce roman, c'est son fondement.
Les personnages sont des gens rustiques, des taiseux, ne se parlent pas entre eux, et qui ne parlent que lorsqu'ils sont seuls ou à distance. On les sent en proie à une profonde solitude.
Il y a quelque chose de théâtral, une poésie charnelle et crépusculaire dans cette lumière du Mississippi.
La parole des uns et des autres scelle des mots, des pensées, des images, tandis que Cash scie, cloue, rabote.
Autour du cadavre de la mère, les monologues intérieurs recomposent les vies de chacun, jusqu'au point final.
Ce sont des personnages perdus dans une terre brûlante et aveugle.
Addie Bundren exprima le souhait de se faire ensevelir à quarante miles de là sur la terre de ses ancêtres.
Anse Bundren, son époux et ses cinq enfants entreprennent alors un voyage funéraire pour aller enterrer la mère sur le lieu de son souhait.
Sous un ciel orageux, le convoi s'en va.
Alors des images saisissantes viennent, une charrette tirée par des mules affolées par les flots de la rivière qu'il faut traverser tandis que les ponts ont été chavirés par le tumulte des flots, une grange qui prend feu...
Plus tard, passer de l'autre côté de la vie n'empêchera pas Addie Bundren de parler.
La voix d'outre-tombe d'Addie est vibrante d'émotion. C'est le cri d'une femme qui révèle sa douleur d'épouse qui fut. Elle dit sous la tombe enfin scellée ce que sa vie fut de souffrance et d'un manque d'amour.
La terre obscure du Mississippi n'empêche pas sa voix de venir à nous, grâce à l'écriture somptueuse de William Faulkner, avec un ton féministe qui m'a touché.
De nombreux artistes ont encensé ce très beau roman : Valéry Larbaud, Jean-Louis Barrault, David Bowie... Ils ont eu mille fois raison d'aimer ce texte éblouissant.
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