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Critique de Patsales


Ça commençait bien.Départ immédiat. Destination solitude (pas tout à fait d'ailleurs, si l'on tient compte des souris), "simplicité volontaire", avec curseur pointé sur congélation. Partir pour se tester, check-up autonomie: de quoi peut-on encore être capable sans béquilles technologiques, avec une hache pour fendre la glace et trouver de quoi boire?
Survie et littérature, Anne Hébert en éclaireuse, Félix Leclerc en rabatteur: notre héroïne emprunte parfois les mots des autres et tient le froid à distance en égrenant tout ce qu'elle abandonné depuis qu'elle s'est encabanée: "L'asphalte, les pelouses taillées -vous savez, ces haies de cèdres torturées-, l'eau embouteillée, la propagande sur écran, la méfiance entre voisins, l'oubli collectif de nos ancêtres et de nos combats, l'esclavage d'une vie à crédit et les divans sur lesquels on s'incruste de fatigue. La ville encrassée où l'on dort au gaz dans un décor d'angles droits."
Mais comme il fait toujours très froid, que les coyotes regardent l'intruse d'un sale oeil et que la hache mal apprivoisée a transformé son visage en "un barbeau de couleurs blessées", voilà notre narratrice obligée d'en remettre bien des couches pour se souvenir qu'elle a de bonnes raisons de s'infliger ça. En guise de guide de survie, le lecteur marri se retrouve bientôt à survoler la plate complainte de la Montréalaise shootée aux implants mammaires et régimes amaigrissants, symbole du monde décadent que Gabrielle Filteau-Chiba a fui. de Anne Hébert, on dégringole dangereusement vers le blog d'adolescente: "Je cherchais des yeux un endroit où m'éclipser, comme un animal blessé se tapit dans l'ombre, mais il n'y avait que du béton partout." Non, non, Gabrielle, il n'y a pas que du béton: beaucoup de gros clichés, aussi.
Des clichés et de la dissertation. Alors, thèse: la civilisation c'est pas bien. Antithèse: la nature, c'est froid. Synthèse (priez pour nous): un bel activiste pourchassé passe par là, la culbute (alors qu'avec la température, il devrait réalistement n'avoir qu'un petit zizi tout ratatiné), fend son bois, déneige le panneau solaire, redémarre la voiture, et hop, notre héroïne est désormais remise sur les rails de sa vie: "Enfin, j'avais découvert le sens à ma vie de féministe rurale: me dévouer à la protection de la nature corps et âme."
(Féministe parce que, même si elle a besoin d'un homme pour déneiger son toit, elle a "brûlé (s)on soutien-gorge et ses cerceaux de torture". Pauvre choupinette, va.)
Sinon, le Don Juan de la toundra a un peu tué quelqu'un et c'est vraiment triste parce que, du coup, il risque la prison.
Je suis moi-même très abattue sur ce coup, ça me ferait presque croire que Sylvain Tesson c'est Victor Hugo. C'est dire.
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