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Citations sur Liaisons périlleuses au Costa Rica, tome 1 (3)

Pendant que mon corps se consume en efforts et mon âme en regrets, je ne remarque pas les racines en travers du sentier. Je m’étale de tout mon long. Le cri strident d’un singe hurleur ponctue ma chute. Heureusement que j’avais pris soin de ranger mon appareil photo dans mon sac à dos.
Je relève péniblement le front et j’aperçois mon guide campé devant moi, sa machette à la main. Bombant son torse musclé, il me toise de toute sa hauteur.
Âgé d’une quarantaine d’années, il paraît plus vieux avec son teint hâlé par le soleil des tropiques. Sans ses fossettes aux joues et au menton, il aurait presque l’air sévère tant ses yeux d’un bleu sombre me foudroient d’éclairs. Mais ses lèvres plissées en un sourire équivoque adoucissent ses traits anguleux. Je suis sûre qu’il se moque de moi. Pour la première fois depuis notre départ de San José, j’entends sa voix grave et mordante. Et avec elle, une douleur fulgurante me transperce la cuisse.
— Décidément ! Vous tenez absolument à me baiser les pieds.
— Cessez vos âneries et venez m’aider, rétorqué-je aussi sec. Je crois bien que je me suis blessée.
— Ah, ces Parisiennes ! Des aventurières hors pair !
Sur ces mots, il s’accroupit près de moi. Il attache sur ma personne un long et ironique regard, repousse négligemment en arrière les mèches châtain clair de ses cheveux, puis finit par me désigner du doigt un serpent jaune embusqué sous des fougères. Je tressaille de terreur en le voyant si proche de moi.
— Vipère de Schlegel ! De la famille des Viperidae. C’est une espèce endémique d’Amérique du Sud. Très agressive ! Sa morsure tue en huit heures ! Vous avez eu beaucoup de chance de ne pas tomber sur elle. Elle ne vous aurait pas loupée !
S’il croit que je vais me laisser impressionner par son déballage de savoir, il se trompe. Finalement, je préférais lorsqu’il était moins bavard. Je fais un mouvement pour me redresser, mais un tiraillement dans la cuisse m’en empêche. Mon guide secoue la tête en signe de désapprobation. Son air de raillerie m’exaspère au plus haut point, mais je le laisse me saisir par les aisselles.
Tandis qu’il me soulève de terre, tel un misérable fétu, la douleur dans ma cuisse éclate et irradie dans toute ma jambe. Cherchant à réprimer le cri qui libérera mes tensions, je m’agrippe à ses vêtements et plante mes ongles dans sa chair. Une grimace au coin des lèvres, il me remet debout, mais au lieu de desserrer son étreinte, il me garde contre lui.
— Lâchez-moi ! lui dis-je, les doigts crispés sur sa chemise.
Avec des gestes lents et précis, il enlève la boue qui recouvre mon visage. Je n’ose pas bouger. Il est si près de moi que je sens contre ma joue le souffle haletant de sa respiration.
— J’ai pourtant l’impression que vous vous plaisez dans mes bras.
Il plonge ses yeux dans les miens. Ses pupilles dilatées me font part de ses intentions coupables. Mince alors ! Il est vraiment beau, ce corniaud !
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Aiguillonné par le désir de l’agacer davantage, je me campai à un mètre d’elle et, tout en secouant la tête énergiquement pour chasser le sable de mes cheveux, je me lançai dans un discours scientifique sans fin visant à lui faire perdre patience. J’étais persuadé qu’elle ne tarderait pas à se jeter sur moi, mais cette fois-là, je ne lui laisserais pas le choix des armes. Je la renverserais en arrière, me coucherais sur elle et sans lui demander son avis, je récupérerais mon dû.

— Parmi les trois espèces qui viennent pondre en juin sur les plages du parc de Tortuguero, nous avons la tortue verte, dite aussi tortue franche. C’est la plus grande de toutes. Elle peut mesurer jusqu’à un mètre cinquante et atteindre les trois cents kilos…

Je la vis serrer les poings, signe que je ne devais pas l’approcher. J’adoptai donc un ton neutre et professoral, attendant patiemment qu’elle s’énervât davantage.
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Juste un grand froid sur mes muqueuses à vif ! Je ne ressens plus la caresse de ses lèvres ni le baiser de sa bouche humide, pas plus que la pression constante de ses mains sur ma peau. La douce et belle Diane, qui s’apprêtait à me combler, vient de rompre les amarres, me ravissant ainsi la jouissance et le panache.
Inquiet de ne plus la savoir près de moi, j’entrouve mes paupières encore brûlantes. Peut-être a-t-elle succombé aux délices de son art ? Elle sera certainement couchée à mes pieds, languissant du désir de me voir parachever le travail qu’elle a si bien commencé. C’est alors que je l’aperçois, plantée à quelques mètres de moi, les mains sur les hanches, le buste en avant. Elle est superbe, tout simplement superbe !
Les yeux brillants de furie, elle me regarde avec un air de défi. Aïe ! Je ne connais que trop bien ce sourire mauvais qui se dessine sur sa bouche.
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