AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
3,34

sur 16 notes
5
2 avis
4
2 avis
3
1 avis
2
1 avis
1
0 avis
Un wagon plein d'hommes et de femmes. Un enfant isolé. Un narrateur qui raconte tout ce qu'il voit. Une femme rousse qui évoque le puissant souvenir de son amant. Un homme brun qui n'a jamais porté l'étoile. Des plaintes en yiddish. Des injures en allemand. Des odeurs atroces. Des cadavres. Un voyage vers l'oubli. « Je sais maintenant qu'on ne reviendra pas, il faudrait un miracle pour retourner là-bas, se réveiller du cauchemar, l'indicible se rapproche, nous avons été projetés dans un autre monde, fait de nuit de soif et de froid, on ne saura plus rien de nous. » (p. 24 & 25)

Le chant d'amour de la femme rousse est bouleversant. Il capte des bribes de la tragédie environnante et n'en devient que plus puissant. « Sors-moi de cet enfer, aide-moi, souviens-toi, mon amour. » (p. 44) La frénésie sensuelle qui s'empare de sa mémoire se heurte à l'abjection qui roule vers l'Allemagne. le souvenir de la jouissance est désespéré. La polysémie du titre est troublante : transport vers la mort et transport amoureux. La rencontre d'Éros et Thanatos est un combat de titans. « Mon amour, mon amour, je t'aimerai dans les retraites secrètes où te conduiront la haine et la désillusion, l'injustice, l'ignorance, je t'aimerai dans la tourbe, la boue, le sang, la vermine, la pestilence. » (p. 87) Dans ce cantique délirant de sensualité et de terreur, il y a la certitude de la disparition et de l'inéluctable. Avec eux viennent les regrets et naissent des rêves qui ne fleuriront jamais.

J'ai lu des dizaines de textes sur la Shoah, écrits par des survivants, des descendants ou des artistes. Transport est une merveille du genre, si tant est que l'on puisse parler de genre pour cette littérature née de la destruction et de l'urgence. Il n'y a pas d'accusation, pas de dénonciation, juste la capture sur le vif d'une humanité en souffrance et en mouvement vers nulle part. Son désespoir et son anéantissement donnent la mesure de ce qui attend l'homme. « Qu'allaient-ils faire de nous ? Qu'allaient-ils faire d'eux ? » (p 104) le premier roman d'Yves Flank se lit dans un souffle suspendu, retenu, bloqué. Parce qu'expirer, c'est déjà lâcher la main de ceux qui sont montés dans ce wagon.

Si vous êtes sensible à cette littérature et à cette tranche d'histoire, je vous recommande l'époustouflant À pas aveugles de par le monde de Leïb Rochman.
Commenter  J’apprécie          110
Peut-on dire aujourd'hui qu'on n'a pas aimé un livre sur la Shoah ? La langue y est malheureusement pour moi très factuelle. J'ai eu du mal à croire aux plaintes de chacun. Encore moins à celles de la femme rousse. On est très loin de Imre Kertesz.
Commenter  J’apprécie          40
Transport, un livre coup de poing !
Un livre fort où la mort rôde et où l'on se raccroche à la vie, à ses souvenirs, où l'amour tente de braver la mort inéluctable. Une grande claque !

Dans le wagon à bestiaux qui les conduit vers la mort, un homme se souvient, une femme revit sa passion amoureuse, petits instants suspendus, petits échappatoires, un peu de poésie dans ce cloaque.

Parfois, un livre vous attire irrésistiblement. Tapi, bien rangé sur les étagères de la médiathèque, ce tout petit livre a attiré mon regard. Son titre, sa couverture, allez savoir !
Et puis, très très rapidement, un oeil sur le dos et dans ma tête un mot s'est imposé à moi : poésie.
J'ai beau lire et relire le résumé maintenant pour le besoin de cette critique. Il n'y apparaît pas.
"Mon amour, mon amour, ô mon amour, maintenant je crie en plein visage.. "
Cette citation bien sûr. Elle est au dos.
Il s'est imposé à moi et je m'en suis emparée ce matin. Une lecture ininterrompue, de quelques heures, en apnée, et voilà déjà terminé !
Il y a des textes qu'on n'ose pas interrompre. Celui-ci en est un.
D'autant plus que sa construction est particulière.
Le premier chapitre étant fort éprouvant, il me fallait passer au second.
Le second chapitre, prière désespérée, hymne à la vie et à l'amour, accolée aux mots de la réalité, me remuent tant qu'il faut que je passe au suivant.
Le chapitre trois et les souvenirs de l'homme brun, m'en apprend plus sur lui, sur eux. Mais qui est-il ? Notre narrateur du début ? La gorge serrée, je ne sais pas si le premier chapitre est finalement le plus dur. Il faut que je poursuive .
Le chapitre quatre est un rêve. La mort s'approche à grands pas. Les souvenirs assaillent, enveloppent, bercent. Ce dernier chapitre m'apaise enfin. J'ai fini.

Mon avis

Un tout petit livre qui peut se lire d'une traite et je le conseille car le sujet est poignant, difficile à supporter même le premier chapitre est parfois insoutenable. Loin très loin, de la poésie que je pensais trouver. de la peur, de l'angoisse, des blessés, des morts, ni eau, ni nourriture, sans toilettes, les conditions inhumaines de ce "transport" ne laissent aucun doute sur la destination finale. Des pages dures, des descriptions terribles, perte d'espoir, perte de dignité, ...
Puis ce second chapitre, étrange, dérangeant également, indigne par son sujet qui ne devrait pas être accolé au reste. Mais au fond, ce n'est que la vérité crue.
Lorsque la mort plane autour de nous, nos corps luttent et se réveillent parfois avec brutalité. Ainsi la femme rousse revit une passion amoureuse, intensément. Les images sont parfois crues. Autant de scènes d'amour pour se raccrocher à son être, à la vie, un instinct de survie.
L'homme brun lui, revient sur les évènements qui ont précipité ce drame, se questionne, puis devant l'inéluctable, choisit également d'agréables souvenirs.
Et l'écriture, l'art, les mots, pour perpétuer la mémoire, pour faire revivre l'espace d'un instant ces hommes et ces femmes.

Ce texte rend hommage aux victimes de l'holocauste. L'auteur le dédie à ses grands- mères.

Je rajoute, à posteriori, un avertissement tout de même à ma chronique. Ce texte est assez éloigné de ce que l'on peut lire sur ce sujet. le premier chapitre, décrivant les heures du transport est brutal, très cru par ses détails. le second chapitre l'est également à sa manière, mais ici il s'agit d'amour, mais de l'amour physique, un long chapitre de scènes de sexe, qui peuvent aussi choquer par leur présence. Ce chapitre m'a interpellé. C'est sans aucun doute son rôle, faire des allers retours entre déchéance et ignominie, et, manifestation de la vie à travers des scènes osées, pas forcément attendues dans un tel livre. Ça remue, ça questionne et on peut être choqué.

Premier roman époustouflant !
Commenter  J’apprécie          20
Quatre parties pour ce court roman de 133 pages.
1) le cri de l'homme brun assis au fond du wagon : très factuel, il décrit le calvaire des déportés dans les wagons . Deux personnages semblent plus forts que les autres, l'homme brun et la femme rousse.
2) le cantique de la femme rousse : comme un appel au secours, "sors-moi de cet enfer", "mon amour, mon amour", la femme rousse revit son histoire d'amour.
3) le récit de l'homme brun qui n'a jamais porté l'étoile : il revit sa vie d'avant, les deux mois précédents,la dénonciation et son arrestation, Drancy, la longue attente et le départ.
4) Les rêves de l'homme brun qui n'a jamais porté l'étoile : il rêve (dans le wagon ?) jusqu'à la faiblesse extrême.

Entre réalité, souvenirs et rêves, Yves Flank nous livre un récit étrange, poignant.
Commenter  J’apprécie          10
Commenter  J’apprécie          10
Commenter  J’apprécie          00

Lecteurs (33) Voir plus



Quiz Voir plus

Retrouvez le bon adjectif dans le titre - (2 - littérature francophone )

Françoise Sagan : "Le miroir ***"

brisé
fendu
égaré
perdu

20 questions
3666 lecteurs ont répondu
Thèmes : littérature , littérature française , littérature francophoneCréer un quiz sur ce livre

{* *}