Fut un temps où je croyais qu'une vie bien menée, c'était une vie bien remplie, fut-ce avec des conneries. J'avais alors eu l'idée d'intégrer le martinisme. Comme je n'avais pas d'emploi stable à l'époque, je pensais surtout que ça me permettrait de bénéficier du piston et de sortir de la fatalité qui semblait alors me condamner à la mise en rayon en grande distribution.
Non pas. Les réunions se déroulaient en petit comité de cinq ou six personnes, presque toutes retraitées. le piston semblait, dans ce cadre, limité. Nous entrions dans la salle à manger, dont la table avait été recouverte d'une nappe blanche et de chandeliers alignés de façon à former ce qui devait être, sans doute, le sceau de Salomon, ou quelque chose du genre. Nous parlions de sujets divers et avariés tournant autour du symbolisme, des couleurs, de la physique quantique, de
C. G. Jung. Quelques rituels mystiques se sont déroulés. La séance dura environ une heure, suite à quoi nous atterrîmes dans la cuisine. Une tarte aux pommes nous attendait. La maîtresse des lieux, grande officiante martiniste, nous en découpa des parts tout en évoquant les premiers exploits de ses petits-enfants en bas âge.
Ces souvenirs évoqués d'un autre temps ressurgissent à la lecture du livre de Gallois. le vide y est recouvert de savantes couches de mots qui ne désignent, à tout bien y regarder, rien. Les idées se suivent, dépourvues de liens. Aucune logique ne préside à l'ensemble, sinon celle de l'association arbitraire de pensées. Judaïsme, christianisme, islam, hindouisme, mythologie grecque, s'enfilent les uns après les autres dans le syncrétisme le plus insignifiant. Donnons un exemple de cette merde infâme vouée à l'égarement New Age :
« Au sujet des vertus théologales, particulièrement celle de la foi, disons que l'activité des corps sublunaires n'est pas efficiente, mais cause instrumentale de celle des sphères ».
Tous ces textes pseudo-spirituels sont désespérément vides. Sur des centaines de pages, Gallois ne fait rien d'autre que nous seriner une idée unique, qu'il décline sous différentes formes à peine distrayantes : la Gnose désigne la connaissance de l'esprit divin en soi et le chemin qui mène vers cette fusion originelle que nous avons perdue depuis des temps immémoriaux. L'amour (imaginaire) nous est prêché en insistant sur le dégoût que notre condition actuelle devrait susciter.
Parmi les blagues contenues dans ce livre, citons par exemple celle-ci : YHWH serait venu de l'espace et en conséquence, le peuple juif ne serait pas terrestre, ce qui expliquerait qu'il subisse depuis toujours le martyre sur cette planète.
Si vous voulez lire d'autres conneries de ce genre, je vous laisse vous hâter en direction de ce livre. Vous pourrez peut-être vous faire pistonner dans des groupes ésotériques. Ce n'est pas parce que ça n'a pas marché pour moi que ça ne fonctionnera pas pour d'autres.