AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de florigny


Observateur sensible du quotidien, liant poésie et réalisme, styliste du détail juste, Pascal Garnier met en scène des vies minuscules, celles du voisinage et des souvenirs d'enfant qui tissent nos mémoires, qui sous l'effet d'un pas de côté ou d'un croche-pied du destin déraillent de l'ordinaire vers l'extraordinaire, de la normalité vers l'horreur. L'auteur a quitté l'école et sa famille à 15 ans, sillonné sans un sou la planète une décennie durant. Il écrit le plus souvent au présent avec un stock de mots usuels mais choisis avec méticulosité, parce qu'il craint la syntaxe et l'orthographe. A cause, ou grâce à ces contraintes liées à ses lacunes scolaires, il a légué à ses lecteurs une oeuvre puissante, émouvante, intemporelle, à hauteur de monsieur ou madame-tout-le-monde.


Les hauts du bas n'échappe pas aux thèmes de prédilection de Pascal Garnier. Dans son style grinçant, simple et corrosif, son humour noir vitriolé, il exprime une fois encore sa vision désabusée, pessimiste du monde, mais toujours infiniment tendre. Il crée ici deux personnages représentatifs de sa bibliographie, qui n'avaient aucune chance de se rencontrer sans son intervention romanesque. Ce roman dont le titre est explicité en cours de route, décrit la vertigineuse descente aux enfers d'un couple discordant. Edouard est à 75 ans diminué par un récent avc. Thérèse, infirmière encore en activité, lui sert de dame de compagnie, de bonne à tout faire, vraiment à tout faire. le futur ne fait plus partie des projets d'Edouard, qui vit l'incommensurable monotonie des jours en marge du monde et de ses réalités ; une splendide vue sur la Drôme provençale où il vit le fait forcément penser aux crimes de Lurs, question optimisme il y aurait à dire ! Mais peut-on être optimiste si l'on est lucide ? Thérèse, grâce à son travail a acquis une facilité d'adaptation exceptionnelle, se sent bien dans un cadre stable défini. Ses relations avec les hommes se sont passées aussi vite qu'on décapsule une bouteille avec les dents, éteignant définitivement en elle ses rêves les plus ardents. Même si Edouard est odieux, elle sait comment le manoeuvrer. Chacun d'eux trouve dans leur attelage dépareillé, des bénéfices secondaires au-delà de leurs incompatibilités.


Sans famille, sans enfants, sans amis, leur passé est triste, leur présent catastrophique, mais par bonheur ils n'ont pas d'avenir. Comme le dit en exergue Dorothy Parker « La meilleure façon de ne pas se perdre, c'est de ne pas savoir où l'on va ». Ils ne savent pas où ils vont et y vont ensemble. Ils se lancent dans un road-trip, Rémuzat, Lyon, Genève et terminus... sans se justifier, sans se chercher d'excuses puisque la vie – ou ce qu'il en reste - est la plus formidable des excuses... Pas de happy-end à espérer. Pascal Garnier broie du noir, et déclenche un rire jaune chez le lecteur, conscient de reconnaître dans le miroir tendu par l'auteur quelqu'un qui pourrait bien lui ressembler, aujourd'hui ou demain. J'adore Pascal Garnier.
Commenter  J’apprécie          185



Ont apprécié cette critique (18)voir plus




{* *}