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Critique de enjie77


Je ne regarderai plus jamais volés les cerfs-volants dans le ciel de Cabourg comme auparavant!
Ce roman est sublime, tellement beau que j'ai peur de l'abimer en émettant une critique dont les mots ne peuvent retranscrire l'intense émotion que j'ai ressentie à certains passages de ma lecture. J'y ai retrouvé l'écriture délicate, teintée d'humour mais aussi de beaucoup de tendresse, de gentillesse de Romain Gary.
Les cerfs-volants nous accompagnent tout au long de ce récit, ils deviennent l'expression du dialogue intérieur du facteur, Ambroise Fleury, voire le reflet des états d'âmes d'une certaine France (je pense au cerf-volant à l'effigie de Pétain retenu par un allemand, à l'interdiction de faire voler les cerfs-volants qui ne peuvent plus toucher le bleu du ciel mais restent figés au sol : une manière d'interdire toute élévation de l'esprit). Ambroise Fleury, oncle et tuteur du narrateur, passe aux yeux de tout le monde pour un gentil illuminé avec ses cerfs-volants à l'image de Rousseau, Montaigne, Jaurès, Hugo. Son neveu, Ludovic dit "Ludo", dix ans, rencontre son premier amour et unique amour, Lila, jeune aristocrate polonaise qui passe ses vacances avec ses parents dans leur manoir. Nous sommes au début des années trente mais la tragédie de la guerre s'approche. Ludo et Lila vont se trouver séparer par les évènements. La mémoire impressionnante de Ludo sera comme le fil qui retient le cerf-volant, un lien unique qui les reliera malgré le temps et les épreuves - rien ne leur sera épargné - il y aura des lâcher-prises et des retours mais jamais de rupture : la noblesse de leur coeur vaincra. Dans ce roman, il y a toute une palette de personnages truculents et des scènes cocasses mais c'est toujours raconté avec beaucoup de bienveillance.
Le livre ouvre sur "A la mémoire" : Ce cher Ambroise rejoindra le pasteur André Trocmé à Chambon-sur-Lignon pour aider les protestants des Cévennes, et bien sur, ce fou de Ludo participera activement à un réseau de résistance.
Le livre parut à la veille du 40ème anniversaire du 18 juin et le mardi 2 décembre 1980, Gary se suicidait. J'ai essayé d'entrevoir une justification à son acte : je n'ai rien relevé si ce n'est, comme dans ses autres romans, cette douleur qui transparait dans ses écrits devant la monstruosité de la guerre, l'impossible rêve de fraternité, l'absence du "Namasté" du yogi qui se situe au niveau du coeur.
J'ai retrouvé dans le livre de Myriam Anissimov "Romain Gary, le caméléon" page 626 :
"Gary expliqua le 15 juin à Pierre Macaigne qui lui demandait si les cerfs-volants du facteur Fleury étaient de simples allégories : "C'est le sort des belles idées qui se cassent la gueule dès qu'elles touchent terre"
Plus bas, il a ajouté cette phrase qui m'a interpelée "Les cerfs-volants était né dans le même climat qu'Education européenne. Tous deux étaient des livres de combat".
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