Le premier volume de l'Histoire intime de la Ve République ne m'avait pas convaincu. Giesbert évoquait une époque et des personnages qu'il n'avait pas connus; c'était un travail de compilation que, finalement, il avait visiblement traité comme une corvée.
Avec ce deuxième volume, il entre de plain-pied dans un domaine qui lui est familier et où il peut se mettre en scène. Giesbert a pratiqué le journalisme de connivence, avec plus de perspicacité, d'ironie et de recul que
Michèle Cotta, Duhamel ou Elkabbach.
De Gaulle et Pompidou ne trouvaient guère d'intérêt à la fréquentation des hommes de presse. Giscard se montrait trop hautain. Barre, Balladur, Jospin se méfiaient.
Mitterrand et Chirac ont été les premiers hommes politiques à rechercher la proximité avec les journalistes. Ils ont été suivis, dans une certaine mesure, par
Sarkozy et surtout par ce pauvre
François Hollande qui a été victime de ce tropisme.
Giesbert a longtemps servi d'alibi "centriste" à la rédaction gauchisante du Nouvel Obs. Il cachait son jeu, tout en admirant les patrons que furent
Pierre Bénichou et
Jean Daniel. Il en dresse des portraits piquants, lucides et parfois attendris. En revanche il a la dent dure contre Mendès-France dont il fut le nègre. Contre
Sartre "Fouquier-Tinville du Café de Flore". Contre le terrorisme intellectuel des maoïstes délirants qui peuplaient notamment la rédaction du Monde. Contre les sinistres trotskystes dont subsistent quelques exemplaires à la France Insoumise.
À la différence des livres de souvenirs de J-F Kahn ou J-P Elkabbach, La Belle époque est une lecture enrichissante, parfois teintée de nostalgie. Il prend fin en 1981 "avant l'entrée dans le toboggan", ce qui en dit long sur l'état d'esprit de Giesbert.