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Citations sur Le Bruit des tuiles (16)

« Je ne veux pas recommencer à vivre là-bas comme j’ai vécu ici. Ailleurs sera mieux car ailleurs est toujours mieux. » (p. 78)
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On ne vit pas dignement dans un milieu qui a été trop longtemps corrompu.
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Quelques instants de satisfaction intérieure et puis, repoussant une mèche de cheveux ou se frottant les yeux avec la paume des mains, il retrouve des pensées plus mélancoliques, presque sinistres, qui lui permettent progressivement de chasser l’enthousiasme de mauvais aloi, la vision et l’intuition du bonheur achevé pour parvenir à la difficulté, à tout ce qu’il faudra faire. Les choses concrètes qu’il faut dire. Il manœuvre avec lui-même, marmonne et s’enjoint silencieusement à de l’austérité, de la sobriété avec quelques petits trucs qui produisent toujours chez lui un vif effet : les sermons des prêtres sur les tombes des enfants morts, la brume, le souvenir de certains cours magistraux faits par de vieux enseignants chevrotants et en habit, leurs mains tremblantes. Et surtout, ne pas se laisser aller à ce qui fait les miracles, le scintillement, les solutions aux problèmes trouvées dans un écart de la pensée, par hasard. Ne pas oublier le bruit de tuiles que l’on brise une à une, ces bruits de toits qui s’écroulent.
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Lorsque Considerant pensait, disait Réunion, même en chuchotant la nuit dans son lit pendant des insomnies, tout apparaissait, les maisons, les champs, les élevages, les petites industries; la joie aussi.
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« Ce qui l’a le plus surpris, c’est que personne ne lui ait dit que le malheur devait se prévoir. » (p. 265)
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« Au fond le langage lui fait défaut pour formuler le vide. Acculé à la honte, devant l’effondrement ou plutôt devant ce qui ne s’est jamais vraiment construit, il ne trouve rien d’autre que du vide à reformuler, de vieilles idées fades et collantes comme un vieux bonbon à ressasser. » (p. 196)
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C’est à cause du bruit des tuiles qui se brisent, de la peur des toits qui s’écroulent, qu’il n’a pas voulu faire comme eux. Il n’aurait pas pu supporter de vivre avec cette approximation, cette fragilité devinée dans chaque jointure, dans ce mortier de dernière minute qui colmate ces centimètres qui manquent avec peut-être un peu trop d’eau et un sable de qualité médiocre, savoir que tout n’a pas été parfaitement construit comme on l’avait pensé, qu’i a fallu ajuster. Ajuster, c’était leur mot. Tout le temps, on ajustera, tu as ajusté, ça s’ajuste ça, c’est que ça n’est pas encore ajusté ; et lui il entendait pour accompagner ces ajustements les tuiles tomber, un bruit comme des assiettes que l’on casse une par une.
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Il a été prévu que Considerant soit reçu chez un sympathisant, un ami de la cause fouriériste, abonné aux revues, un type qui n’est un ami surtout que parce qu’il partage les mêmes vues sur le sens des choses à accomplir pour améliorer la vie des autres et la sienne. C’est avant tout un inconnu, dévoué admiratif révérencieux, avec un solide sens de l’organisation, qui a rabattu pour cette réunion tout ce que le canton compte de socialistes et de fouriéristes, c’est-à-dire de bibliothécaires, de journalistes sans emploi, de petits entrepreneurs aux idées larges, de médecins qui éradiquent gratuitement les maladies le dimanche, de ces avocats qui se croient connaisseurs des hommes d’avoir été commis d’office. Il a aussi repoussé les chaises et les bancs contre les murs, mis la table dans un coin avec des carafes de vins, des verres et de quoi manger un coup.
Considerant connaît son public et avant même d’y être, il imagine sans effort ceux qui seront là, sages et attentifs, raides comme beaucoup de ceux qui ont des valeurs auxquelles ils tiennent, l’élégance élimée dans leurs vestes de laine et de velours un peu flasques, presque débraillés, des moustaches, des cheveux épais et longs, des chapeaux tenus respectueusement à la main comme le font les paysans à la messe. Si seulement c’étaient des paysans ou des ouvriers agricoles. Ce sont ceux-là qu’il lui faudrait. Ou bien des menuisiers, des charpentiers, des maçons, des cuisiniers, des hommes et des femmes qui savent faire pousser, construire, bâtir à partir de rien, à partir du vide. Mais ceux-là sont occupés ailleurs par leurs mains, leurs bras, leurs jambes ou épuisés, couchés, endormis par la fatigue de la journée, de leurs bras, de leurs jambes. Ceux qui vont l’écouter ce soir ne souffrent pas de la faim. Si devant Considerant ils seront dans leurs petits souliers, ils ont cette solide assurance qui naît en dessous du menton et qui s’étale jusqu’au mollet de ceux qui font trois bons repas par jour. Ils auront le teint vif. Considerant regrette l’homogénéité de son public ; il aimerait que ce soit un peu plus bigarré, plus représentatif des différentes catégories de la société, car c’est pour tous qu’il écrit et qu’il pense. Non pas qu’il espère créer une société nouvelle où toutes les anciennes catégories sociales seraient représentées, mais plutôt que sa foi dans sa vision prophétique et rationnelle serait mieux récompensée si ses raisonnements séduisaient au-delà des habituels intéressés. Il fera avec ce qu’il a : ceux qui le lisent ; ceux qui lui ressemblent. Ce n’est déjà pas si mal.
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Au bout du trajet, une petite vingtaine de minutes après Dallas, il y a, au pied de la lettre, un champ de ruines. Un champ très grand, quoiqu’il soit difficile de délimiter la taille du champ tant l’espace des ruines, ce fantôme de pierres absentes, se mêle dans un camaïeu de jaune, au soleil, au ciel, au sable, à la poussière dans l’air, au reste du désert. Il y a seulement de gros tas de pierres et de bois qui permet d’imaginer des maisons. Partout un mélange de sable et d’une terre légère qui s’envolerait si l’on soufflait dessus, juste bon à fabriquer de la chaux. Ça crisse sous les dents. Des restes de cheminements plutôt que de chemins, là où la terre et le sable sont plus écrasés. Des pierres qui ne sont pas déjà dans les murs de la maison d’un autre au milieu de rien si ce n’est ces petites touffes vertes. À partir des décombres on devine des maisons resserrées autour de deux ou trois bâtiments plus grands, éventrés, sans toitures. Plus loin, plus au sud, d’autres maisons mieux alignées. Des restes dispersés. Une organisation demeure identifiable, les murs, même tombés, continuent de faire parler, même si c’est très peu, ceux qui étaient là : comme si, malgré l’absence de toute trace écrite, on pouvait encore les entendre dire j’ai été là. Il y a les traces du passage d’une vie habitée mais pas celle de la mort qui serait restée. Pas de cimetière, seulement une croix. Il y a des ustensiles variés, incompréhensibles, de cuisine ou de bricolage, probablement, un amoncellement de bois, de vaisselles salies par les années à prendre la pluie, le sable et le soleil. On devine des sentiers que la végétation au sol, même rase, même si elle a repris largement à son compte l’espace, n’a pas encore recouverts. Du vide avec pourtant des souvenirs apparents. Quelques murs qui tiennent encore permettent de penser les portes inutiles de plusieurs petites maisons tassées. Les oiseaux font vraiment beaucoup de bruit ou alors c’est à cause du silence du lieu ? On ne vit pas ici, sur ce plateau de sable, on ne peut pas y vivre, c’est impossible, comme si l’impossibilité de le faire était plus encore, une interdiction, de celles innées, enfermées dans les os et dans le sang, pour vous obliger à vivre ailleurs, sauver l’espèce, sauf, bien sûr, s’il ne s’agit que de survivre. Et encore. Car comment respirer ? On doit se prendre tout le vent dans la figure, un vent bien rempli de sable. Car comment manger ? Car à qui parler ? Tout ce ciel, tout ce sable, cela a dû être simple d’avoir peur de vivre ici, d’avoir peur en vivant ici.
Fin 1860, ces ruines, c’est tout ce qu’il reste de Réunion, initiative de la Société de la colonisation dont Victor Considerant était sur place l’exécutant, les bras et les jambes pour parler comme les publicités anthropomorphistes du XVIIIe siècle mais dont il fut, en amont, la tête, l’âme. Celui qui avait élaboré tout ça. Ce naufrage aussi bien sûr.
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C'est à cause du bruit des tuiles qui se brisent, de la peur des toits qui s'écroulent qu'il n'a pas voulu faire comme eux.
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