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Victor Considerant parcourt les villes de France pour convaincre des hommes et des femmes de devenir colons associés et de participer à son projet de fonder au Texas, où les terrains sont peu chers, une nouvelle société librement organisée, dans laquelle chacun pourra vivre dans une harmonie heureuse. En 1855, tel Moise avec une trentaine de compagnons, il atteint la terre promise.

Pour moi qui aime l'Histoire, ce roman ne pouvait que m'intéresser. le récit est en effet basé sur des faits historiques, et aussi incroyable que cela puisse paraître, Victor Considerant a bien réussi à convaincre des hommes dont le quotidien monotone manquait de joie, de le suivre dans un projet complètement utopiste et irraisonné : fonder une communauté avec l'espoir de vivre une autre vie.

Thomas Giraud fait référence aux thèses de Charles Fourier, philosophe français dont Considerant va s'inspirer dans sa folle aventure. Je ne connaissais pas cette organisation sociale basée sur des groupements de production et de consommation dans lesquels chacun pratique plusieurs métiers par alternance, ce qui lui permet de développer toutes ses facultés. Les revenus sont répartis entre le capital, le travail et le talent. Ses écrits ont, selon certains, inspiré Karl Marx et jeté les bases du socialisme.

J'ai bien aimé la construction du roman, Thomas Giraud nous entraîne dans cette dramatique épopée à travers le portrait de deux hommes que tout sépare : Victor prépare méticuleusement et scientifiquement l'implantation future. Il essaye de tout prévoir sur ses plans, maîtriser la terre, le climat, les vents, les plantes. Aveuglé par ses théories de société où chacun pourra vivre harmonieusement, il ne voudra pas comprendre ce qui se passe, persistant dans sa folie. Leroux est un agriculteur épuisé qui abandonne tout, attiré par le rêve d'une autre vie. Il va se rendre compte tout de suite de la pauvreté de la terre, il n'y a que des cailloux, de la poussière et des serpents. le terrain est beaucoup trop en pente pour construire des habitations, la rivière ressemble à un ruisseau.

L'écriture précise de l'auteur nous plonge au milieu de cette communauté et nous partageons leur vie, leurs espoirs et leurs déceptions. C'est donc un récit vivant qui m'a intéressé, d'une part par ce que j'ai appris sur un courant de pensée que je ne connaissais absolument pas, et d'autre part par le déroulé de l'histoire qui démontre comment un homme par un discours parfaitement choisi, faisant miroiter un paradis peut entraîner des gens en enfer dans une aventure des plus périlleuses.
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Réinventer la société est une constante de notre humanité. Depuis la diffusion des théories de Charles Fourier, les tentatives de fondation d'un phalanstère, entre aventure et utopie, se sont multipliées (p51). Certaines communautés ont perduré (ex : Twin Oaks - USA), donnant raison à tous ceux qui avaient des projets similaires. Avec « le bruit des tuiles », Thomas Giraud décrypte les mécanismes de construction et de destruction d'une société idéale, nous expliquant pourquoi des êtres, pas nécessairement infortunés, décident un beau jour de s'établir sur une terre inconnue. « Était-ce le manque de quelque chose qui les tenait prêts à tout quitter pour beaucoup de promesses ? » (p36). Nous affirmant que la foi est le moteur de toutes les folies : « (…) avoir cette forme de foi qui rend aveugle à tout ce qui n‘est pas l'espoir du paradis. » (p87). On ne peut s'empêcher, en lisant ce roman, de penser à la fresque magnifique de Paul Thomas Anderson « There will be blood » dans laquelle l'ambition et la conquête sont si bien décrites. Mais j'ai surtout vu dans ce livre une métaphore habile de la création et de l'échec d'une entreprise. Dans les deux cas, on parle d'une société, de sa croissance, de la gestion des hommes, de la responsabilité et du charisme (ou de l'incompétence) du fondateur. Jusqu'au nom du phalanstère : « Réunion ». Quant aux fameuses tuiles, elles sont une allusion non dissimulée aux ennuis qui s'accumulent. Tous les passages dédiés au partage des tâches sont un écho aux débats actuels sur la quête de sens et les nouvelles organisations du travail. Une lecture à double sens donc, plutôt plaisante, malgré quelques lourdeurs et de nombreuses répétitions des idées.
Bilan : 🌹🌹
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« Tout ce ciel, tout ce sable, cela a dû être simple d'avoir peur de vivre ici, d'avoir peur en vivant ici. » (p. 13) C'est l'histoire de Réunion, rêve d'une ville idéale qui a tourné au cauchemar sur les terres désertiques du Texas. le projet est porté par Victor Considerant, polytechnicien et adepte de la doctrine de Charles Fourier. Pendant des semaines, l'homme harangue les foules pour convaincre du bien-fondé de son projet, « une réalisation grandiose dans le plus bel État du plus beau pays du monde » (p. 58). Finalement, une trentaine de colons français, belges et suisses se présentent au Havre. « Était-ce le manque de quelque chose qui les tenait prêts à tout quitter pour beaucoup de promesses ? » (p. 36) Après la longue traversée de l'Atlantique commence l'interminable périple à travers les jeunes États-Unis. Hélas, les terres que Considerant a achetées par correspondance ne valent rien. Stériles, brûlées par le soleil de l'été et le froid de l'hiver, elles ne produisent que pierres et poussière. Déconvenue, déception, désillusion, désespoir : voilà ce qui attend les colons. L'enthousiasme premier ne fait pas long feu et le beau projet s'effrite. Certains partent, d'autres meurent, et Réunion reste une illusion. « Au fond le langage lui fait défaut pour formuler le vide. Acculé à la honte, devant l'effondrement ou plutôt devant ce qui ne s'est jamais vraiment construit, il ne trouve rien d'autre que du vide à reformuler, de vieilles idées fades et collantes comme un vieux bonbon à ressasser. » (p. 196)

Avec cette chronique d'un échec annoncé, l'auteur brosse le portrait d'un maniaque du contrôle. « Il ne voulait pas vivre de l'improvisation, ne pas composer avec les aléas. » (p. 114) Victor Considerant est aussi complètement incapable de se remettre en question, car il estime que ses calculs sont bons, que l'erreur ne vient pas de là. Il ne comprend pas pourquoi ses plans ne tournent pas comme il l'imagine. « Ses dessins, il faudrait que, même si ça lui déplaît, il les ajuste pour tenir compte de la réalité. Pas l'inverse. » (p. 124) Sauf qu'en fait, le fouriériste n'a pas tout planifié : il reste une inconnue qu'il ne sait pas intégrer dans ses prévisions mathématiques. « Ce qui l'a le plus surpris, c'est que personne ne lui ait dit que le malheur devait se prévoir. » (p. 265)

Je ne connaissais pas l'épisode historico-géographique et socio-philosophique de Réunion. Il m'inspire autant d'admiration que de déception et de frustration. le site a disparu, recouvert par Dallas qui n'était alors qu'un village, mais qui s'est prospèrement étendu sur des terres qui ont fait le malheur d'une poignée d'Européens. Preuve que le Far West est un monde plus cruel pour certains que pour d'autres. « Je ne veux pas recommencer à vivre là-bas comme j'ai vécu ici. Ailleurs sera mieux car ailleurs est toujours mieux. » (p. 78) La narration qui alterne sans cesse entre première et troisième personne rend le discours plus audible, plus direct, plus immédiat. C'est presque comme si on y était, les pieds dans la poussière et la tête brûlée par le soleil texan.
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La préméditation de l'utopie, la place du hasard, de l'autre, dans nos projets et tous nos ajustements à une réalité contondante. Dans une langue ciselée, comme coupante dans son rythme et ses lancinantes obsessions, Thomas Giraud retrace le destin de Réunion, un phalanstère crée près de Dallas autour de 1855. le style si envoûtant du Bruit des tuiles donne un visage à la déraison nécessaire de l'utopie et invente un lieu plein de vide, de vie dans ses contradictions.
Lien : https://viduite.wordpress.co..
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Victor Considérant est un ingénieur, personnage réel de fort caractère qui en 1855 décide de réunir des hommes venant de France et de Suisse pour les embarquer du Havre jusqu'en Amérique où ils batiront une ville communautaire du nom de Réunion dans l'état du Texas. Les maîtres mots de cette utopie sont le plaisir, l'entraide, le travail revisité et n'étant plus vécu comme une contrainte.

Le lecteur sait dès le début que ce projet est voué à l'échec et pourtant il ne peut s'empêcher, à mon image, d'espérer que finalement tout se déroule comme prévu. Il n'en est malheureusement rien et l'intrigue se déroule donc jusqu'à l'échec final.
L'écriture est magnifique, les chapitres défilent avec toujours cette beauté des mots collant à l'atmosphère des lieux, des personnages hauts en couleurs à l'image de Considérant ou encore de l'agriculteur Leroux.

Une belle découverte d'un roman, d'une écriture mais aussi d'une maison d'éditions que je ne connaissais pas !
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*Livre lu dans le cadre de l'opération "Explorateurs de la rentrée littéraire" organisée par le site Lecteurs.com*

Si je vous dis « phalanstère », cela vous parle ? Je vais tout de suite couper court à toute spéculation, il ne s'agit pas d'un insecte ou d'une obscure maladie rare mais bien d'un concept utopique élaboré par Charles Fourier, un philosophe français. Alors de quoi parle-t-on exactement ? Dans le concept de Fourier, la phalange est une communauté d'individus mettant en commun leurs compétences et leur travail pour le profit de tous. le phalanstère est le lieu de vie de cette communauté. Des règles très strictes sont mises en place, par exemple sur le rapport entre le nombre d'individus et la surface occupée ou encore sur l'organisation des bâtiments ou bien sur l'organisation du travail.

Après ce propos liminaire essentiel, rentrons dans le vif du sujet. L'auteur nous raconte ici la tentative de création par un polytechnicien, Considerant (oui, c'est son nom), d'une communauté inspirée du modèle des phalanstères. Vous vous doutez que tout ne va pas se passer comme il l'a prévu. Un ensemble d'éléments perturbateurs tel que le terrain prévu pour accueillir la communauté et le climat, les voisins qu'ils soient opposants ou profiteurs, ou encore les personnalités au sein du groupe vont venir se placer entre Considerant et son projet qu'il a imaginé et millimétré dans les moindres détails. Notre idéaliste va vite se rendre compte que le fossé entre les plans sur le papier et la réalité est parfois important.

Le thème de ce roman est original et vient titiller la curiosité du lecteur, c'est indéniable. Il va pousser le lecteur à s'interroger sur ce concept de communauté à l'organisation idéale, sur la vie en groupe qui peut rapidement être mise à mal par les oppositions entre certains types de personnalité et également sur la nature humaine en générale. Les interactions entre les différents protagonistes sont particulièrement intéressantes, que cela soit entre Considerant et les membres de la communauté, entre les voisins et la communauté ou encore au sein même de la communauté. Pas de dialogue ici, l'auteur reste sur une narration très descriptive, assez détachée et cela va entraîner un effet plutôt indésirable sur le lecteur à mon sens (au moins sur moi en tout cas).

Je m'explique, l'écriture est belle, aucun doute là-dessus, les mots sont maniés avec précision par l'auteur. Quelques effets de style ont pu par moment me faire lever les yeux au ciel et me faire dire « il en fait un peu trop là » et si l'on excepte ces quelques « lourdeurs » stylistiques (je n'aime pas vraiment ce mot mais je n'en avais pas d'autres en stock dans l'immédiat), cela reste agréable à lire et la multiplicité des points de vue apporte un vrai plus au récit. Mais, car il y a un mais, cette narration « détachée » a eu pour effet, sur moi en tout cas, de ne me procurer aucune émotion. Des questionnements, des réflexions, oui indéniablement, mais pas d'émotion, pas d'étonnement, pas de « oh » ni de « aaah », bref, je suis resté détaché de ce roman et c'est un peu dommage compte tenu de ses qualités.

En conclusion, un livre présentant une thématique intéressante, agréable à lire, bien écrit, poussant le lecteur à s'interroger mais il manque un petit quelque chose pour immerger le lecteur dans le récit. La narration est sans doute un peu trop « chirurgicale », c'est du moins l'impression que cela m'a donné. Mon avis final est plutôt nuancé sur cette lecture bien que je ne la déconseille pas. A réserver donc à un public plutôt averti ou du moins bien intéressé par ce sujet (ou encore très curieux).
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À partir d'une utopie franco-texane totalement ratée en 1860, une somptueuse poétique de l'échec annoncé et de la technocratie présomptueuse.

Sur le blog Charybde 27 : https://charybde2.wordpress.com/2019/11/05/note-de-lecture-le-bruit-des-tuiles-thomas-giraud/
Lien : https://charybde2.wordpress...
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Livre reçu par Masse Critique. Merci à l'éditeur La Contre Allée grâce à qui j'ai appris le mot "colophon".
Victor Considerant est un personnage historique réel (allez voir sa biographie sur Wikipedia). Polytechnicien et fouriériste, il est convaincu qu'une communauté bien préparée peut fonctionner. Il planifie tout, réunit des fonds, achète des terres au Texas et convainc une vingtaine de personnes de l'accompagner pour cette expérience. Malheureusement il est parti sur de mauvaises hypothèses (les terres achetées à l'aveugle sont arides et rien n'y poussera), n'a pas emmené comme il l'aurait dû des colons possédant des compétences utiles (des paysans, des charpentiers, un médecin, ...), et n'a pas lui-même l'étoffe d'un aventurier. Il ne suffit pas de tout calculer à l'avance, c'est un peu "veau, vache, cochon" ...
Le "bruit des tuiles" fait référence de façon récurrente et prémonitoire à l'angoisse de Considerant qui craint que ce qu'il bâtit ne s'effondre (tuile par tuile). Cela le pousse parfois à se retirer dans une inaction fatale, mais comme le dit Leroux (le paysan, le seul qui était utile à l'expédition), en arrivant et en voyant la terre, ils savaient tous que rien n'allait fonctionner comme prévu.
Dès le départ j'ai bien aimé le style de l'écriture. La langue est agréable même si elle fait un peu surannée. La lecture est assez "monocorde", mais on suit le récit avec intérêt. C'est une histoire de mauvaise gestion de projet, à faire analyser aux élèves ingénieurs ;-).
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Aventure utopique

Le récit de Thomas Giraud, basé sur des faits réels, relate l'aventure utopiste et démente de Victor Considerant, ingénieur polytechnicien et théoricien socialiste, parti créer en 1855 un phalanstère nommé Réunion sur les terres arides du Texas.

Victor Considerant, disciple du philosophe Charles Fourier, défend la perspective révolutionnaire d'une colonie où règnerait une vie égalitaire, ce qui séduit de nombreux volontaires. Des Français, des Suisses et parmi eux, Leroux, un jeune paysan attiré comme tous par la promesse d'une vie idéale. À peine arrivés, leurs illusions s'envolent déjà et ils ne sont pas au bout de leur peine. Rien ne leur sera épargné cinq années durant. Terres incultes, rejet par la population locale, catastrophes naturelles, famine, dissensions au niveau de la communauté, discorde avec Victor Considérant.

L'auteur raconte ce qu'il advient de Réunion en inscrivant son récit dans une temporalité courte, la durée de vie du phalanstère, en faisant le choix de s'éloigner du documentaire tout en conservant la dimension historique. La narration évolue en fonction du point de vue des différents personnages, essentiellement Considérant et ses pensées lancinantes, Leroux face à sa solitude et quelques membres de la communauté qui expriment leur déception et leur colère.

La focalisation sur les obsessions de Considerant emporté par ses convictions politiques et ses théories sociétales jusqu'à la folie en font un héros pathétique et peu sympathique. le jeune Leroux fuyant un destin familial, s'accrochant à cette nouvelle terre avec opiniâtreté puis résignation est réellement touchant.

L'écriture est précise, technique, le vocabulaire soutenu. le sujet est intéressant et pourtant j'ai trouvé qu'il manquait quelque chose de vibrant à cette reconstitution d'utopie collective sombrant dans la déraison. La narration est très distanciée et manque un peu de sentiment et d'émotion.

Il faut néanmoins se replacer dans le contexte historique de l'époque pour mieux saisir la personnalité de Considérant, un des chefs de file de l'École sociétaire et comprendre les motivations des colons partis vers cette terre promise et inconnue sans aucune conscience de la réalité.

Un récit original et intéressant pour férus d'Histoire et de politique !


Merci à lecteurs.com pour ce livre lu dans le cadre des Explorateurs de la rentrée littéraire 2019.
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Si vous êtes en réflexion sur le modèle de société que vous souhaitez pour vous et vos enfants demain, lisez ce livre !

Si vous êtes un fervent passionné d'histoire des idées politiques, lisez ce livre !

Si le progrès humain vous fascine, lisez ce livre !

L'auteur a repris le cheminement de Victor Considérant, en quête d'un monde nouveau et d'une société meilleure. Il a romancé l'histoire et le projet incroyable de cet homme... l'histoire reprend la construction, puis la tentative de mise en place de son projet de phalanstère sur la terre nouvelle d'Amerique. Il évoque l'ensemble du projet : les moments d'effervescence, mais également de doute... au delà du résultat, c'est une magnifique histoire d'un homme qui a cru a des idéaux et qui est allé jusqu'au bout des idées pour les mettre en place. Un exemple à suivre et à lire pour ceux qui veulent changer la société dans laquelle ils vivent.
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